Urumqui, quoi, où, comment ?

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 — C'est ce que je craignais, déclara Lucio en mettant pied à terre, ne décelant aucune activité humaine à des kilomètres. Plus rien ne tourne rond ici.

 — Où sont tes collègues ? lui demanda Mardo. Ils étaient pas censés être bloqués à Urumqui ?

 — Ils ont sûrement dû s'abriter dans un bâtiment. Allons voir ça.

 — C'est la Russie ça ? s'étonna la mangeuse de Chips paprika.

 — Ça y ressemble, crut Pablo. Il y a des montagnes enneigées là-bas.

 — Pour être déjà venu ici plusieurs fois, partagea un homme en costard, je ne reconnais pas l'endroit.

 — Je crois qu'il y a un petit problème auquel nous n'avions pas songé, regretta Magalie à voix basse en se tournant vers le flic et le truand. On fait quoi des passagers ? Ils pensent qu'on les a sauvé, on devrait leur expliquer.

 Marlowe acquiesça, puis commença son discours, parlant fort et distinctivement pour que tous l'entendent.

 — Bonjour à tous ! Comment dire... ? Nous avons dû faire escale à Urumqui en raison d'un soucis au niveau de la réserve de carburant, qui a été endommagée durant l'attaque.

 — C'est une honte ! s'exclama un homme âgé au teint rouge. Remboursés !

 — Hey mais, vous nous devez la vie ! Nous n'avons rien à voir avec la compagnie aérienne.

 — Je ne comprends pas, s'interloqua une hôtesse de l'air. Pourquoi une escale à Urumqui ? Notre destination était moins loin que ça.

 — Eh bien... La Terre est ronde, mademoiselle. Nous avons emprunté une voix aérienne plus directe.

 — Ah bon, réfléchit-t-elle, ne comprenant pas le sens de la remarque.

 — Non c'est faux ! s'offusqua Pablo ! Notre planète est plate ! C'est évident que les médias nous mentent, un peu de jugeote je vous prie ! Si la terre était ronde, ce qui me fait bien rire, alors comment pourrais-je cuisiner d'aussi plates omelettes ? Hein ? On se la raconte un peu moins, tout d'un coup !

 — Infernal, soupira Marlowe avant de reprendre plus fort. Peu importe ! Toujours est-il que nous sommes bloqués ici pour un bon bout de temps, et peu importe ce que vous pourrez dire, ça ne changera pas la situation ! Maintenant, dirigeons-nous vers ce bâtiment, en rang, et en silence !

 Marlowe fut agréablement surpris que sa requête soit acceptée. En comprenant que son existence était futile, il avait cessé de se soucier autant du regard des autres, libéré du dogme de l'échelle sociale, et avait ainsi développé une confiance et un charisme nonchalent qui le déroutaient lui-même.

 Les deux cents vingt trois passagers marchèrent en direction de l'entrée la plus proche. À l'intérieur, rien de plus que de l'air et du métal.

 — C'est quoi ce délire ? s'interrogea Marlowe. Lucio, je croyais que vos hommes étaient sur place, attendant le prochain vol.

 — Eh bien, aux dernière nouvelles, oui, mais comme je vous l'ai déjà dit, cela fait plusieurs jours que je reste sans réponse de leur part. 

 — Mais qu'est-ce qu'il se passe ici bordel ?

 — Nous sommes du côté chinois, intervint Hanz, les mains sur la tête, le fusil pointé dans son dos. L'armée tibétaine est considérablement plus faible. Normalement, cette zone devrait être plus que grouillante.

 — Le nazi, l'apostropha Lucio, on t'a pas causé que je sache.

 — Écoutez, je suis d'accord, j'ai mes penchants extrêmistes, accorda Lafritzkriel en se retournant, mais là ça nous dépasse tous ! Autant que l'on se sert les coudes, non ?

 — Te retournes pas, et tais-toi, j'ai dit ! Sinon tu goûteras au plomb.

 — Désolé mon vieux, fit Marlowe, mais on ne peut plus vous faire confiance maintenant.

 — Vous êtes bien allié à un des plus grands dealers ! répliqua le fasciste.

 — Certes, mais il ne nous a jamais trahi. (Marlowe se tourna ensuite vers les passagers, dont les bavardages inquiets emplissaient l'enceinte du bâtiment, et discourit, d'une voix assez forte pour forcer le silence :) Tout le monde, écoutez-moi bien ! Nous ne devons pas nous disperser, ni causer de chahut ! Restons disciplinés et tout ira pour le mieux. Ayez confiance, nous sommes de la police et avons l'affaire en main. Maintenant, je vais demander à tous ceux qui possèdent une connexion internet de chercher des informations concernant Urumqui et ses environs, afin que nous saisissions plus rapidement la situation. Venez nous voir, moi ou ma collègue, dès que vous trouvez des informations que vous jugez potentiellement utiles. Je vous remercie de votre attention.

