Scène bonus (-16)
Bonjour à tous-tes !
Pour la petite histoire, je viens de relire ce roman, un an après, afin de m'y replonger et de le découper en chapitres, puis de faire des retouches éditoriales. Et quand je suis arrivée à la fin, ça a donné ça :
Moi, scandalisée -- Quoi ?! C'est tout ? On souffre si longtemps pour eux, et à la fin ça se finit comme ça, sans même un petit bisou ou des petites retrouvailles ? MAIS QUI A ÉCRIT CE TORCHON D'ÉPILOGUE ?!
Spoiler : c'est moi.
À la base j'ai écrit l'épilogue comme une ébauche de happy end, mais je me suis rendue compte que ça ne se sentait pas forcément à la lecture.
Du coup, j'ai eu pitié d'Alban et Iluth et je leur ai écrit une scène supplémentaire, rien que pour eux (et pour nous aussi.) Parce que bon, faut bien qu'ils profitent un peu, quand même.
Avertissement : ne lisez pas ça si vous n'aimez pas le sentimentalisme et les scènes de sexe.
***
Sur le point de s’endormir, Alban sentit soudain un infime mouvement dans les ténèbres, juste derrière son dos.
Là où somnolait le chat blanc, blotti contre lui.
Quelque chose se produisit dans le silence le plus complet. Un poids beaucoup plus lourd creusa soudain le matelas ; une peau froide frôla ses pieds et une mèche de cheveux légère vint chatouiller sa nuque rase. Les draps se plissèrent sous lui, froissés par un corps qui n’était pas là une seconde auparavant.
L’homme se crispa imperceptiblement.
Elle avait fini par succomber.
Des mois qu’elle le suivait comme son ombre, discrète et fuyante, terrée dans les recoins comme un petit être fragile. Il connaissait par cœur toutes les enveloppes qu’elle empruntait ; il en rêvait la nuit. Une mésange, un chat, une chèvre opaline, un chien, parfois un lièvre lorsqu’il allait chasser en forêt.
Une fois, c’était une ourse blanche gigantesque qui l’avait sauvé, alors que d’une troupe de voleurs lui étaient tombés sur le râble.
Des mois qu’elle le suivait ; des mois qu’il la tolérait.
Il inspira doucement, tétanisé, emplissant ses narines de cette odeur qu’il avait presque oubliée.
Des mois qu’elle se cachait, honteuse et apeurée. Sauf la nuit, lorsque l’obscurité reprenait ses droits. Le chat blanc venait alors le rejoindre sur l’édredon, silencieusement, dans une telle délicatesse qu’Alban ne le percevait qu’à grand-peine.
Il entendait sa respiration ténue, sur le point de se rompre. Elle n’avait plus rien à voir avec celle d’un chat.
Un souffle plus appuyé lui effleura la nuque, et à cet instant, Alban sut qu’elle allait parler.
– Je t’aime.
Il ne bougea pas un muscle et le silence s’étira, infini.
– Je t’ai aimé très vite. Je me serais damnée pour toi…
Il sut qu’elle était en train de sourire, un sourire épuisé. Deux ans avaient passé, mais il la connaissait encore si bien ! Il voyait encore son visage, incrusté sous ses paupières quand il fermait les yeux.
– C’est ce que j’ai fait, d’ailleurs.
Un frisson délicieux parcourut tout le dos d’Alban à ces derniers mots. Sa voix… Ce timbre soulevait tant de souvenirs dans son esprit. En cet instant, il était faible comme une bougie sur le point de s’éteindre ; mais il l’avait connu railleur, furieux, passant d’une émotion à l’autre au gré des singeries de la licorne.
– Tu es une démone.
La voix d’Alban était si sourde qu’un instant, il ne la reconnut pas. Il ne pouvait toujours pas bouger. Incapable de se retourner vers elle.
– Oui, souffla-t-elle. Une démone. Un succube. Un méchant esprit qui t’a protégé, qui t’a soigné, qui t’a veillé pendant des jours et des semaines.
