2109
Je suis né en 2109.
J’aurais tellement voulu naître un siècle plus tôt, lorsque l’humanité pouvait encore se complaire dans certaines illusions. Ces illusions, je ne les connais que par la froideur médicale avec laquelle mon époque les a disséquées. Il m’est impossible de me complaire dans ces rêveries du siècle passé, mais j’aurais tellement voulu y croire.
Ces rêves, ce sont ceux de milliards de personnes qui croyaient encore en l’existence d’un dieu, quel qu’il fût. Ces rêves, ce sont ceux, entremêlés, de ces gens qui croyaient encore que l’Homme avait quelque chose de spécial, que l’Humanité avec un grand H revêtait une importance cosmique. Le rêve ultime, auquel je n’ai jamais eu le droit d’adhérer, c’était celui d’une vie après la mort. Ou quelque chose comme ça.
L’idée que, peut-être, notre existence ici bas n’était pas aussi futile que vide de sens.
La vérité, c’est que tout ça n’était, justement, que des rêves. Des illusions orchestrées par notre cerveau, produit aveugle de l’évolution, qui n’a que faire de la vérité. Pendant un temps, je me suis battu pour rétablir cette possibilité, pour prouver qu’il y a une raison à tout ça. Pour prouver que, s’il y a quelque chose plutôt que le néant, ce n’est pas pour rien.
Mais non.
Il n’y a rien.
Rien d’autre que l’énergie et la matière dans cet univers gigantesque qui se fout de nous et qui s’achemine, inéluctablement, vers sa fin.
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