30 - La grande prophétie
2e jour de la saison de la lune 2450
« N'ait aucune crainte, lui assurais sa partenaire de duel. Ce ne sont que des bouts de bois.
- Facile à dire pour toi, rétorqua Fayne en grimaçant. Tu as pratiquement été bénit pour manier ces trucs horribles. »
Elle n'avait jamais été compétente en combat. L'an précédente, elle aurait failli son cours si ses amis ne lui avaient pas venu en aide. Cette-fois, cet entraînement supplémentaire ne suffisait pas. Chaque dragonnier doit manier son arme de choix comme une extension de son corps, leur répétait Jendriken, le nouveau professeur de tactiques et combat. Nous sommes les Gardiens d'Aerinda et pas moins est attendu de nous. Vous êtes apprentis de troisième cycle. Vous n'êtes plus des enfants. Si la guerre vient, nous devons être prêt. Il était plus dur que son précédent, le vil Vyrius qui s'en tenait à martyriser ses préférés et à négliger les autres. Jendriken était originaire d'Elthen et avait été un chevalier aux services de Lôre, le Roi Brun, pendant plusieurs années. Il n'avait pas partagé comment il était devenu dragonnier, insistant que c'était sans importance. Il portait toujours une expression d'acier et ne paraissait pas particulièrement content de son nouveau poste.
Fayne était armée de son esprit académique, mais son corps ne répondait pas aux réflexes. Jendriken ne lui accordait aucun répit. Il mettait les plus faibles avec les plus habiles dans l'espoir de les préparer plus rapidement à l'éventuelle guerre dont plusieurs bouches jacassaient. Arièlla avait accepter de l'entraîner en échange d'une leçon en herboristerie. Cette-dernière vivait par les mots de sa mère : un commandant n'est pas que son talent en combat et en leadership, mais aussi, son savoir. Elle prenait son ascension au sérieux, apprenant les bases de tous les sujets.
Fayne devait se concentrer si elle ne désirait pas se retrouver parsemé de bleus. Elle maniait son bâton aux bouts équipés de lames et même si elle avait l'avantage du fer tranchant, un coup bien placé de l'étoile du matin d'Arièlla pourrait aisément sérieusement la blesser. Heureusement, les pointes avaient été sablés afin de ne pas percer la peau. De l'autre côté, la réplique était tout-de-même pesante, accentuant sa dangerosité.
Songeur, Buhrik était allongé paresseusement sur une colline à proximité, veillant sur sa partenaire en caressant sa barbiche d'un bleu laiteux. Il n'approuvait pas de ce ces actes qu'il caractérisait de barbaresques et superflu en ce qui concernait Fayne. Ces deux-là était du même avis, mais l'académie ne leur accordait pas d'exception.
Harath était parti à la chasse avec Tyrath à ses trousses, insistant pour l'accompagner. La dragonne avait protesté, mais c'était vite lassée de la querelle.
« Viens! beugla la blonde, sa voix aussi puissante que son bras. »
Si Arièlla n'avait pas eu la chance de devenir chevalière, elle l'était d'âme et de prouesse. Depuis une saison, ses pairs la surnommaient Ailes Cramoisis en cause des ailes draconiques qui reposaient sur les tempes de son heaume façonné à l'image d'Harath. Ceux-ci étaient renforcées d'écailles de la dragonne, leur accordant la couleur brillante du feu. Elle paraissait réellement autant intimidante que noble. De son visage, seuls ses yeux perçants paraissaient au travers de la visière.
« Tu prends chaque combat trop sérieusement, commenta une voix familière qui approchait de derrière.
- Chaque entraînement est une leçon à ne pas prendre à la légère, grogna Arièlla en maintenant sa position défensive, son étoile du matin brandit vers les cieux. »
Déstabilisée, Fayne tourna les talons et reconnu immédiatement la longue crinière argentée qui luisait sous les rayons des soleils jumeaux.
« Accorde-lui une pause, requêta Azéna. »
Fayne nota un tremblement dans la voix instable de l'archère qui n'était pourtant pas à bout de souffle. Serait une réaction issue d'émotions fortes? Ce n'était pas dans ses habitudes de laisser une telle faiblesse paraitre.
« Prête attention à ton adversaire! jappa Arièlla qui s'élança vers la brunette, son arme s'abattant sur sa cible. »
Fayne eut tout juste le temps d'esquiver l'attaque, perdit son équilibre dans un mouvement maladroit et se sentit tomber à la renverse.
Elle entendit le sifflement alarmé de Buhrik qui s'était relevé d'un bond ainsi qu'un gémissement plaintif lorsque sa chute cessa. Elle n'était pas blessée. En fait, son atterrissement avait été remarquablement doux.
