Le pacte

3 minutes de lecture

Le bateau était toujours visible de la plage, Cédric n’ayant pas tenté d’enfreindre les consignes paternelles en s’éloignant, de peur de perdre le privilège accordé. Lorsqu’il était avec Adrien, il enclenchait le pilotage automatique ce qui leur permettait de s’allonger tranquillement sur le pont, une bière fraiche à leurs côtés. L’été touchait déjà à sa fin.

  • Ce bateau est un véritable piège à filles, Adrien. Je ne comprends pas pourquoi tu te limites à cette pâle Solène.

Les demoiselles étaient leur principal sujet de conversation, surtout pour Cédric qui était intarissable. Adrien était plus pudique et il le sermonnait parfois doucement.

  • Elle est gentille et nous partageons la même passion pour la musique. Si tu t’intéressais à autre chose qu’aux belles plantes, tu te rendrais compte que cette fille est une perle.

Les cours de musculation entamés par Cédric quelques mois plutôt lui avaient façonné un physique accrocheur et il ne s’était pas privé pour multiplier les conquêtes durant l'été. C’était encore un gamin qui comparait ces demoiselles à de jolies fleurs. Il aimait butiner de l’une à l’autre et, la goélette augmentait son pouvoir d’attraction même si sa réputation commençait à désirer. Il en avait emmené plus d’une au large et, le bercement de la mer lorsqu’il jetait l'ancre encourageait souvent les moments d’intimité.

Adrien avait un visage fin et une silhouette longiligne lui permettant plus facilement de fendre l’eau. Du moins, c’est ce que Cédric pensait pour justifier la victoire de son ami au dernier championnat de natation. Pourtant, quelle que soit sa tenue, ses vêtements lui donnaient une allure de musicien. Sa première passion, et son arme de séduction, c’était son violon. Cédric lui demandait souvent de l’emporter pour animer les soirées qu’il organisait sur la plage.

  • Franchement, tu pourrais trouver bien plus jolie qu’elle. N’as-tu pas remarqué comment Barbara t’a regardé pendant toute la veillée d'hier. Et maintenant que je commence à devenir un expert en matière de soutien-gorge : je parie pour un bonnet D, précisa Cédric avec délectation.

Il attendait une réaction, mais elle ne vint point. De plus en plus souvent depuis quelques mois, Adrien semblait perdu dans ses pensées. Le silence étant anxiogène pour certaines personnes, Cédric ne manquait jamais de combler le vide.

  • Si elle ne t’intéresse pas, je ne tarderai pas à plonger dans son décolleté, déclara-t-il avec un clin d’œil entendu.
  • Vas-y ! Elle te conviendra sans doute bien mieux qu’à moi.

Leurs goûts en matière de femmes semblaient être aux antipodes. Les spécimens ne prenant pas soin de leur apparence comme Solène n’avait aucune chance d’attirer l'attention du jeune paon. Pourtant, ressentant une nouvelle distance entre eux, il eut envie de lui arracher un serment.

  • Promets-moi, Adrien, qu’aucune fille ne pourra jamais briser notre amitié.

Adrien tendit le bras et lui serra l’épaule.

  • Ça ne risque pas d’arriver. En matière de séduction, tu es d’une rapidité surprenante. Je me serais à peine rendu compte de sa présence qu’elle aura déjà quitté ton lit, s’esclaffa-t-il.

Plus sérieux et mature, Adrien prétendait vouloir prendre le temps de connaître une femme avant d’aller plus loin avec elle. Et Cédric ne comprenait pas pourquoi cette enquiquineuse de Solène pouvait lui suffire. Elle avait un avantage en sa faveur, celui de ne pas accaparer son amoureux à longueur de journée, et il était disponible pour leurs nombreuses sorties entre amis. Solène participait rarement aux soirées organisées sur la plage bien qu’elle y fût invitée. Et pourtant, elle constituait un obstacle pour Cédric qui aurait préféré que son ami soit moins fidèle, libre de le suivre dans son exploration du mystère féminin. Alors, il la critiquait dès que l’occasion se présentait.

  • Derrière ces allures de petite fille sage, cela doit être une vraie tigresse pour te tenir de la sorte.

Le silence d’Adrien lui montra qu’il avait exagéré, encore une fois. Cédric connaissait ses valeurs, son besoin de se comporter en gentleman respectueux envers les femmes. Cela l’agaçait souvent qu’il ne veuille rien dévoiler de leur intimité de couple, lui qui aimait étaler ses prouesses, mais ne recevait pas de confidences en retour. Cédric avait envie de jouir au mieux de sa jeunesse, mais, au fond de lui, il savait qu’il essaierait de suivre son exemple plus tard.

Le ciel était d’un bleu translucide, la brise légère, et les deux amis profitaient de cette escapade en mer pour débattre de leurs prochains projets de vacances tout en entretenant leur bronzage. Adrien, déjà bien doré dès le début de l’été, oubliait souvent de mettre de la crème solaire. Cédric, lui, devait toujours commencer la belle saison avec de l’écran total s’il ne voulait pas devenir rouge comme un homard. Cet écart de hâle ne se voyait plus après quelques semaines, pour le plus grand bonheur de Cédric qui ne craignait plus alors la morsure d’un soleil présent huit mois par an.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire Chris Vlam ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0