La Géhenne. Quel monde pourri! Le ciel est constamment gris, les nuages noirs, car chargés de carbone. Une pluie de charbon liquéfié s'écoule presque tous les jours. Notre monde représente vraiment la damnation. Moi, Lilith, Démon ancestral de plus de mille ans, dis stop. J'en ai assez de cette vie dans ce monde lugubre. Franchement, il n'y a plus rien d'autre à faire à part se battre. Se battre encore et encore contre les Anges. J'en ai assez de toutes ces tueries. Pas que le massacre de ces plumés me dérange, loin de là, c'est juste que... Je veux vivre autre chose que la guerre. Monter à la surface, découvrir le monde des Hommes, vivre une folle aventure, et bien d'autres actions à réaliser. Mon monde m'ennuie. Je n'en peux plus. Il faut au plus vite modifier mon quotidien morne.

J'abandonne la minable vue du balcon et descends les marches, direction ma salle de bain. Ma servante a déjà fait coulé un bon bain chaud. Je retire ma robe victorienne bien trop lourde à mon goût pour me prélasser dans mon nirvana. Je joue des doigts avec l'eau. C'est si bon. Je ressasse de vieux souvenirs. Des souvenirs pas très joyeux. A dire vrai, je ne pense pas avoir vécu un seul moment de joie dans la Géhenne. Dans mon clan, nous sommes tous des guerriers. Les puissants d'entre nous servent directement sous les ordres de sa Majesté. J'ai passé mon enfance à combattre. Entraînement, lutte, survie, duel mortel, guerre. Je n'ai connu que ça. Et ça me suffisait. Tout du moins à l'époque. Mais tout a changé lorsque j'ai atteint la plus haute classe démoniaque. La classe des Archidémons. A partir de cet instant, ma vision du monde a vraiment changé. On m'a fait commandant de la soixante-sixième Légion infernale, envoyé sur de multiples champs de bataille. Grâce à mon talent inné pour la stratégie, nous avons remporté bon nombre de combats. J'ai perdu le compte du nombre d'emplumés abattus. Le temps passe si vite. J'ai continué à combattre. Encore, et encore, et encore, et encore. ça n'avait plus de fin. Puis, un jour, après un énième massacre, je me suis rendue compte que mon monde a toujours été en noir et blanc, maculé de sang. Je ne voyais que ça. Mais à présent, je désire vivre une autre vie. Mais je ne peux pas. Une fois au service du Roi-démon, on ne peut s'y soustraire qu'en mourant.

Au bout de quinze minutes de réflexion, je sors finalement du bain. Je m'approche de la psychée. Mon teint est toujours aussi pâle, diaphane même. Mes yeux, sombres comme la nuit, avec les iris écarlates. Mes pupilles sont félines -fendues comme les chats je veux dire. J'ai vraiment le visage d'une poupée. Mais attention à ma dentition, semblable à celle des vampires. Mes cheveux sont si longs qu'ils s'arrêtent à mi-cuisses, et leur couleur, aussi profonde que la nuit la plus noire. j'ai aussi une longue queue et des cornes. J'ai vraiment l'air d'un démon. Normal, j'en suis un. Je rigole un peu. Je récupère dans mon armoire un pantalon et un débardeur en cuir noir avec de longues bottes assorties. J'ai prévu un entraînement. Je m'apprête à sortir mais me fige. Une odeur étrangère plane dans l'air. Je soupire. Encore une nouvelle tentative d'assassinat. La jalousie des autres Démons à mon égard n'est pas sans pareille. Voir une femme commandée une Légion n'est pas très bien vu ici-bas.

• Qui que vous soyez, veuillez vous montrer qu'on en finisse.

Deux Vampires. Trois Lycans. Dix Djinns. Je suis gâtée. Un Démon ne recule jamais devant un combat. C'est bien connu. Mais là, je suis sacrément remontée. Pourquoi? Leurs bottes pleines de terre viennent de salir mon si beau tapis. J'enrage. Je libère mon feu destructeur qui pulvérise tout. Mon manoir avec. Il ne reste plus rien à part moi. Mais en y réfléchissant, cette énième tentative pourrait me servir à réaliser mon rêve. Ouais. Je vais faire ça.