« T'es lourde, se lamenta Azéna. »
Fayne se remit sur ses pieds aussi rapidement qu'elle fut tombée. Elle accorda un petit sourire embarrassé à sa sauveuse.
« Tu es faible, ricana Arièlla en s'adressant à l'archère. Mais on peut blâmer ton sang elfique. J'ai été fortuné sur ce côté. »
Sur le coup, la fille de la tempête se replia légèrement sur elle-même comme si elle était éprise d'une anxiété soudaine. Son regard paniqué darda d'une duelliste à l'autre.
« S'en ais assez pour aujourd'hui, Arièlla, commanda Buhrik en redressant la lèvre, révélant ses crocs ivoires. Ce n'était pas correct de ta part de charger comme ça alors que tu savais très bien que Fayne discutait avec Azéna. »
La blonde baissa honteusement les yeux.
« Ce n'était pas honorable de ma part, avoua-t-elle. Acceptez mes excuses. J'essayais tout simplement d'apprendre une leçon à Fayne. Elle manque de concentration durant ses duels.
- Parce qu'elle est terrifiée, souligna la dragonnière grise en se levant, se débarrassant de la neige sur son linge en se secouant. Je comprends ton intention et que toute ta vie tourne autour de ton ascension parmi les rangs des dragonniers, mais l'académie n'est pas la voix ultime. Ils ont tort de temps à autre. Chacun possède des expertises différentes. Fayne est une érudite ainsi qu'une herbaliste, pas une guerrière. »
Arièlla mit un moment à encaisser la logique de son interlocutrice comme si cette réalité était impossible. Enfin, ses traits d'adoucirent et elle acquiesça lentement.
« La petite rebelle voit au-delà, supporta le dragon aux écailles océan. Maintenant, que-ce qui t'agite, ma chère? termina-t-il en posant son regard turquoise vibrant sur elle. »
Il avait remarqué le comportement étrange de l'archère lui aussi ce qui n'étonnait pas sa dragonnière. Il avait toujours été attentif aux détails, particulièrement aux changements d'humeur.
« J'aimerai parler à Fayne si c'est possible, dit Azéna.
- Est-ce que tu désires que je parte? demanda la dragonnière rouge.
- Je... s'il-te-plait... errr Ari. Ce n'est pas un secret. Tu le découvriras bien assez vite. Pour le moment, je désire tout simplement consulter Fayne.
- Soit. »
Elle balança son arme en bois par-dessus son épaule et se mit à marcher tranquillement vers l'académie. Buhrik fit signe qu'il allait partir aussi et déploya ses grandes ailes translucides, son regard rempli de sagesse tourné vers le firmament.
« Reste, requêta l'archère, une certaine tristesse dans sa voix. Reste, Buhrik. Tu es sage au-delà de toute mesure et je sais que je peux te faire confiance. »
Le dragon courba le cou en signe d'acceptation, replia ses ailes et invita les deux adolescentes à venir s'asseoir sur sa longue queue serpentine. Fayne n'hésita pas, contrairement à Azéna qui demeura incertaine vis-à-vis de l'invitation. Ça allait en prendre plus pour qu'elle sente qu'elle n'allait pas offusquer le majestueux dragon.
« Tu m'honores, camarade de l'orage. Je t'offre mon meilleur conseil. Maintenant, viens t'installer et vide ton cœur chargé, encouragea Buhrik d'une voix douce. »
Enfin, la fille de la tempête s'installa sur la queue, quoique en retenant maladroitement une grimace qui trahissait son désir de se faire pardonner.
« Buhrik t'a accordé cette permission, la rassura Fayne. Relaxe, allez. Tu a les nerfs à vif aujourd'hui. Quelque chose s'est passé avec Naëshirie ou Argoshin? D'ailleurs, où est Nixie-Elle? Ne me dis pas que tu as encore chercher à t'enfuir d'elle. »
La crinière argentée dansa autour du visage anguleux de la demoiselle alors qu'elle secoua négativement la tête. Son corps criait à l'aide, ses muscles aussi tendus que lorsqu'elle avait dû combattre Serfantor durant sa première année à l'académie. C'était visible, même au travers de son épais manteau et de sa cape doublée de fourrure. Elle semblait avoir de la difficulté à trouver les mots, eux qui lui vomissaient de la bouche à la norme.
« Patience, petite, lui demanda Buhrik. Accorde-lui le temps dont elle requière. »
Fayne ferma les yeux momentanément, inspirant l'odeur réconfortante de fraîcheur et de pluie qui emmenait du dragon.
« J-je dois l'annoncer à Arièlla demain avec mes parents, souffla enfin l'archère, les yeux écarquillés.
