Miséricorde

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La neige.

Je détestais la neige.

Ce qui expliquait pourquoi je détestais aussi l'hiver. Le froid. Les journées courtes.

Nuit trop tôt. Sombre trop tôt.

C'est moins vrai aujourd'hui. À l'époque il m'arrivait de faire plaisir à des amis et de venir à leurs petites soirées. Je me disais toujours qu'il y avait moyen que je m'y amuse ou au moins que je m'y détende.

J'étais toujours déçu.

Alors je buvais. Oui, déjà.

Et quand je sentais que je pouvais filer en douce ou que j'étais assez bourré pour n'en avoir rien à foutre, je me barrais.

Voilà comment je m'étais retrouvé à marcher dans la neige, en pleine nuit, en espérant avoir assez de force pour monter les trois étages menant à mon appartement situé à l'autre bout de la ville.

Entreprise qui aurait très bien pu se passer si mon esprit n'avait pas eu un sursaut de lucidité quant à ce que j'avais entendu.

Parce que oui, aussi étonnant que ce fut, je venais d'entendre des sanglots. Non pas les braillements insupportables d'un marmot de trois mois mais plutôt une plainte. Douce. Calme. Vide.

Je venais rarement dans ces quartiers mais les pleurs, ce n'était jamais bon signe. Sortant mon arme de son holster, je m'engageai dans la ruelle d'où émanaient les sanglots.

Il ne me fallut pas longtemps pour en trouver la source. À genoux dans la neige, se trouvait ce qu'il semblait être une jeune femme.

Instinctivement, j'inspectai les toits à la recherche d'éventuels adversaires ou pièges.

Rien.

Il n'y avait qu'elle.

Elle était toute seule dans cette ruelle sombre.

Je m'approchai lentement et l'entendis marmonnait, en plus des pleurs. Rien de compréhensible.

Arrivé à son niveau, je constatai qu'elle grattait doucement le sol. Sans énergie. Elle ne me voyait pas.

Elle grattait. Elle pleurait. Elle marmonnait.

– Pas parti... Pas possible.

Je m'agenouillai et examinai ses doigts. Ils étaient en sang. Je commençais à comprendre.

Pour en avoir le cœur net, je grattai moi-même le sol et portai mes doigts à mon nez.

Poussière de Vampire.

Sans ménagement, j'attrapai le visage de cette femme et l'inclinai à la lumière de la Lune. Ses yeux étaient presque entièrement noirs.

Une Asservie.

Une personne possédant des liens puissants avec un Vampire. Cela pouvait prendre des années ou des décennies pour créer une telle relation.

Des liens difficile à tisser. Et impossible à détruire.

Je lâchai son visage et me relevai. Elle se remit à la contemplation du sol. Là où était mort l'être précieux à ses yeux.

Je savais ce que je devais faire. Ça ne m'enchantait pas. Ça ne me dégoûtait pas non plus.

Levant mon arme vers elle, je récitai une prière. Dans un éclair de lucidité, la femme me regarda.

– Rejoindre, souffla-t-elle.

Je distinguai une lueur d'espoir dans ses yeux sombres.

– Si seulement.

La détonation résonna dans la ruelle alors que le corps sans vie de la jeune femme s'effondrait sur le sol.

La neige vira au rouge.

Je détestais la neige.

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