Elle frémit derrière lui, s’approcha de quelques centimètres. Il sentait son corps chaud dans son dos. Le désir le raidit tout entier ; un gémissement franchit ses lèvres lorsque le moindre détail de ce corps lui revint en mémoire. Ses côtes saillantes. Ses mollets musclés. Ses mains maigres. Sa taille étroite, ses seins légers. Ses joues rondes, si douces, et ses grands yeux soulignés de cernes. Ses sourcils épais, sans cesse en mouvement, qu’elle recoiffait à l’envi pour le faire rire. La douleur contracta tout son ventre. Ces simples souvenirs lui faisaient miroiter un bonheur sans pareil.
– J’ai renié les miens. Je les ai trahis et ils m’ont trahie en retour… Je n’ai jamais été si seule de ma vie.
Il l’entendit avaler sa salive. Elle était si proche qu’il sentait ses cheveux fins s’éparpiller contre son omoplate. Après tout ce temps, il se souvenait encore de leur teinte. Un brun terne, presque gris, qui ruisselait sur ses épaules jusqu’à ses clavicules délicates.
– Je t’ai haï à la seconde où je t’ai vu, murmura-t-elle tout près de sa nuque. Je te trouvais si laid !
Du bout du doigt, elle dessina une ligne imaginaire sur l’épaule de l’homme, traversant l’écheveau de cicatrices anciennes qui l’avait labourée, puis descendit sur son bras jusqu’à son coude mutilé. Il frissonna de tout son corps.
– Des mois après, je te haïssais plus encore. Parce que je me savais incapable de te tuer. Je savais que tu…
Un bruit très ténu se produisit entre eux deux ; Alban reconnut celui d’une larme qui venait de heurter le matelas.
– Je savais que tu me corrompais. À tes côtés, j’avais cessé d’être une démone. J’étais juste cette satanée licorne, piégée dans ses mensonges, qui aurait voulu être une femme.
Quelque chose de fragile se brisa en Alban ; doucement, il se tourna vers elle. La pénombre recouvrait tout, mais il distinguait son visage, si près du sien. Il respirait son souffle chaud, voyait miroiter ses prunelles. Une envie violente se cristallisa dans ses tripes à la vue de cette fille. Essuyer ses larmes, la serrer contre lui à lui en briser les côtes, l’embrasser. Comme cette unique fois, si longtemps auparavant, où un rêve leur avait offert une étreinte. Une unique étreinte où il avait pu sentir son corps contre le sien, ses lèvres sur les siennes.
Puis il l’avait piétinée. Brisée en mille morceaux.
– Plus que tout, je voulais être une femme, répéta la voix d’Iluth tout contre lui.
Ils levèrent les mains au même moment ; Alban attrapa les siennes alors qu’elle allait les poser sur ses joues.
– Mais tu n’en es pas une.
Elle accusa le coup. Il se gifla intérieurement d’avoir lâché ces quelques mots narquois, dépourvus de réflexion. Il ne savait que faire, ni comment réagir. La peur pulsait dans ses entrailles, bien réelle ; mais jamais il ne pourrait chasser cette créature de son lit.
Ni de sa vie.
– Je pensais que tu me l’avais déjà assez fait payer comme ça, murmura-t-elle. Je pensais que tu… Mais non. Je n’aurais pas dû.
Il emprisonna ses mains dans la sienne, les serra plus fort.
– Iluth, je…
– Tu as tué mon amie. Et tu m’as… Tu t’es bien assez vengé de moi.
L’image atroce de la jeune fille recroquevillée au pied d’un tronc, percluse de plaies sanguinolentes, refit surface devant les yeux d’Alban. Ce plaisir immonde, mêlé de cruauté et de terreur, qui l’avait envahi lorsqu’il l’avait violée. Il n’avait jamais pensé survivre à cet acte. La succube aurait dû lui dévorer l’âme à l’instant où il s’était raidi contre elle.
– Pourquoi ne m’as-tu pas tué ? murmura-t-il doucement.
Elle leva les yeux au plafond.
– Parce que je suis incapable de te faire du mal, sapajou. Je n’ai pas sauvé ta grande carcasse tant de fois pour te briser ensuite.
