J’ouvre ma valise qui a été déposée sur mon lit. Je sors tout jusqu’à trouver la robe que je cherche. Elle est magnifique. Une robe près du corps qui s’arrête à mi-cuisse avec de la dentelle sur les manches couleur bordeaux.

Je récupère ma robe, ma paire d’escarpins couleur dorée ainsi que mes affaires de toilette.

Une fois ma douche prise, je m’habille, me sèche les cheveux avec la serviette et commence à me maquiller quand j’entends frapper à la porte de la salle de bain.

— C’est ouvert, dis-je.

La porte s’ouvre et laisse passer la tête de Leandro.

— T’es prête ?

— D’ici quelques minutes … pourquoi, on est en retard ?

— Si tu es prête dans quinze minutes, non.

Je continue à me maquiller quand je vois Leandro me regarder de la tête aux pieds.

— Qu’est-ce qu’il y a ? interrogeais-je.

Il sourit.

— Tu t’es fait belle comme ça pour qui ?

— Commence pas.

— Je pose juste une question.

— J’ai pas le droit d’être un minimum jolie quand je sors ?

— Ah si tu as parfaitement le droit mais … là c’est pas un minimum … tu as carrément sorti l’artillerie lourde là.

Je pose mon feutre rouge à lèvres et je me retourne vers Leandro.

— Tu sais que ça me met super mal à l’aise …

— Ouais je sais mais c’est la vérité. T’es une vraie bombe et ça … n’importe quel homme te le dira. Le Aiden il va en décrocher sa mâchoire le pauvre.

— Arrête … il a dû en voir passer des filles.

— Pas tant que ça. Le cliché des gars friqués qui changent de gonzesses comme de chemises très peu pour lui.

Je regarde Leandro quelques secondes avant de baisser les yeux et de ranger mon matériel.

— J’ai pas envie d’en parler … les quinze minutes sont écoulées, on va être en retard, dis-je en me regardant dans le miroir.

— Beau détournement de sujet … la nounou est arrivée … tu devrais aller la voir.

— Comment ça la nounou ?

Leandro m’invite à sortir de la chambre. Il me suit jusqu’au salon, où je retrouve mon fils avec les enfants de Lukas. Ils ont bien grandi. Une femme est de dos et elle se retourne lorsque Leandro l’appelle.

— Elsa.

Elle sourit lorsqu’elle me voit. Elle se lève et vient me serrer dans ses bras.

— Comment tu vas ? chuchote-t-elle.

— … bien. Je suis très contente d’être revenue … c’est toi la nounou ?

— Oui.

— Tu ne viens pas avec nous ?

— Non, c’est pas trop mon truc. J’ai envie de rester tranquille ce soir.

— Tu verras qu’Enzo est loin de te laisser une soirée tranquille.

— T’inquiète pas, je sais comment faire. Profite-en pour te détendre et t’amuser.

Elle me serre une nouvelle fois dans ses bras.

— Merci.

— Les gars, c’est bon on peut y aller, Cendrillon est enfin prête, lance Leandro.

Lukas et Aiden arrivent dans le salon. Ils me regardent de la tête aux pieds et je me sens super gênée. Je me sens rougir et j’ai chaud tout à coup.

Leandro attrape les clefs de la voiture pendant que Lukas récupère les siennes. Il m’attrape par les épaules et nous sortons de l’appartement.

Une fois dans la voiture, Leandro nous conduit au Night Club. Lukas et Aiden serrent les mains aux videurs et nous entrons dans le club avant tout le monde.

A l’intérieur, c’est rempli de table, il y a une scène et une énorme piste de danse. Il y a un jeu de lumière.

Je suis sortie de mon rêve par Leandro qui m’attrape la main pour me faire avancer. Quelques minutes après, nous arrivons à une table et je vois que les gars du club de boxe sont déjà là. Je m’assoie entre Gabriel et Leandro.

— Je ne connais pas cet endroit, ça a ouvert y a longtemps ? demandais-je.

Leandro sourit avant de me répondre.

— Lukas et Aiden l’ont ouvert y’ a deux ans à peu près. Ça marche du tonnerre.

— Ils proposent quoi ?

