Jordan Twist (18)
Dimanche 28 février, 21h30.
J'ai déjà perdu mon pari alors qu'il est même pas encore parti pour sa semaine de congé, je songe en me regardant dans le miroir, un coton d'ouate dans le nez. Si je continue comme ça je vais perdre une dent. Ma lèvre est encore fendue ; elle a même pas eu le temps de guérir depuis la dernière fois. Au moins j'ai pas un nouveau coquard.
Je m'en suis pris une belle, pourtant. J'ai cru que mon nez était explosé, sur le coup. C'est con, je suis moins beau comme ça en plus. J'aurais préféré pas me les prendre, ces coups. Quel gros connard.
J'ai un peu d'appréhension ; pas envie de décevoir Narcis. S'il accepte encore de me parler après ce qui s'est passé hier... Je serre les poings en repensant qu'il est pas revenu et qu'il a pas laissé de mot depuis. Quand j'y repense, je me dis que j'ai vraiment fait de la merde. Mais j'en avais envie. Est-ce que je regrette ? Je sais pas. C'est pas comme si on avait fait des trucs sexuels non plus...
Quoique son gémissement était plutôt sexuel, autant que sensuel. Et il m'avait prévenu, il m'avait dit d'arrêter. Plusieurs fois. Et j'ai continué, de plus en plus.
Et puis, c'est pas comme si quelqu'un nous avait vu. Une rumeur avait commencé, l'autre jour -mais ça s'est vite tari. Un mec aurait vu Narcis et l'autre con de Julien collés dans les couloirs. C'était pas comme ça, nous ! Rien de grave, rien de sexuel !
Et je finis par me demander si ça l'est avec l'autre surveillant. Et ça me met en colère.
Mes poings se serrent et je regarde à travers le miroir une nouvelle fois. Il est bien plus beau que moi, sans toutes ces blessures sur son visage. Est-ce que c'est pour ça qu'il m'a repoussé comme ça ?
Des gros coups tapent contre ma porte de cellule.
- Allez, extinction maintenant, grogne le garde comme un ours, puis il s'en va.
Je souffle. Enfin en sécurité. Il reviendra pas. Je range ma chambre, prenant bien soin d'être ordonné. J'essaie de lisser mes vêtements sans succès. Il va être 22h tout bientôt.
Narcis devrait venir. Il va venir me voir, n'est-ce pas ? Pour le dernier soir. Il doit venir. Il a pas le choix. Faut qu'il vienne... Je lui ai préparé un dessin.
J'y jette un coup d'oeil, en évidence sur mon bureau, puis j'hésite à le mettre sous mon oreiller, en attendant. Je décide finalement de le laisser là et retrace les ombres, souligne les formes en attendant. Je reste comme ça plus d'une heure à perfectionner. Il est beaucoup mieux que les derniers. Je suis content du résultat. J'espère qu'il l'aimera aussi. Je me demande si ça fait trop.
- Twist ?
Je reconnais sa voix. Mon coeur s'emballe. Je me lève et ouvre mon côté.
Le sien s'est ouvert aussi, et le battant s'entrebaille rapidement, sans qu'il bouge. Je me recule aussitôt pour lui laisser l'espace. Même si j'ai juste envie de retrouver sa chaleur...
Un infime sourire s'affiche sur ses lèvres, bien moins grand et étincelant que d'habitude. Il entre sans refermer. Je m'assois au bout de mon lit, je baisse les yeux.
- Tu as besoin de quelque chose ?
- Oui. Discuter. On peut discuter ?
Je le vois marcher lentement, il va jusqu'à mon bureau. Là, il attrape la chaise et s'assoit dessus face à moi.
- Vous voulez pas fermer la porte ? je souffle.
Il secoue la tête.
- Pas la peine de la fermer.
- Pourquoi ? Vous avez peur de moi maintenant ? je serre les dents.
- Twist. J'ai dit que c'était pas la peine. Parle maintenant, il me réprimande.
- Je parlerai pas si n'importe qui peut m'entendre, je dis d'une voix froide. C'était le dernier jour avant la semaine prochaine !
