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Soudain, ce fut le drame. Les yeux dans le vague, Nicolas dit doucement :
— Je crois que je suis amoureux !
Je fus dégrisé instantanément. Le monde s’écroulait au tour de moi. Nicolas était amoureux : nous ne pourrions pas être amis. J’essayais de me raisonner. Après tout, il n’y avait rien entre nous. Pourquoi cette annonce m’avait-elle démoli ?
Je leur souhaitais bonne nuit et montais me coucher, les larmes au bord des yeux. Le hasch me faisait souvent cet effet. Il fallait que je fasse attention.
Je n’arrivais pas à m’endormir. J’avais une boule dans le ventre. J’avais dû trop manger ou trop boire. Nic arriva. Sans allumer, il se coula dans le lit. Je lui tournais le dos.
— Tob ?
Je n’avais pas envie de le sentir contre moi. Je fis semblant de dormir. Je sentis ses cheveux sur ma joue avant ses lèvres qui déposèrent une petite bise. L’incendie se déclencha instantanément. Je me retournais, attrapais sa tête et engloutis ses lèvres alors que les larmes m’inondaient les yeux. Il s’écarte.
— Tob, tu pleures ? Pourquoi ?
— Parce que tu es amoureux…
Les mots avaient franchi mes lèvres sans être passés par mon esprit. Je me rendis compte soudainement de ce que je venais de dire et ce que cela voulait dire. Je restai tétanisé par cette révélation : j’étais jaloux. Je voulais Nicolas pour moi, entièrement, car… je l’aimais !
— Tob, mon bel imbécile ! Oui, je suis amoureux. De toi ! Tobias, aujourd’hui, je me suis rendu compte que je te désirais, que je ne pouvais plus me passer de toi.
— Mais, Nic, je ne suis pas gay. Même si je t’adore et que je… t’aime, aussi !
Nos lèvres arrêtèrent de formuler des mots pour exprimer autrement leur désir. Nos mains accompagnaient cette émotion. Sentir son corps contre le mien, sentir ses mains, quelle plénitude !
Je sentais son sexe dressé contre mon ventre. C’était agréable. Quand il libéra le mien, j’étais heureux de ce partage.
J’avais cru perdre Nicolas. Plus jamais cette impression dévastatrice. Me fondre en lui pour nous souder. Tout, sauf le perdre. Je m’abandonnai complètement, je le laissai profiter de mon corps en lui apportant une jouissance et un plaisir d’une force inconnue, étonnante. C’est ça que je veux, c’est ça que je suis. C’est de Nicolas dont j’ai envie, de lui, entièrement, uniquement.
Cette nuit, nous aurons tout fait, l’un pour l’autre, l’un en l’autre. Il savait que cela arriverait, dès le début, car sinon, il n’aurait pas posé la boite de préservatifs et le flacon de gel à portée de main. Il est merveilleux !
Le lendemain, je descends à la cuisine. Nos deux compères sont attablés devant bols de chocolat et pâte à tartiner : des gamins, joyeux, heureux. Quand ils me voient arriver, ils comprennent immédiatement mon changement. Cela doit se lire sur ma figure.
— Je suis heureux pour toi ! Nicolas est un sacré mec ! En plus, il est super gentil !
Le dénommé arrive, un grand sourire. Il s’assoit près de moi, un immense sourire sur les lèvres. Puis il m’embrasse à pleine bouche. Un moment de gêne, avant que je m’offre à lui. Il se détache de moi, m’ébouriffe les cheveux.
— Les mecs, je vous présente Tobias : je crois que je suis amoureux fou de lui !
— Je crois que c’est réciproque !
Le reste de la semaine est merveilleux. Je plane dans l’extase. La présence de Nicolas me propulse dans un monde où je suis fort, vrai, libre, heureux. Je ne me suis jamais senti aussi plein d’énergie.
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