Delphine se planta devant le miroir : le visage, ça allait. Son maquillage naturel la mettait plutôt en valeur, tout en demeurant suffisamment discret. Une fine couche de mascara accentuait son regard noisette, tandis qu’un peu de rose rehaussait son teint palot. Elle scruta plus attentivement le détail, elle n’était plus novice en la matière et savait qu’ils ne laisseraient rien passer. Plus elle regardait, plus son visage lui paraissait étranger, monstrueux. Son nez démesuré, sa bouche trop fine, ses yeux rapprochés, qui lui avait foutu une gueule pareille ? « Belle de loin mais loin d’être belle », bon décidément, le visage, ça irait, de loin.

Son corps, en revanche, lui plaisait davantage. Elle avait toujours eu « deux flotteurs » bien visibles, selon l’expression consacrée de son beauf de cousin pourtant adoré, professeur d’équitation qui avait tout fait pour lui enseigner les rudiments. Mais elle qui adorait les chevaux ne supportait pas le galop, ses seins qui partaient dans tous les sens la faisaient trop souffrir. Néanmoins, depuis qu’elle avait pris un peu de poids, sa silhouette était devenue plus harmonieuse, des rondeurs partout, une féminité assumée, du moins c’est ce qu’elle se racontait.

Delphine recula pour se voir de plain-pied : le tailleur, c’était sans doute un peu trop, pas vraiment son style, mais elle voulait tout de même inspirer du respect. Elle troqua sa jupe contre un jean moulant tout en gardant la veste du tailleur. Un mélange de chic et de décontracté, ça passerait bien, ça lui ressemblait plus. Elle se tourna et observa attentivement ses fesses, son dos en général ; il ne fallait surtout pas qu’elle ait une tache, ce serait le pire, ils ne la louperaient pas. Mais non, tout était parfait.

De toute façon, il ne devait plus rester beaucoup de temps avant de partir, et elle voulait avoir le temps de se relire. Même si le niveau baissait chaque année, et qu’ils ne savaient plus faire de divisions, elle avait tout de même l’intention d’être une bonne prof.