Mes nerfs lâchent. Merde, j'ai dit que je m'énerverais pas... Ses yeux se plissent.
- Alors t'aurais peut-être dû penser aux conséquences de tes actes ! il siffle en se relevant, et en deux enjambées il a claqué la porte.
Je lâche un gémissement et me recroqueville sur moi-même au fond de mon lit. J'ai plus rien. Il est parti. Rejeté encore. Je savais que c'était une connerie d'espérer quelque chose. Un peu d'attention, d'amour, de tendresse. Ça fait encore plus mal quand on nous le reprend. Je serre mes mains autour de mes jambes. Si j'avais pas un dernier but dans la vie, je crois que je me serais juste laissé crever maintenant. Quelle merde. Je vivrai pas comme ça toute ma vie. Jamais. Une larme pointe au coin de mon oeil quand ma porte se rouvre et se clos à nouveau.
- Allez lève-toi, il soupire.
Je relève les yeux d'un coup et me mets debout, voûté. Il tend sa main sans lâcher son regard réprobateur, puis il me dit de parler, maintenant.
- Je t'ai fait un dessin, je souffle sans trop oser l'approcher.
Respire, te mets pas à pleurer comme une gamine Dan.
Pourtant, une larme que je sens à peine coule sur ma joue. Je le vois laisser retomber sa main tendue quand je me dirige vers mon bureau pour prendre mon esquisse.
Je lui tends et là, à ce moment précis, j'ai vraiment l'air d'un putain de gosse de huit ans. Pitoyable.
Il va s'asseoir sur mon lit pour le regarder. Je m'assois à côté, laissant une distance respectable, silencieux. J'essuie mes joues. Pathétique. Je vois son pouce retracer le contour des feuilles de l'arbre, puis il sourit un peu en détaillant son double, assis au pied du grand tronc.
- Il est pour moi, alors je peux le garder ? il demande sans en déscotcher les yeux.
- Ouais. Je voulais juste… Que t'aies un truc de moi. Ailleurs qu'ici…
- Ok. Je le mettrai chez moi.
Il tourne la tête et me sourit.
- Vrai ?
Je regarde dans ses yeux, j'ai un peu d'espoir. C'est la première fois que je fais un dessin si grand et détaillé, il prend deux pages.
- Ouais. Pas sur mon frigo, il est pas aimanté. Mais quelque part au-dessus de mon bureau.
Il pose soigneusement la grande feuille de l'autre côté de lui, sur mon draps.
- Je voulais t'offrir un cadre avec mais y en a pas ici... Avec le verre et tout…
- Je le ferai chez moi, t'inquiète pas.
- C'est vrai ? Tu vas le garder alors ?
Mon coeur se serre. Il aura quelque chose de moi chez lui.
- Ouais, bien sûr. C'est vachement bien dessiné.
- Ça te plaît ? J'aime que, ce soit dans une forêt parce que, quand je te regarde dans les yeux…
J'observe ses prunelles.
- T'es... J'ai l'impression de m'évader un peu dans une forêt avec toi. C'est ma bouffée d'oxygène.
Il me sourit et rigole un peu en hochant la tête. Aussitôt, je baisse de nouveau les yeux sur mes mains. Mon coeur s'emballe encore. Calme-toi Dan… Je l'entends rigoler et les doigts de sa main arrivent sur mon genou.
- Allez, tu arrêtes de m'embrasser, hein ? il dit avec une voix douce.
- Si c'est pas ce que tu veux…
Je me mords la lèvre. Je prendrai pas le risque de le perdre.
- C'est pas non plus ce que tu veux. Les câlins, ça c'est d'accord. J'accepte ça ok ? Mais pas comme hier.
- Ouais, je murmure. Qu'importe. Je peux alors ?
Mon coeur bat la chamade.
- Ouais. Mais tu m'écoutes. Quand je dis stop c'est stop, compris ?
- Oui. Tu choisis.
Il hoche la tête.
- Allez. Viens là.
