11 Août 1940
Après notre sortie à cheval et notre rapprochement intime, Thomas repassa à la ferme en début d'après-midi. Mes parents avaient remarqué son petit jeu d'hier mais n'avaient posé que des questions superficielles. De toute façon, je n'aurais pas su leur répondre s'ils avaient demandé des précisions sur la nature de notre relation. Ce baiser signifie-t-il maintenant qu'on est ensemble ? Que je lui dois fidélité ? Qu'on organise des fiançailles ? Je n'en sais rien moi-même. Un baiser signifie-t-il autant de choses plutôt d'une simple attirance ?
Thomas ne resta pas longtemps, juste le temps de me voler quelques baisers. Lui non plus n'avait pas dit à son père que nous nous voyons. Cela me va très bien, mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est parce que je suis une fille de fermiers... Peut-être veut-il simplement protéger le secret comme moi. Les baisers de Thomas, si chastes hier, se firent plus fiévreux aujourd'hui. Il se laissait guider par ses sentiments, que je sentais vifs, et moi, je suivais le mouvement, comme hier. Je n'étais pas plus expérimentée que la veille. Je sentais ses mains devenir téméraires et oser s'aventurer sur mon corps. Si innocentes sur mes hanches, elles devinrent pressantes en remontant le long de mon dos pour me coller à lui. Je pouvais sentir son émoi. Je fus surprise de constater que le mien n'était pas très présent. Je ne ressens pas la même chose que lui, au fond de moi. Néanmoins, je sentais mon corps réagir à certaines de ces caresses, mais je me demande si ce n'est pas une réaction physique...
Pris par son enivrement, je dus stopper Thomas qui se laissait enrôler par la passion qui l’animait. Il ne comprit pas très bien ma pause mais accepta sans broncher l'arrêt de nos touchers. Je me sentis coupable et lui avouais que je ne me sentais pas prête à aller plus loin pour l'instant. J'avais l'impression de me justifier devant lui. Pourtant, mes baisers n'indiquent pas « mets moi dans ton lit ! ». Leur faut-il un dictionnaire ? Nous discutâmes un peu à la suite, et il m'annonça qu'il partait à la grande ville pour quelques jours avec son père. Ce dernier devait lui présenter des connaissances politiques. Il allait faire son introduction dans ce monde. J'espère que ça lui plaira car il n'avait pas l'air très emballé à l'idée d'y faire carrière quand il m'en a parlé hier. Son absence va me soulager un peu, car je n'aurai pas trop aimé qu'il vienne chercher des baisers tous les jours à la ferme. Mes tâches en auraient pâtis.
Alors que je le raccompagnais à l'entrée de la ferme, il m'avoua que j'allais lui manquer. J'aurai menti si je lui avais répondu la même chose. Il m'embrassa à pleine bouche. Nos spectateurs allemands n'attendaient que ça et se firent une joie de nous siffler bruyamment. J'étais très gênée et rouge de honte. Ils se moquaient royalement de nous. Ils m'applaudirent en rigolant même alors que je retournais vers la maison. Martin m'affligea même d'un « so Süßes1 » dédaigneux lorsque je passais à son niveau.
« So Süßes », ça veut dire quoi ?
1Trop mignon
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