Sa voix était rauque ; l’insulte qu’elle utilisait tant jadis lui fit remonter des bribes de souvenirs heureux en mémoire. La licorne étalée sur le lit, à ses côtés sous le soleil levant ; la licorne droguée par les amanites, arpentant la chambre avec la grâce d’un bateau ivre. Il savait à quel point elle souffrait, il le lisait en elle ; et il savait aussi qu’elle faisait levier sur cette douleur, afin de pousser hors de sa gorge ces quelques mots railleurs. Il la connaissait si bien !
– Nom de Dieu, Iluth…
Elle libéra une de ses mains et la lui posa sur la joue, contre sa peau dévastée par le feu. Le cœur d’Alban bondit dans sa poitrine lorsqu’elle se rapprocha encore un peu. Si proche…
– Tu aurais dû le faire, Iluth. Tu aurais dû me tuer pour ce que je t’ai fait.
Il avait bien failli le faire lui-même. Il était sorti de la forêt, complètement sonné, l’esprit chauffé à blanc, puis s’était traîné dans le village le plus proche où il s’était saoulé jusqu’à ne plus rien voir. Il avait recommencé le jour d’après, encore et encore. Jusqu’à ce que les souvenirs s’éloignent un peu de lui. Jusqu’à ce que la sensation de la peau d’Iluth, pâle et chaude contre la sienne, quitte enfin son corps.
Et à présent, elle revenait, obsédante. Quelques centimètres de plus et leurs peaux entreraient en contact. Malgré ce qu’elle avait vécu, il sentait presque le désir qui émanait de la jeune fille, comme une vague brûlante ou une odeur imperceptible. Une aura tacite qui rencontrait la sienne, qui tendait tous ses muscles. Sur sa joue, les doigts d’Iluth glissèrent jusqu’à son menton, avant d’effleurer ses lèvres gercées par l’hiver. Alban eut l’impression que son cœur allait éclater. Il allait crever s’il ne pouvait pas toucher cette fille dans les prochaines secondes.
– Je t’ai cherché pendant deux ans. J’avais si peur de ne jamais te retrouver…
– J’avais dit que je te tuerai si je te revoyais.
– Il fallait que je prenne le risque.
Il flancha presque, dépassé par le désespoir et la témérité de la démone.
Lorsqu’elle se blottit enfin contre lui, ses pieds froids contre ses jambes et son souffle précipité dans son cou, il gémit malgré lui. Il referma les bras sur elle, la pressant davantage contre son torse, ses hanches collées contre les siennes. Un même soupir leur échappa lorsqu’ils s’imbriquèrent ainsi, comme dans ce rêve qui leur avait jadis marqué la mémoire au fer rouge, qui les avait hantés pendant deux ans. Deux longues années sans Iluth à ses côtés. Comment avait-il pu survivre si longtemps ?
Elle chercha ses lèvres et l’embrassa doucement, avec une certaine crainte ; il sut aussitôt qu’elle repensait à cet instant maudit où, fou de rage, il l’avait plaquée contre le tronc pour lui prendre de force ce qu’elle lui aurait offert.
– Ne crains rien, chuchota-t-il tout contre elle. Ne crains rien…
À court de mots, il fit glisser sa main le long de ses épaules osseuses, au contact si désagréable et pourtant si familier ; avec hésitation, il suivit la ligne dentelée de ses vertèbres, jusqu’à venir caresser ses reins. Elle se cambra contre lui ; dans une étincelle de plaisir, il oublia soudain tout ce qui n’était pas elle.
– Je n’ai pas peur de toi, rétorqua-t-elle en enfouissant son nez pointu dans son cou.
– Moi si, murmura-t-il d’un ton si bas qu’elle faillit ne pas l’entendre.
Trop fier et trop pudique pour poursuivre sa phrase, il la lui dit dans le silence de ses pensées.
Tu me terrifies, Iluth.