Je me réfugie aussitôt contre son cou et je me rends compte à quel point ça m'a manqué. Je réprime un sanglot de soulagement en m'accrochant fort à lui.
Il se laisse lentement tomber sur le dos, je finis sur lui. Il y a un silence un moment, on réfléchit tous les deux. À ce qui s'est passé hier, tout à l'heure et à ce qui est en train de se passer.
- Tu te rends compte du bruit que tu m'as tiré, hier soir ? il finit par rire à mon oreille.
- Je suis désolé. C'était... J'aime bien ce bruit. Mais je le ferai plus, je réponds en m'enfouissant encore contre lui.
Ses mains se déplacent pour caresser mon dos, descendent à mes reins, et finissent à demi sur mes fesses, les paumes sur mes hanches.
- Alors. Raconte-moi ce visage, il dit en me câlinant.
- Quoi ? je couine.
Je meurs sous sa tendresse.
- Ton visage. T'es abimé. Raconte-moi.
- T'as remarqué… je soupire. C'est pas grand-chose.
- Qu'est-ce que je viens de te demander, Jordan ? il dit d'une voix un peu plus ferme ; et il refait le truc avec son doigt, sur mes reins.
Je me cambre aussitôt. Son toucher m'ensorcèle.
- C'est Boï, je grogne.
- Quand, comment, pourquoi, il a quoi, il énumère en soupirant, sûrement parce que je suis pas assez bavard.
- Aujourd'hui, avec ses poings, parce que c'est un connard, il a rien, je réponds de la même façon.
- Rien ? Du tout ?
Ses mains se resserrent sur ma taille.
- Rien.
- Pourquoi ça ? C'est lui qui est venu te frapper ?
- Ouais. Parce que je voulais pas risquer de partir en isolement alors que c'est le dernier jour.
Ses mains remontent à nouveau et il recommence à me caresser. Je soupire contre lui. J'ai vraiment envie d'embrasser sa peau. C'est de la torture.
- C'était un genre de revanche ? il chuchote, et son souffle tape sur mon oreille.
- Je, je sais pas. C'était juste, un prétexte pour, ouais, peut-être.
Il hoche la tête contre moi, puis il dit plus rien.
- T'es content de moi ? Que j'aie pas répondu.
- Oui. Très.
Ses mains vont chercher mes cuisses, il les attrape et les rapproche de lui. Ça fait remonter tout mon corps plus haut sur le sien, en se frottant continuellement.
- Je suis content que t'aies pas répondu pour se voir. Mais fais attention les prochaines fois, il dit, tout bas.
- Ou-ouais chef. Je ferai attention.
Je dois être rouge tomate. Je préfère encore me cacher contre sa peau. C'est sensuel. Hyper sensuel, la façon dont il me touche et... merde. Ça va me faire durcir si je continue d'y penser.
Une fois là, ses mains parcourent l'arrière de mes cuisses, de haut en bas, sans plus qu'il ne parle. Je me crispe un peu. Bande pas, bande pas bande pas...
- Eh, ça va pas ? il dit en me sentant tendu.
- Si. Si, ça va…
Je comprends pas ce qui m'arrive. J'ai jamais bandé pour un homme. Je suis dégoûté par les hommes. Le sexe entre hommes c'est atroce et douloureux.
- T'as pas l'air bien, il me sourit ; et du coup, il commence un massage sur mes jambes, du creux du genou jusqu'à la pointe des fesses.
- C'est, ça va. J'aime bien... ce que tu fais. Avec tes... Mains.
Il hoche la tête en souriant.
- C'est un massage des jambes. J'aime bien, moi, il m'explique en recommençant à caresser l'arrière de mes cuisses, avec plus de douceur, c'est à demi superficiel, à demi appuyé.
- C'est, tu veux que je te le fasse ? Je peux te faire un massage des jambes, ouais.
Je commence à m'écarter.
- Non, t'embête pas. Ça va, il me rassure, et ses mains se reposent sur mes reins.
Je serre les dents.
- Si, j'insiste, ça me fait plaisir…
- Si tu veux. Tu me veux comment ?