- Pardon? dit le dragon en pencha la tête légèrement sur le côté, sa confusion évidente. Les Kindirah seront ici demain? Pourquoi donc?
- J'avoue que ça m'étonne aussi, agréa la brunette, particulièrement depuis que son amie fut désavouée de son père adoptif. Sans vouloir t'offenser Azéna, quelle raison aurait Bayrne pour chercher à te rencontrer? »
Elle fit une brève pause, réfléchissant à sa propre question qui ne collait pas avec la situation. Quelque chose n'allait pas dans sa supposition. Bayrne n'avait aucun lien avec Arièlla.
« À moins que... tes parents biologiques...? »
La rebelle hocha silencieusement la tête, ses émotions dévoilés au travers de ses traits durcies.
« Arièlla est ma sœur cadette, dévoila-t-elle.
- Donc... Eldarytzan et Nymia... Ça explique ton comportement bizarre avec Ari et pourquoi tu ne voulais pas d'elle dans cette discussion. Oh, Azéna... »
Les maintes soirées de leur enfance passées à se questionner sur les origines de la demie-elfe n'étaient soudainement plus un si grand mystère, mais cela soulevait tant de questions.
« Raconte-nous... les détails dont tu es confortable de partager bien sûr, souffla-t-elle en posant doucement une main sur la hanche de Buhrik. Nous t'offrirons notre meilleure guidance. »
Le sourire d'Azéna, malgré qu'il fût anxieux, lui fit chaud au cœur. Cette-dernière passa un long moment à remémorer sa matinée passée en présence du Grand Maître et de ses parents biologiques. Même Nixie-Elle qui avait pour mission de la protéger avec sa propre vie n'avait pas eut la permission d'y assister. C'était évidemment important pour les autorités de garder ces informations profondément enfouis et avec raison. N'importe quel filou pourrait exercer de grands dommages avec un tel savoir. Buhrik fut le seul à ne pas réagir au récit de l'aéromancienne attristée mis à part un subtil serrement de ses mâchoires qui aurait échappé à plusieurs yeux, mais pas à ceux de Fayne.
Enfin, Azéna avait partagé tous ses secrets et attendait comme une enfant vulnérable, le regard pleins d'espoir pour du réconfort.
« Tout va bien aller, rassura l'herboriste avec un sourire. C'est une situation délicate, mais nous allons la décortiquer ensembles.
- Avant cela, il manque des détails, nota Buhrik. Les dragons sont attirés à leur partenaire de vie, qu'importe le temps et la distance. Ils le ressentent dans leur trippes et une absence assez longue de cette personne rend même un dragon fou. Tyrath a toujours été insoumis, colérique et trouble-fête depuis sa naissance. Il ne comprenait pas ce sentiment jusqu'à un âge plus mature et ceux qui l'entouraient le croyait tout simplement ainsi de nature. Je crois que c'était plus qu'une simple chance à la personnalité. Il est, dans mon humble opinion, possible qu'il a toujours été lié à toi, jeune aéromancienne. Comment? Je ne pourrais l'expliquer. Mais j'ai été témoins de ce genre de tragédie. Mon frère de couvée a péri ainsi, réduit à la folie par son obsession de remplir ce vide en lui. Il avait un jour survolé un champ où deux armées humaines s'opposaient et il n'a jamais été capable d'identifier celui avec qui il s'était lié d'affection.
- Ça aurait été le destin de Tyrath s'il ne m'avait pas trouvé?
- Sûrement. Il est bénit d'un instinct prononcé, ce dragonneau. Une fois son instinct assez développé, il sût se guider à toi. C'est l'une des raisons pour lesquelles les dragons nés sauvage se tiennent loin des humanoïdes.
- Je ressentais ce vide en moi durant ma jeunesse, révéla l'archère. C'était inexplicable, mystérieux, mais heureusement pour moi, ce sentiment n'était normalement pas plus qu'une démangaïsons dans mon subconscient.
- Je ne comprends pas comment ce lien a été établis, ronchonna le dragon des tempêtes. C'est impossible à moins d'une certaine proximité physique. Rien n'est une coïncidence. M'enfin bref... »
Il chassa ses pensées d'un signe de patte et continua :
« C'est du passé et vous êtes unis. Il leur a prouvé qu'ils avaient tous tort à son sujet, qu'il n'était pas qu'un simple délinquant. »
Un soleil solitaire restait haut dans le ciel, ses rayons s'affaiblissant rapidement, incapable de résister à la colère de l'hiver rude. Des nuages grisonnants s'installaient et un vent frisquet annonçait la possibilité d'une tombée de neige.
« Je vous invite à mon nid pour continuer cette discussion, proposa Buhrik. Là, il n'y aura pas d'oreilles intrusives. