Mutinerie
Le zodiac fendait l'eau, et seul le bruit des vagues sur la coque rompait le silence. À peine éloignés du ponton, Hortense, aux commandes, avait recherché le signal de la citée. La mélopée du peuple de la mer masquait le signal. Ils devaient être tous autour du dôme pour protéger les lieux du cyclone. Elle connaissait la direction, mais avait besoin du bruit de la citée pour localiser précisément les lieux. N'entendant toujours rien, elle coupa le moteur et elle se concentra un moment, en vain.
- La citée doit être pratiquement déserte en ce moment et le chant d’amplification du champ m’empêche de la percevoir. L’entends-tu aussi, Cédric ?
- Non, mais peut-être pourrais-je les entendre au contact de l’eau, comme tu me l’as montré la première fois que tu m’as amené ici.
Alicia observa Cédric plonger d’abord sa main puis se pencher et approcher sa tête de la surface. Son air impuissant lui fit immédiatement comprendre qu’il ne les percevait toujours pas.
- Je devrais sans doute rentrer dans l’eau, suggéra-t-il.
- Non ! Cela doit être moi. Je les perçois mieux et je nage beaucoup plus vite que toi. Philippe, prends les commandes.
Son ton tout à coup autoritaire ne reflétait pas son état d'esprit. Avant de s’immerger, Hortense chercha un peu d’encouragement dans les yeux d’Alicia. Elle seule comprenait réellement ses appréhensions. Le sourire bienveillant de la jeune fille lui donna le courage qui lui manquait encore pour plonger.
À peine au contact de l'eau, ne lui fallut que quelques secondes avant d’entendre sa mère. Une vague de culpabilité la submergea. Il aurait suffi d’un tout petit effort de sa part pour qu’elle puisse découvrir qu'elle était toujours vivante. Quel gâchis. Immédiatement, Eléonore lui insuffla une onde de réconfort puis, elle l’informa de la situation.
- Alors, tu entends quelque chose, s’impatienta Cédric.
- Oui. Ils sont à un mile à tribord. Mère doit remonter lentement. Même si les capacités respiratoires de Ludivine sont impressionnantes, elle doit suivre des paliers de décompression.
Philippe remit le moteur et vira. Le zodiac peinait à suivre Hortense. Elle était vraiment rapide, mais risquait de s’épuiser rapidement faute d’entraînement. Il ne fallut pas longtemps avant qu’elle ne s’arrête.
- Tu veux remonter dans le bateau et profiter de sa force motrice, plaisanta Cédric.
- Eléonore a changé de direction, elles remontent en s’approchant du rivage. Elle craint que Triton ne perçoive le départ de Ludivine. Il pourrait alors abandonner le dôme pour faire respecter ses ordres.
- Viens, monte ! On y va ensemble.
- Non, Cédric. Eléonore veut au contraire que toi et moi, nous les rejoignons. Elle a un plan pour essayer d’amadouer son père.
Cédric, frustré de ne pas entendre ces communications, sauta immédiatement dans l’eau. Alicia, prête à les suivre, prépara les bombonnes d’oxygène. Hortense l'arrêta.
- Pas toi, Alicia. Approche-toi le plus vite possible du rivage avec Philippe. Après, tu pourras plonger. Contrairement à Philippe, tu peux communiquer avec un habitant de la mer. C'est pour cela que tu nous accompagnes, non ?
Alicia déposa ses bouteilles d’oxygène et retourna s’asseoir à côté de Philippe. Ils s’éloignèrent ou moment où Hortense et Cédric plongèrent sous la surface. Le cœur joyeux à l’idée de revoir bientôt Dalgliel, la jeune fille ne remarqua pas les vagues gonfler de plus en plus.
…
À la frontière du dôme, Dalgliel était resté près de Triton. Il était son ambassadeur et il espérait être envoyé en éclaireur si le roi ressentait le départ de Ludivine. La présence d’Hortense avait été perceptible de par sa singularité dès qu’elle était entrée dans l’océan. Comme attendu, Triton l'avait envoyé identifier la cause de ce changement. Il avait informé Eléonore de la situation et elle avait décidé de changer de direction. Ils remontaient tous les deux avec Ludivine, en biais vers la côte. Ils avaient également perçu le signal de Cédric lorsqu’il avait rejoint sa tante dans l’eau. Cela les réjouissait et les inquiétait en même temps.
Les fonds marins étaient calmes et ils ne perçurent pas l’agitation en surface. Jusqu’à ce qu’ils atteignent le dernier pallier nécessaire à l’enfant.
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