- Mets-toi, euh, sur le ventre.
Je me retire direct ; c'était moins une.
- Je te fais confiance, hein. Ça va sans dire, il fait rapidement en faisant un demi tour.
Il finit comme je lui ai demandé.
- Oui.
Je souffle, rassuré que mes pensées se calment enfin… avant de poser les yeux sur ses fesses. Merde. Je vais maudire ces pantalons d'uniforme qui moulent les cuisses -et ce qui est au dessus.
- Tu fais ? il s'impatiente en se tortillant, la tête entre ses bras.
- Ou-ouais.
Pourquoi il doit être aussi bien foutu ? Il pouvait pas être moche ?
Je pose mes mains sur ses mollets, hésitant. Je les laisse glisser jusqu'à ses genoux. Il lâche un soupir.
- Allez. Continue. Tu veux me faire languir ou quoi ? il rigole en bougeant ses pieds.
- Non, pardon, je continue.
Je remonte ses cuisses et comme je sais pas où m'arrêter mes mains continuent sur ses hanches et redescendent - j'essaie d'éviter un max ses fesses.
- C'est cool. Merci.
J'entends le sourire dans sa voix, et je me sens fier de lui faire plaisir.
- De rien, je chuchote, concentré sur ma tâche.
Je prends de l'assurance et le masse un peu plus fort. Il ronronnerait presque.
- Encore mieux, il commente.
- C'est vrai ? J'ai jamais fait ça.
Je ris un peu en redescendant sur ses genoux que je caresse tendrement. Il écarte ses jambes au passage.
- Mieux que le sexe.
Il reprend mes paroles de sa voix, un peu étouffée par sa position.
- Hum, ouais, sûrement.
Je rougis en me raclant la gorge, les yeux vrillés sur sa position monstrueusement lascive. Il remue après quelques secondes.
- Pourquoi tu t'arrêtes ? Tu veux plus ? C'est fini ? il demande en se relevant à quatre pattes.
- Oh mon dieu, je souffle en m'appuyant finalement contre le mur.
C'est trop.
Il se dandine et finit assis en tailleurs face à moi, les sourcils froncés.
- Y a un problème ?
Sa voix est redevenue celle du chef de cellule, quoiqu'il y ait un peu de vexation, aussi.
- Ouais. Ta position c'était trop excitant. Je suis désolé, je murmure, les yeux sur mes mains.
J'ai honte. Lui il se marre, ce con.
- Trop excitant ? il répète, avant de redevenir sérieux. Je t'excite ? Genre, sexuellement ?
- Apparemment.
Je croise les bras, sourcils froncés, et j'enfouis la tête entre eux. Définitivement trop la honte.
- Je devrais partir ?
- Non ! Je vais me calmer ! Juste, c'était, t'étais à quatre pattes…
- Et alors... ? il hésite.
- Rien. Rien c'est juste que c'est dur, mais ça va maintenant. C'est plus excitant alors je gère, je le rassure.
Son nez se fronce à son tour.
- C'est pour ça que tu m'embrassais hier ?
- Pour quoi ? je réponds, hésitant.
- Parce que tu as envie de moi et qu'il se passe un truc ?
- Quel truc ? j'ose pas le regarder, mais je continue. Je sais pas, c'était, j'avais l'impression que c'était la chose à faire hier, je finis dans un murmure.
Il y a un temps de silence.
- Tu voudrais qu'on couche ensemble ?
- Hein ? je relève les yeux sur lui. C'est une question piège, c'est ça ?
- Ouais.
- Alors je répondrai pas à ça.
Il hoche lentement la tête, le regard sur le matelas. Puis il se recouche dos sur le lit. Je vais m'allonger prudemment à côté de lui.
- Je connais les limites maintenant, je dis doucement. Alors, je les franchirai pas. Je veux pas perdre ça.
- Ok. On... se fait confiance, il chuchote en laissant sa main traîner sur mon ventre.
- Je... Ouais, je dis finalement.
Si c'était toi qui voulais plus, je te dirais pas non, je pense intérieurement.
- J'ai pas envie de te laisser là une semaine, il murmure après encore un moment, tourné sur le flanc face à moi en câlinant encore mon ventre, le petit doigt sous mon tee-shirt.
- C'est vrai ? Tu penseras à moi ?
Espèce de midinette. Je suis vraiment stupide.
- Je penserai à toi, il sourit en regardant tour à tour le petit bout de peau dénudé de mon ventre, puis mon cou. C'est moi qui ai envie de t'embrasser, maintenant, il rit avant de reposer sa tête sur le matelas.
Je me mords la lèvre, avalant difficilement. Je sens une chaleur dans mon ventre.
- Pourquoi tu le fais pas ? je demande, les yeux un peu brillants.
- Les limites, tu te souviens.
Il a fermé les yeux contre moi, il bouge plus, couché sur le flanc.
- Elles s'appliquent qu'à moi, je réponds en l'observant.
- Non non. À moi aussi.
- Pourquoi ? Tu me donnes des limites parce que je vais trop loin. T'iras pas trop loin pour moi.
- Bien sur que si. Tu sais pas ce que tu dis, il soupire bas en se recalant mieux sur mon lit.
- Je sais pas. On a tous les deux envie de s'embrasser, alors je comprends pas pourquoi on le fait pas. C'est pas comme si on couchait ensemble. C'est pas pire qu'un câlin ou un massage, non ?
- Si, c'est presque pire, il rit. Tu te rends pas compte de comment je me suis attaché à toi. Ça craint. On me met en garde, pourtant. Et maintenant je suis là, sur ton lit. (J'ai l'impression qu'il déballe tout, d'un coup). On est couché, on se câline, tu essayes de m'embrasser, on se dit qu'on en a envie, t'es excité... Et quoi ? Je suis gardien et tu es détenu. Tu es un assassin et je dois être distant. Tu vois bien qu'il y a un problème. Je peux pas te laisser m'embrasser sans, après, sans dommages.
- Les dommages sont déjà faits… je lui murmure en caressant son épaule du bout des doigts, sur le flanc aussi.
Il ferme les yeux face à moi.
- On s'est déjà attachés, je chuchote encore. Et tu sais que tu risques rien avec moi. T'as pas torturé d'enfant.
Il murmure qu'il sait, mais il bouge pas, il respire juste lentement.
- Narcis... Ça changerait rien. C'est déjà trop tard...
Mon policier secoue la tête.
- Non ? je mords ma lèvre.
- Qu'est-ce que tu veux, Jordan ? il soupire en rouvrant ses paupières.
- Je sais pas ce que je veux, je réponds d'une voix implorante.
Parce que c'est vrai, merde, qu'est-ce que je veux ?
- Voilà, il murmure. Il va falloir que j'y aille, bientôt. Julien me couvre ce soir, mais ça fait déjà un moment qu'on est tous les deux.
- Attends. Qu'est-ce... Qu'est-ce que tu veux, toi ? je demande en posant mes deux mains sur son torse, à moitié sur lui, pour éviter qu'il bouge.
- Dormir, il rigole faussement. Je sais pas. Je dois rien vouloir, Jordan. Tu me laisses me relever, mh ?
- Réponds-moi. Je te demande pas ce que tu dois… j'insiste en le lâchant, restant seulement à califourchon sur lui.
Il soupire.
- J'aime beaucoup être avec toi. C'est tout ce que je sais.
- Tu sauras jamais si t'aimes aussi m'embrasser, je souffle en me reposant sur le dos.
Après quelques secondes, pas long, mais déjà trop, il me rejoint. Il arrive assis sur mon bassin, mes poignets enserrés par ses mains et collés au matelas.
- Allez. Soyons un peu joyeux pour nous quitter, il m'encourage. Allez !
- Excitant, je souris légèrement.
Sa lèvre se pince entre ses dents. Je vois bien qu'il hésite, puis...
- Ouais ? il murmure en ondulant tout doucement, juste assez pour que je le sente, et je réagis aussitôt en gémissant un peu.
- Ou-ouais… je le supplie des yeux.