— Repas, karaoké, boîte de nuit, enterrement de vie de jeune fille, de célibataire, tu peux faire des anniversaires aussi … elle est très réputée, tout le monde vient ici.

En effet, le club se remplit à une vitesse folle.

— Les gars, prenez ce que vous voulez, c’est moi qui régale, prévient Lukas.

— T’aurais jamais dû dire ça, gars, dit Raph.

Les gars se mettent à rire pendant que le serveur nous apporte la carte. Je parcours le menu et je dois bien reconnaître qu’il est bien diversifié.

Je vois Leandro qui me regarde avec un sourire en coin.

— Quoi ?

— J’attends de voir si tu vas dire quelque chose sur la carte.

C’est à mon tour de rire.

— Je t’ai bien mal habitué.

— Vraiment rien à dire ?

— … on verra bien une fois que les plats seront sur la table.

Raph nous coupe dans notre conversation.

— Les gars vous voulez boire quoi ?

— On va demander des bières. Caitlyn tu veux quoi ?

Tous les regards se tournent vers moi. Je me sens gênée de voir tout le monde me regarder.

— Je … je … je vais prendre un sex on the beach.

Lukas fait signe au serveur et il prend les commandes de tout le monde.

— Alors Aiden, tu as vu quel médecin aux urgences ? demande Lukas.

— J’ai vu un interne … et ça a bien failli être son dernier jour.

— Pourquoi ? Tu as perdu patience ?

Les gars se mettent à rire.

— Je n’étais pas très détendu certes, mais Caitlyn ici présente, si elle avait pu le tuer elle l’aurait fait, répond Aiden en me regardant.

Faut vraiment qu’il arrête de me regarder avec une telle intensité sinon je suis perdue.

— Après faut dire aussi qu’il a pris son temps pour arriver et il a agressé Caitlyn à peine entré dans le box.

Lukas tombe le sourire qu’il avait.

— Qui c’était ?

— Un interne dont on ne connaît pas le nom. Il n’a pas été très agréable alors, je ne l’ai pas été non plus.

— Qu’est-ce qu’il a fait ?

— On a attendu au moins une bonne demi-heure dans le box … j’en ai eu marre d’attendre alors j’ai commencé à désinfecter la plaie qui saignait avec le matériel que j’ai trouvé dans les placards. Il est arrivé, il a commencé à me crier dessus, il a fait ses sutures, son ordo et basta. Pas d’examen clinique, rien.

— Comment ça pas d’examen ?

— Pas de question sur les circonstances, de recherches de signes de trauma crânien, rien, que dalle.

Le visage de Lukas se durcit. Il fronce les sourcils, mécontent.

— Ok … je pense qu’il va entendre parler du pays … du coup comment tu vas faire pour les soins ? Tu veux qu’Elsa s’en occupe ? demande Lukas à son frère.

Aiden me regarde en souriant.

— T’en fais pas. J’ai une infirmière perso qui va s’en occuper.

— Qui ça ?

Aiden ne me lâche pas des yeux. Heureusement que nous ne sommes pas seuls ce soir sinon je lui aurai sauté dessus sans attendre.

— Pourquoi t’es toute rouge Caitlyn ? demande Leandro.

Alors lui je le retiens. Il a de la chance d’être mon meilleur ami sinon je l’aurai étranglé depuis longtemps.

— Quoi ? C’est à cause de moi, alors je répare les dégâts. C’est normal.

Les gars se mettent à rire pendant que les serveurs arrivent avec nos plats.

— Je ne trouve pas ça drôle … quoi que si en fait. Une gonzesse qui vous met une raclée c’est sûrement drôle.

Les rires s’estompent.

— D’ailleurs, où as-tu appris à te battre comme ça ? me demande Raph.

— Désolée, c’est un secret, répondis-je avec un petit sourire en coin.

— Allez, tu peux nous le dire … tu fais partie de la bande maintenant et entre nous on n’a pas de secret.

Je regarde Raph dans les yeux en souriant. Les autres me regardent en attendant une réponse.

— Elle est championne régionale de karaté, les gars … vous n’auriez eu aucune chance, lance Leandro.

Le silence à notre table se fait entendre.

— Bon allez, on mange.

Je baisse la tête vers mon assiette et me concentre sur son contenu. J’attends que les autres fassent la même chose et je tourne la tête vers Leandro.