Elle le comprit aussi bien que s’il avait prononcé ces mots à voix haute. Ses mains quittèrent le visage du jeune homme, effleurèrent son torse creusé de cicatrices et de plaies mal recousues – il retint son souffle – puis remontèrent dans son cou avant d’aller se nouer sur sa nuque. Elle l’attira encore davantage contre lui, comme pour qu’ils se fondent l’un en l’autre, et referma ses jambes sur sa taille. Piégé contre son corps nu, Alban souffla avec peine, tentant d’évacuer un peu de ce désir qui l’embrasait tout entier. Ils s’embrassèrent à nouveau. Iluth se révélait aussi douce qu’experte, et lui eut soudain honte de sa propre maladresse et de son impatience. Une boule de peur enfla dans son ventre à l’idée que c’était une démone qu’il serrait ainsi contre lui, une succube qui avait vécu des centaines d’étreintes similaires, qui avait tué des centaines ou des milliers d’hommes pareils à lui. Cette pensée le tétanisa immédiatement. Iluth le sentit se raidir. Elle se décolla de lui et captura son visage entre ses mains.
– N’espère pas m’échapper si facilement, chiure de troll. (Un sourire fugace illumina ses traits, leur octroyant une beauté que seul Alban pouvait voir.) Il faudrait que je sois folle pour me débarrasser de toi. Une fois ne me suffira pas ! Il en faudra bien plus pour me rembourser toutes les douleurs que tu m’as infligées.
Elle resserra son étreinte et se mit à bouger doucement ; lorsque ses hanches ondulèrent contre Alban, celles de l’homme réagirent presque immédiatement. Elle gémit lorsque leurs bas-ventres se pressèrent l’un contre l’autre, provoquant une décharge de plaisir. Haletant, Alban lui caressa la clavicule, puis sa main brune et couturée descendit sur ses seins, avant de poursuivre son chemin plus bas. Encore plus bas. Il chassa l’élan de crainte pudibond qui venait le tourmenter. Il ne parvenait pas à croire ce qu’il était en train de faire, ni à quel point Iluth suscitait des pensées coupables en lui. Elle émit un son ténu lorsque les doigts rugueux du chasseur s’égarèrent entre ses cuisses. Fou d’envie, il la fit basculer sur le dos et l’écrasa de tout son poids.
– Baste ! s’exclama-t-elle en se tortillant comme un asticot. Tu pèses autant qu’un âne mort, j’avais presque oublié ce détail !
Plus elle souriait, plus elle se moquait, et plus il avait faim d’elle. C’était bien son Iluth. Elle n’avait pas changé.
Elle se suspendit à lui, nouant ses bras derrière sa tête ; fébrile, il se débattit avec le cordon de ses braies, maladroit avec sa main unique, les pensées rendues floues par le corps de la jeune fille offert sur le matelas.
Lorsqu’il ploya vers elle à nouveau et l’encadra de ses bras, frissonnant de plaisir anticipé, il vit les tremblements qui la parcouraient.
– Iluth ?
Il savait à quoi elle pensait ; et la démone savait qu’il savait.
Elle se cramponna à lui et ouvrit les jambes, accueillant son sexe tout contre le sien, faisant fi de ses grelottements de peur.
– Ce n’est rien. Viens.
– Tu…
– Viens.
Elle lui mordit les lèvres, fit glisser sa main le long de son ventre, jusqu’à atteindre son aine. Une très vieille peur, mêlée de honte et de répulsion, le tétanisa un instant.
Dans un grognement, il la repoussa tout au fond de lui et pénétra Iluth d’un coup de reins.
Elle s’arqua sous lui, planta ses ongles dans ses épaules charnues. L’espace d’un instant, l’homme vit ses prunelles se changer en lames de couteau étroites, et ses iris sombres prendre des reflets jaunes ; saisi, il dessaoula immédiatement, juste avant qu’elle ne se mette à onduler doucement. Des vagues de plaisir le traversèrent et il haleta, au supplice, écartelé entre son corps béat et son esprit terrifié.
– C’est moi, sapajou, murmura Iluth en plongeant le visage au creux de son cou. Ce n’est que moi.