- Je suis en train de faire n'importe quoi… il murmure en se mouvant avec des mouvements plus amples, plus lascifs.
- J'aime beaucoup... Ce n'importe quoi, je réponds d'une voix rauque, bougeant sous lui moi aussi.
Il a fermé les yeux, alors je m'autorise à fermer les miens. Ses doigts pianotent sur mes poignets, mais il les lâche pas encore. Sa respiration tente de rester calme, puis il lance un plus gros coup de hanche.
Je gémis encore, soufflé, et j'en redemande. J'aurais cru que je détesterais ça à cause de ce que ça pourrait me rappeler, mais non, avec lui c'est tellement érotique... C'est bon et ça donne envie de plus, toujours plus.
Ses lèvres viennent se poser dans mon cou, il l'effleure enfin, puis il vient murmurer à mon oreille. Il susurre qu'il va arrêter bientôt, il me prévient, puis après quelques secondes il bouge plus et il se relève. Il m'avait prévenu. Ça m'empêche pas de serrer les dents, le coeur battant à tout rompre. Je sais même plus comment je m'appelle, comment un petit bisou de rien du tout sur mon cou a pu faire un truc pareil ? Je le regarde, complètement hébété. Il me sourit sincèrement.
- Allez. Je vais travailler. Tu passes une bonne semaine, ok ? Tu penses à Wilson, Casta et moi, il me dit en prenant son dessin.
- Oui. D'accord. Je te revois lundi prochain, je murmure en me levant.
- Lundi pour ton réveil, il confirme en se retournant vers la porte, puis il se retourne d'un coup. Est-ce que Casta a les mêmes problèmes que toi ?
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Les viols. Lui aussi ?
- Ouais. Comme une bonne partie des gars ici.
- Je veux dire, par le même ? il hésite. De la même manière ?
- Par le même ? Oui. De quelle manière tu parles ? Tu l'as déjà vu faire ? je me tends.
Il s'offusque tout de suite.
- Quoi ? Non ! Du tout ! Comment tu peux penser ça ?!
- Je sais pas, c'est fréquent qu'un agent voit ça tu sais, je réponds doucement.
Il soupire et reprend la poignée.
- Pas moi. Merci pour le dessin.
- Attends !
J'arrive vers lui et l'enlace.
- Excuse-moi. Je pensais pas que ce que je disais... que tu pourrais mal le prendre.
Il souffle à mon oreille et ses mains se posent aussi dans mon dos.
- Si j'avais été là, je l'aurais arrêté, il murmure avec ce qui m'a l'air d'être de la tristesse dans la voix.
- Tu devrais pas. T'es pas armé. C'est dangereux, je réponds avec un petit baiser sur sa clavicule.
Ses doigts se resserrent lentement sur ma peau.
- J'ai mes bras. Sous-estime pas mes bras. Je pourrais te sortir de là.
- J'aurais pas envie que tu prennes ce risque. C'est pas... J'y survis tu vois. S'il s'attaquait à toi ça serait différent. Ils ont des contacts ces types. Il pourrait te faire suivre, savoir où tu vis, te menacer, pour des trucs comme ça. Ça vaut pas le coup.
- C'est moi qui juge de ça. Je suis le gardien, il sourit. Allez, embrasse-moi une dernière fois et j'y vais.
Il tend son cou.
- Ouais, je murmure en passant les lèvres sur sa mâchoire.
Ses mains naviguent lentement sur mon dos, juste une petite caresse. Je me laisse faire, soupirant doucement, déjà terrifié à l'idée de me retrouver seul. Et je sens que ses mains me quittent alors je m'éloigne. J'affiche un sourire rassurant.
- Profite bien de ton congé.
- Merci. Je penserai à toi, il me sourit. Ça ira, hein. Je compte sur toi, il dit en abaissant la poignée de porte.
- J'ai hâte de te revoir, je souris encore.
Il hoche la tête, ébouriffe mes cheveux, puis la porte remplace son corps dans mon champ de vision. À dans une semaine, Narcis.
Annotations
Versions