— Perché lo hai detto ? ( Pourquoi tu as dis ça? )

— È la verità, non è vero ? ( C’est la vérité non ? )

— Sì, ma … (Si, mais ...)

— La prossima volta faranno meno il furbo. ( Ils feront moins les malins sur le ring la prochaine fois. )

Je souris.

Nous mangeons tranquillement. Le repas est excellent. La salle s’est vite remplie, il n’y a plus aucune place de libre.

Un animateur de soirée arrive sur la scène face à notre table.

— Bonsoir à tous, mesdames, messieurs et mesdemoiselles. Bienvenue au Night-Club, j’espère que vous passez une excellente soirée. Comme vous le savez, une partie de la soirée est réservée au chant et c’est donc l’heure du karaoké.

Toute la salle applaudit.

— Qui sera assez courageux pour se lancer en premier, en duo ou en solo à vous de voir.

Leandro me regarde.

— Quoi ? demandais-je.

— On y va ?

—T’es pas sérieux ?

— Si.

— Nan mais attends, y’ a trop de monde là.

— On s’en fout, allez viens !

Il m’attrape par la main et m’entraîne sur la scène avec lui sous les applaudissements de la salle.

On se place devant les micros.

— Bonsoir à tous les deux, comment vous vous appelez ?

— Leandro et Caitlyn.

Je suis tellement accaparée par le monde présent en face de moi que je n’entends pas l’animateur me parler. Leandro a choisi la chanson.

Je reviens à moi au moment où Leandro commence à chanter et il me fait signe de le regarder. Je me tourne vers lui et me concentre uniquement sur lui. Je sais que je peux me sentir en confiance avec lui. Il est mon pilier depuis 20 ans.

Je décide de l’accompagner en italien sur cette chanson. Après tout, je parle italien couramment, pourquoi m’en priver ?

La salle est plongée dans le noir, il n’y a que Leandro et moi qui sommes éclairés par la lumière. J’essaie de faire abstraction des regards pointés sur nous en ne regardant que Leandro.

Leandro a toujours eu une très belle voix, je suis sûre qu’il aurait pu faire carrière mais il n’a jamais voulu passer de casting.

Quand ce fut à mon tour de chanter, je me laisse bercer par la mélodie. Leandro me sourit et je prends confiance en moi.

Je me surprends même à fermer les yeux et à me laisser envahir par la mélodie. Je souris. J’avais oublié quelles sensations ça pouvait transmettre. C’est aussi fort que lorsque je danse.

A la dernière note je souris en regardant Leandro. Je suis sûre qu’il est dans le même état que moi.

Je plaque ma main sur ma bouche et continue de sourire. Leandro vient vers moi. Il m’embrasse sur la joue et me serre contre lui. Les gens applaudissent et la lumière est rallumée dans la salle. Il met ses mains sur mes joues et me regarde dans les yeux.

— Era una bellissima principessa. ( C'était magnifique princesse. )

Je continue de sourire.

Leandro prend ma main dans la sienne pour me faire descendre de la scène mais je reste sur place. Il se retourne.

— Je veux en faire une autre, lui dis-je.

Il hoche la tête en souriant. Je me retourne vers le micro.

— Euh … je ne sais pas si je peux mais j’aimerais chanter à nouveau.

L’animateur se place à côté de moi.

— Je pense que tu peux, n’est-ce pas ?

Plusieurs personnes crient « oui » dans la salle.

— Très bien … alors … il y a peu de temps, j’ai eu de gros soucis qui ont failli me coûter la vie et … et j’ai eu la chance que mes amis soient là pour moi. Ils m’ont sauvée alors je voudrais les remercier parce que sans eux … je ne serai plus là.

— Quelle chanson voudrais-tu ?

Je lui chuchote à l’oreille « A nos héros ». L’animateur hoche la tête et sélectionne la chanson.

Je tourne la tête vers notre table, regarde Lukas et Leandro puis place ma main sur mon cœur.

Quand la musique démarre, je leur souris. Lukas a l’air gêné ce qui me fait sourire.