Le corps en fusion, les poumons sur le point d’éclater, il accompagna ses mouvements légers, puis se mit à coulisser en elle dans des va-et-vient de plus en plus profonds. Il allait peut-être mourir cette nuit ; mais à cet instant, il n’en avait cure, seule comptait la jeune fille qui se cramponnait à lui. Elle respirait fort, exsudant le désir par tous les pores de sa peau. Il saisit son menton, l’embrassa violemment avant de la plaquer de plus belle sur le matelas. Le sommier grinçait dans le silence, au rythme de leurs ébats furieux. Iluth ne parvenait pas à s’arrêter de bouger, incapable pourtant de suivre le rythme d’Alban, comme si ses hanches ondulaient d’elles-mêmes. Lorsqu’elle se mit à gémir, renversant la tête en arrière, Alban en perdit ses esprits. Submergé par le besoin irrépressible de la faire geindre encore, il plongea vers son cou tendre, le mordit et le meurtrit de baisers ; elle se cambra toute entière, lui offrant ses seins menus. Il obéit à son ordre et se courba sur elle, suivit de la langue ces mamelons qu’il avait voulu goûter si souvent.
Elle couina de plaisir et le repoussa soudain ; surpris, il bascula sur le flanc, puis sur le dos lorsqu’elle le déséquilibra encore. Un grognement lui échappa lorsqu’il glissa hors de son corps chaud et que leurs peaux se séparèrent. Agile comme un chat, la jeune fille grimpa sur lui ; il gémit lorsqu’elle s’empala sur son sexe. Frémissante, elle le toisa. Les cheveux hirsutes, le souffle court et la peau humide, un sourire avide sur le visage, elle lui parut plus folle et plus séduisante que jamais.
Elle posa les paumes sur son torse, se pencha jusqu’à ce que les pointes de ses seins effleurent sa peau, et l’embrassa doucement. La main d’Alban se leva et, avant qu’il n’ait pu préméditer son geste, caressa tout son dos délié avant de saisir ses fesses. Iluth se mit à bouger sur lui, lentement, dans de longs mouvements sensuels. Il l’empoigna de plus belle, le souffle haché, accélérant son rythme. De plus en plus vite. Iluth geignait comme une chatte en chaleur, dans le sans-gêne le plus total ; et malgré le reste de dégoût qui collait à l’esprit d’Alban, face à ce qu’ils étaient en train de faire et la luxure qu’elle provoquait en lui, son excitation ne cessait de grandir.
Lorsqu’il ne put plus tenir, crispé dans l’envie désespérée de faire durer cet instant plus longtemps, il se contracta de tous ses muscles. Un grondement de plaisir lui échappa. Iluth, penchée sur lui, déposa un baiser dans son cou, puis à l’angle de sa mâchoire, suivant la ligne du duvet sombre qui repoussait vainement sur sa face brûlée.
Elle s’étendit sur lui, repue et voluptueuse, les yeux fixés sur les vitraux qui miroitaient faiblement sur le coffre. Sous elle, le torse d’Alban palpitait, la soulevant à chaque respiration. Les prunelles fendues en deux incisions étroites, les iris d’un jaune sulfureux qui tirait sur le vert, elle sourit à la licorne sans corne, dont Alban avait remplacé les yeux bleus par des pépites de ténèbres.
– Je suis encore en vie, murmura Alban sous la masse des cheveux qui l’étouffaient à moitié.
– Moi aussi, dis donc, fit-elle mine de s’étonner.
Il la poussa d’une bourrade et elle alla s’étaler sur le matelas, dans une nuée de jurons.
– Chiure ! J’aurais dû m’y attendre !
Elle sursauta lorsque les bras du chasseur se refermèrent sur elle, l’enfermant dans un cocon brûlant. Son cœur battait encore fort et vite, tout contre le sien.
– Pardonne-moi, coqueberte, dit-il tout doucement près de son oreille.
À ces mots qu’il n’avait jamais prononcés, pour personne, un frisson de pure émotion fit trembler Iluth. Il répéta en la serrant plus fort :
– Pardonne-moi pour tout.
Assis sur le coffre près des vitraux, le chat noir les regardait en se léchant la patte.
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