 Le brouhaha reprit aussitôt ces paroles prononcées. La plupart des gens s'attelèrent à la tâche avec le plus grand dévouement, puisque leur futur dépendait de leurs trouvailles. Un homme d'affaire tenta plutôt d'appeler un Uber, mais aucun n'était dans les environs.

 — Magalie, rendez-moi un service, exigea le Lieutenant. Appelez Ernest et demandez-lui d'enquêter sur les conflits récents et de se renseigner sur quoi que ce soit qui pourrait permettre à notre enquête d'avancer. C'est un fayot de première, vantard, un peu coincé par dessus le marché, mais il fait le taf sérieusement, et ça, on peut pas lui reprocher.

 — Vous êtes si poli, fut éblouie la secrétaire, ne dissimulant ni son plaisir ni ses gencives. Vous vous êtes montré direct et n'avez pas utilisé de mot de politesse, mais j'ai senti un certain respect pour moi dans votre demande, et sachez que j'apprécie votre nouvelle façon de procéder, cela me touche...

 — Oh mais c'est pas vrai, elle arrête de jacasser la gonzesse et elle fait ce qu'on lui dit, oui ou merde ?

Pendant ce temps, en Belgique, à Quimper.

 — Eh dis, on s'prendrait pas une petite frite une fois ?

 — Allez !

Deux secondes plus tard, à Urumqui, Chine.

 — Qui est chaud pour une omelette froide ? proposa Pablo. Allez, faites pas vos timides, j'en ai à revendre !

 — Hey le cuisto, j'en veux bien ! accepta finalement l'homme à la peau rougie par une consommation très régulière d'alcool. Ce sera pas pire que les repas qui nous servent dans l'avion !

 — Oh, merci bien, vous serez le premier de la journée à goûter à la plateur la plus absolue. Cela fera 25 yens.

 — Comment ? Je croyais que c'était gratuit !

 — C'est une des rares sources de nourriture que nous possédons, et nous risquons de rester là un petit bout de temps, je compte bien en profiter un minimum.

 — Eh bah fous-les toi dans le cul tes crêpes bizarres, personne n'en veut !

 — Ce n'est pas une raison pour les insérer dans ma cavité anale, ni pour vous montrer vulgaire !

 L'hôtesse de l'air nommée Nathalie quitta le groupe bruyant pour rejoindre les détectives.

 — Bonjour monsieur l'agent, s'adressa-t-elle à Marlowe.

 — Hey, salut poupée. Des infos ?

 — Non, aucune. Si la Chine acceptait de partager dans les médias des nouvelles, ça se saurait.

 — En effet. Qu'avez-vous à me dire dans ce cas, sublime créature ?

 "Mais quel lourdaud" ne put s'empêcher de penser Magalie en se frottant le visage.

 — Il semblerait que cette zone ait été évacuée, répondit l'hôtesse. J'en ignore la raison, mais je crois que nous ne devrions pas nous attarder ici trop longtemps.

 — La nuit noire s'installera bientôt, et elle n'est pas clémente dans cette région, sans compter que la météo indique une tempête de neige à venir pour les prochaines heures. Nous devrions sans doute rester dormir ici, et dès que ça se calmera, nous partirons.

 — Où ça ?

 — Chercher un endroit sécurisé pour les civils, ainsi qu'un moyen de transport, en espérant entre temps en apprendre un peu plus.

 — Que doit-on faire en attendant ?

 — Pour les autres, je l'ignore, mais pour nous deux, j'ai ma petite idée...

 Marlowe amena Nathalie plus loin dans l'aéroport vide.

 — Hey, vous allez où ? les héla Lucio.

 — On va explorer les environs. Tu penses pouvoir gérer nos deux détenus tout seul ?

 — Tu m'as pris pour un novice, gringo ?

 — C'est toujours pas italien ça, tu sais ?

 — Je suis un italien pur souche, lâche moi la grappe, 'détective'.

 — Je compte sur toi pour surveiller les civils également.

 — J'ai pas d'ordre à recevoir d'un poulet...

 Marlowe et Nathalie atteignirent un endroit à l'abri des regards.

 — Vous êtes charmante, mademoiselle ?

 — Nathalie. Nathalie Nathalie. Mon nom est identique à mon prénom.

 — En temps normal, j'aurais insulté vos parents, mais vous me troublez bien trop. Je vous trouve ravissante !

 — Épargnez-moi ces longs discours et approchez un peu.

 Marlowe sentit soudain de la gêne monter en lui, ce que l'hôtesse remarqua.

 — Eh bien, qu'y a-t-il ? Je ne vous plait pas finalement ?

 — Ce n'est pas ça, c'est simplement que j'ai l'impression... Qu'on nous observe.

 Ses yeux accusateurs s'extirpèrent d'entre les lignes pour vous dévisager en face.

 Nathalie lui proposa alors de changer d'endroit.

 — Non non, ça ira, j'ai juste besoin d'un peu de temps.

 "Ce serait possible de changer de chapitre et d'arrêter de décrire toutes mes actions ? Bande de voyeurs..."

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