Je commence à chanter et je ne lâche pas Lukas et Leandro des yeux. Je vois Leandro qui gesticule sur sa chaise, ça à l’air de lui plaire. C’est bien la première fois que je vois Lukas gêné comme ça et je veux le remercier pour ce qu’il a fait pour moi.

Quand j’arrive au refrain, je vois Leandro se lever et taper dans les mains. Il est toujours là pour mettre l’ambiance. Les autres le suivent puis toute la salle est debout. C’est à mon tour d’être gênée.

Leandro se déhanche et je souris.

A la fin de la chanson, Leandro se met à siffler et ils applaudissent. Je souris timidement et je descends de la scène.

Lukas attend que je les rejoigne et il me prend dans ses bras.

— Merci, ça me touche beaucoup, me dit-il au creux de l’oreille.

Il desserre son emprise et me regarde dans les yeux.

— Eh, pleure pas.

Je souris pendant qu’il essuie les quelques larmes qui s’étaient mises à couler. Je retourne m’asseoir à ma place en ayant les regards des gars sur moi.

— T’as beaucoup de talents cachés encore ? me demande Raph.

Je le regarde, gênée.

— Peut-être bien … mais tu ne sauras rien de plus ce soir.

— Une autre fois peut-être ?

— Pourquoi pas.

Il me fait un clin d’œil en souriant. Il n’est pas si méchant que ça finalement. Je pense qu’on pourrait bien s’entendre.

Un peu plus tard dans la soirée, la partie danse est un succès. La plupart des gens étaient sur la piste de danse. Le DJ est top, il envoie de la bonne musique.

J’attrape Leandro par la main et nous allons sur la piste de danse. Je m’agrippe à son cou et je commence à danser. Il me regarde avec un œil suspicieux.

— T’as bu combien de verres ?

— Deux et je ne vais pas m’arrêter là, ce soir c’est toi qui conduit et j’ai envie de m’amuser.

Il sourit et pose une main sur ma hanche. Il danse contre moi et la température monte d’un cran.

Nous dansons durant une bonne heure avant d’aller boire un verre à notre table.

— Vous devriez venir danser au lieu de rester assis, dis-je.

— On préfère admirer le spectacle d’ici. C’est plus agréable, me répond Raph.

Les gars se mettent à rire.

— Si vous voulez repartir tout seuls, ouais.

— Qui te dis qu’on est seuls ?

— Aucun de vous ne porte d’alliance à part Lukas, et vu comment vous me matez, ça doit faire un moment que vous avez vu personne les gars.

— Ok … un point pour toi …

Il boit une gorgée de bière pendant que le DJ passe une nouvelle chanson. Je me lève et retourne sur la piste.

Quelques minutes après, je sens une main se placer sur mon ventre. Surprise, je me retourne.

— Tu m’accordes cette danse ? Je ne suis pas un très bon danseur mais j’voudrais m’excuser pour mon comportement à la salle tout à l’heure, me dit Raph.

Je lui souris.

— Avec plaisir.

Il se place derrière moi, sa main sur mon ventre et nous nous défoulons. Certes, ce n’est pas un grand danseur mais il ne manque pas de vivacité.

Leandro nous rejoint à la fin de la chanson.

— J’ai demandé au DJ d’en passer une que tu adores.

— Laquelle ?

Quand j’entends la musique, je tape dans mes mains, trop contente.

— Je vais vous laisser, me dit Raph.

— Nan reste, c’est super facile, lui dis-je en l’attrapant par le bras.

— Je préfère admirer le spectacle.

— Ok, alors attends.

Je retire ma paire d’escarpins et les lui donne.

— Tu es responsable de mes chaussures … prends-en soin, elles m’ont coutée super cher.

Il sourit et repart à notre table avec ma paire de chaussure dans les mains.

Avec Leandro, on se met en place et on commence à danser. Le sourire ne me quitte plus. La danse c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas.

Cette choré, je l’ai dans le sang. Un cercle s’est formé autour de nous et les gens nous applaudissent.

Les gars qui sont venus avec nous étaient aux premières loges. Ils tapent dans leurs mains au rythme de la musique remixée.

On entendait des gens siffler, bon en même temps ma robe est un peu courte c’est vrai, ça doit en rameuter pas mal.

A la fin de la musique, je reprends mon souffle, les mains sur les hanches. Je regarde Leandro qui est dans la même position que moi puis il vient m’embrasser la joue et me serrer dans ses bras.

La soirée continue sur le même ton et le serveur vient nous resservir. Lukas revient à notre table après avoir répondu à son téléphone.

— Désolé les gars, le devoir m’appelle. Je vais devoir y aller.

— Les joies d’être chirurgien.

— Les joies d’être d’astreinte surtout. Bonne fin de soirée les gars.

Je regarde Lukas partir avec un pincement au cœur.

— Ça va ? me demande Leandro.

— Ouais ça va.

Je bois une gorgée de mon verre et lui souris. Je me lève et retourne sur la piste de danse. Je suis rejoint par Raph et les autres. Seul Leandro est resté accoudé à notre table avec Aiden.

Je vois Aiden me regarder à plusieurs reprises pendant que je danse avec Raph.

Raph sourit et se penche vers moi.

— Tu lui plais.

— De qui tu parles ?

— Aiden … il n’a fait que te regarder depuis qu’on t’a rencontrée cette après-midi.

Je regarde Aiden qui discute avec Leandro. Enfin … c’est plutôt Leandro qui parle, Aiden, lui, nous regarde.

— Il peut avoir n’importe quelle fille à ses pieds en un claquement de doigt. Il ne va pas s’arrêter sur une fille comme moi.

— Il n’est pas comme ça. Ses copines tu peux les compter sur les doigts de la main. Malheureusement, il n’a jamais eu de chance avec la gente féminine, elles sont plus intéressées par son fric que par lui et c’est bien triste. C’est un super gars.

— Elles ont essayé de le dépouiller ?

— Certaines ont essayé mais elles s’en sont mordues les doigts et puis il reste très méfiant … et Leandro te dira la même chose … jamais je ne l’ai vu regarder une fille comme il te regarde.

— Je ne sais pas …

Je vois Leandro se lever et rejoindre les garçons sur la piste de danse.

— Tu m’excuses …

J’abandonne Raph et rejoins Aiden à notre table.

— Tout va bien ? lui demandais-je.

— Oui ça va.

— Je ne t’ai pas encore vu une seule fois sur la piste de danse. Ça ne va pas être possible ça.

Il se met à rire.

— La danse, ce n’est pas vraiment mon truc, alors j’évite d’y aller.

— Alors ça, c’est une excuse vraiment toute pourrie. Quand vous sortez, tu restes toujours seul à la table toute la soirée ?

Il me regarde en me fixant dans le yeux.

— Pas ce soir. Je suis en très bonne compagnie … et je viens rarement à ce genre de soirée. En général, j’ai beaucoup de travail.

— Le travail ne fait pas tout … c’est vrai que tu aimes tout contrôler, ça ne doit pas être évident pour toi de déléguer un peu.

— Je ne délègue rien à personne, c’est impossible.

— … j’ai appris que rien n’est impossible dans le vie, il suffit de le vouloir et de s’en donner les moyens … d’ailleurs vu que tu parles affaires, Leandro m’a dit tout à l’heure que tu nous sponsorisais pour la salle.

— Oui … il est venu m’expliquer votre projet, il est vraiment très impliqué et sa façon de me vendre votre projet m’a plu. J’ai décidé d’investir.

— Je suis ravie que tu l’ai fait … j’aimerais, si c’est possible, qu’on puisse se voir pour parler de ça justement. Leandro m’a dit que vous aviez déjà commencé à préparer quelque chose pour la partie danse et j’aimerais pouvoir voir ce que vous avez fait et te présenter mes projets.

Il se redresse et se penche vers moi.

— Tu serais dispo quand ? me demande-t-il.

— Lundi matin. Plus vite on en aura discuté plus vite on pourra mettre en place ce que nous voulons faire et puis comme ça, je te referai ton pansement … enfin c’est comme tu veux.

— Viens lundi matin à 8h30, on aura toute la matinée pour discuter ou même on peut prendre la journée si tu veux.

Je souris.

— Je ne veux pas non plus te prendre ton temps avec mes projets.

— Je manie mon emploi du temps en fonction de mes priorités et vos projets en font partie. Ce que m’a exposé Leandro m’intéresse beaucoup et je tiens mes engagements.

— Alors c’est parfait … tu veux vraiment pas venir danser avec moi au moins une fois ?

Il plisse les yeux en me regardant.

— Je pense que je vais rester là.

— Une petite danse de rien du tout, allez. La prochaine chanson et c’est tout.

— Tu ne vas pas me lâcher hein ?

— Aucune chance.

— Une seule danse ?

— Une seule, promis.

— Je tiens juste à souligner que je ne sais pas danser et que tu vas prendre des coups.

— J’ai dansé avec Raph et j’en suis sortie vivante. Je survivrai.

— Ok.

Plusieurs minutes après, une nouvelle musique commence. J’attrape la main de Aiden et l’entraîne sur la piste de danse.

Je me place devant lui, place sa main dans le bas de mon dos et mets la mienne dans son cou.

— Tu me suis.

Quand je lève les yeux vers lui, je le vois me fixer avec une intensité qui me ferait complètement craquer si je n’arrivais pas à tenir.

Je ne sais pas si je vais pouvoir continuer à soutenir son regard toute la chanson. Je ne peux pas me permettre de me laisser aller, j’aurai beaucoup trop à perdre.

Pendant qu’il danse avec moi, j’ai l’impression qu’il se retient et je ne sais pas pourquoi. Il a l’air d’avoir un certain talent mais il n’ose pas. Peut-être que Raph a raison et qu’il n’ose pas se laisser aller.

Autour de nous, je vois les garçons. Ils se sont arrêtés de danser et nous regardent. Ils esquissent un sourire en regardant Aiden.

Vers la fin de la chanson, il s’est un peu plus « lâché » mais il est toujours dans la retenue.

Quand la musique s’arrête, il ne me lâche pas tout de suite et continue de me fixer dans les yeux. Je finis par sourire, gênée puis il me lâche.

Nous retournons à notre table sous le regard des garçons.

— Vous vous êtes éclatés ? demande Raph en souriant.

Aiden me regarde en souriant également.

Quelques minutes plus tard, nous décidons de partir.

— Tu me déposes chez moi ? demande Aiden à Leandro.

— Impossible, lui répondis-je.

— Pourquoi ça ?

— Parce que tu es à surveiller 24 heures à la suite du coup que tu as reçu à la tête.

— Et je ne peux pas me surveiller tout seul ?

— Non, y’a un examen à faire toutes les deux heures pour voir s’il n’y a pas de lésion au cerveau.

Aiden s’apprêtait à répondre mais Leandro le coupe.

— Mec, elle te lâchera pas. Si j’étais toi, je l’écouterai, elle en connait un rayon.

— C’est ce que j’ai cru comprendre. Est-ce que j’ai le choix ?

— Pas vraiment en fait, lui répondis-je.

Les gars se mettent à rire.

— Bon les gars, on va vous laisser. Aiden, t’es entre de bonnes mains, à lundi.

Nous partons chacun de notre côté. En rentrant à la maison, je vois qu’Elsa avait déplié le canapé. Elle avait installé des oreillers et un drap.

— Mon pote, je te laisse ma chambre, propose Leandro.

— Ca va aller, je peux me contenter du canapé.

— T’es sûr ?

— Oui.

Je prends le drap et le déplie.

— Les gars, si vous voulez aller à la salle de bain, allez-y avant que j’y aille, leur dis-je avec un sourire.

— J’y vais. Aiden, tu fais comme chez toi.

Leandro rejoint sa chambre pour prendre ses affaires et va prendre sa douche nous laissant Aiden et moi dans le salon.

— Un dernier verre, ça te dit ? proposais-je.

— Hum … pourquoi pas.

J’ouvre le placard de la cuisine.

— Whisky ?

— C’est parfait.

Je sors deux verres et lui en sers un. Je m’assois face à lui et le fixe.

— Je peux te poser une question ?

Il esquisse un sourire.

— Pourquoi tu t’es retenu ?

— Comment ça ?

— Pendant qu’on dansait tout à l’heure … je t’ai senti sur la retenue.

— Je n’étais pas super à l’aise c’est sûr mais c’est une habitude que j’ai prise.

— Je suis désolée si je t’ai mis mal à l’aise, ce n’est pas du tout ce que je voulais.

— Ne sois pas désolée, j’ai pris cette habitude à cause des journalistes et des paparazzis.

— Pourquoi ?

— Quand tu es un jeune milliardaire qui réussit à créer une entreprise comme celle que je dirige, la population t’attend au tournant et à la moindre miette que je sème ils se jettent dessus comme des voraces, alors en général, j’évite de trop m’exposer pour avoir un semblant de vie privée … mais tu as eu raison de me pousser, ça m’a vraiment fait du bien.

Je lui souris au moment où Leandro revient dans la cuisine.

— Au suivant.

Aiden se lève et prend la suite. Leandro lui a laissé de quoi se changer dans la salle de bain.

— De quoi vous parliez ?

— De rien de particulier … lundi matin, je t’accompagne à ton boulot.

— Pourquoi ? me demande-t-il avec le sourire.

— Je te vois venir … arrête ça tout de suite.

— Que j’arrête quoi ? C’est juste une question.

— Je sais à quoi tu penses avec ton petit sourire en coin là, lui répondis-je en lui donnant une tape sur le bras.

Il fait mine d’avoir mal en se massant le bras.

— Bon alors … réponds à la question.

— C’est un rendez-vous professionnel.

— A d’autres.

— J’ai demandé qu’on parle du projet de la salle et de ce que vous aviez commencé à faire pour la danse. Tu m’as dit qu’il était le plus gros investisseur et j’ai pas mal de choses à voir avec lui.

Je le vois plisser les yeux.

— Je vois.

Je plisse les yeux à mon tour.

— Tu vois quoi ?

Aiden choisit ce moment-là pour entrer dans la cuisine. Il ne porte qu’un bas de pyjama. Je le regarde de la tête aux pieds et là … c’est officiel, Leandro m’a perdue. Je viens de partir dans un autre monde.

— Mayday, Mayday … Tour de contrôle à Caitlyn … est-ce que tu me reçois ?

— Hein ?

— Est-ce que tu es avec nous ou t’es toujours au loin ?

— Je … je … je vais aller me doucher.

Je sens le rouge me monter aux joues, j’évite de regarder Aiden en sortant de la cuisine au pas de course.

— Qu’est-ce qu’elle a ? demande Aiden.

— Des œillères, réponds Leandro en avalant le reste de mon verre cul sec. Il pose son verre dans l’évier.

— T’as prévu ta journée au moins lundi ?

— Pourquoi tu demandes ça ?

— Ton rendez-vous avec Caitlyn.

— Euh … oui je peux prendre la journée. Je le lui ai proposé, elle est au courant.

Leandro sourit.

— J’ai vraiment bien accroché à votre projet et tu sais comment je suis dans le boulot.

— T’as bien accroché avec Caitlyn aussi … mon pote, je dois te prévenir à propos de Caitlyn … tu ne sais absolument pas ce qui t’attends avec elle … tu vas t’en mordre les doigts.

— Je pense avoir eu un aperçu depuis qu’elle est arrivée. C’est pour ça que j’ai prévu la journée.

— Oh non mon gars, tu n’as même pas eu un aperçu, crois-moi. Elle est … non je te laisse découvrir par toi-même. Je vais aller me coucher, bonne nuit.

Leandro quitte la cuisine et va dans sa chambre. Il me croise dans le couloir et sourit sans rien dire.

Je sens qu’il ne va pas me lâcher comme ça et je ne sais pas si je dois être contente ou pas.

Je rejoins Aiden au salon.

— … bonne nuit, me dit Aiden.

— Oui merci … euh du coup, je vais devoir te réveiller toutes les deux heures pour vérifier ton état de conscience et la réactivité de tes pupilles.

— C’est obligé toutes les deux heures ? Depuis qu’on est revenus des urgences, il n’y a pas eu d’incident.

— C’est la surveillance de trauma crânien, désolée. Je serai intransigeante là-dessus.

Il me regarde dans les yeux si intensément. J’esquisse un sourire.

— Je reviens te voir dans deux heures.

— A tout à l’heure alors.

Je lui souris et je vais dans ma chambre. Elsa dort déjà depuis longtemps et je ne veux pas la réveiller ainsi que les enfants.

Je m’installe dans mon lit et me tourne sur le côté. J’essaie de m’endormir mais mon cerveau refuse de passer en mode off. Je revois Lukas partir pour l’hôpital … j’ai beau faire la dure, mon boulot à l’hôpital me manque énormément.

Je sais que je ne dois pas m’exposer mais c’est plus fort que moi. Je relève la tête et regarde l’heure. Il est 4 heures du matin, allez faut aller réveiller Aiden. J’espère qu’il ne m’en voudra pas trop.

Je me lève et rejoins Aiden dans le salon. J’allume la lampe et le regarde dormir. Il a l’air si apaisé, si détendu … pas comme sur la piste de danse.

Je pose ma main sur son bras et le secoue un peu. Au bout de quelques secondes, il bouge et ouvre un œil.

— En quoi puis-je t’aider ? me demande-t-il.

Je m’assois sur le bord du canapé.

— Est-ce que tu peux me donner ton nom et ton prénom ?

Je le vois me fixer et cela me trouble.

— Aiden Anderson.

— Tu peux me l’épeler ?

— A.I.D.E.N A.N.D.E.R.S.O. N

— Ok. Je vais regarder tes pupilles.

Je prends mon téléphone et active la lampe torche. Je fixe ses yeux et examine ses pupilles qui sont réactives et normales.

— Glasgow à 15, c’est parfait … est-ce que tu as des douleurs à la tête ? Des nausées ou des vomissements ?

— Rien de tout ça.

— Parfait.

— Quel est votre diagnostic docteur ? me demande-t-il.

— Tout va parfaitement bien.

Je m’apprête à me relever et je sens sa main me retenir par le poignet.

— Attends une seconde, s’il te plait.

Je me retourne vers lui sans me dégager de sa prise. J’aime son contact, il m’apaise.

— Tu vas faire les allers-retours toute la nuit ?

— Il est 4 heures du matin … je n’ai plus qu’une seule surveillance à faire à 6 heures.

— Tu veux pas rester là ?

— Je … je ne sais pas si …

— Si tu as peur que je te saute dessus, je peux très bien m’installer sur le fauteuil. Leandro dit qu’il est très confortable.

J’esquisse un sourire. J’ai très envie de lui dire oui mais je ne sais pas si je peux me l’autoriser. Cela fait trois ans maintenant que je me l’interdis. Je n’arrive pas à passer à autre chose.

Comment peut-il tout remettre tout en cause ?

— Je … tu restes de ton côté du canapé.

— Promis.

— Ok.

Malgré ce que je lui demande, je ressens un grand vide lorsqu’il lâche mon poignet et qu’il recule jusqu’à atterrir de l’autre côté du canapé.

Je m’allonge dans le lit et regarde le plafond. Je sens son regard sur moi.

— Si tu n’es pas à l’aise, je ne veux pas t’obliger.

— C’est pas ça … c’est juste que je n’ai plus l’habitude.

— Comment ça ?

Je me tourne vers lui mais je reste muette puis je me tourne de l’autre côté en essuyant une larme qui coule sur ma joue.

— Caitlyn ?

Je sens sa main se poser et son pouce caresser mon bras. Je tourne ma tête pour le regarder.

— J’ai dit un truc qui ne fallait pas ?

Je le regarde encore quelques minutes.

— Non, je …

Je n’arrive pas à finir ma phrase. Je ne sais pas comment lui expliquer sans lui dévoiler quoi que ce soit.

— Tu n’es pas obligée de me dire, c’est pas grave.

Je le regarde et lui souris.

— Merci.

Il continue de me caresser le bras avec son pouce encore quelques secondes puis il retire sa main et se recule.

— Reste.

— Je croyais que tu …

— Je sais mais … s’il te plait.

Il se rapproche et passe son bras gauche sur mon flanc gauche. Je sens son torse se coller dans mon dos et son souffle chaud dans mon cou.

J’attrape sa main et la serre contre moi comme pour me rassurer. Il a ce don de m’apaiser et ça … même Leandro n’a pas autant d’impact pour m’apaiser.

Aiden éteint la lampe et nous nous retrouvons dans le noir. Je ferme les yeux après un moment à fixer un point, que bien évidemment je ne vois pas puisqu’il fait noir et je m’endors …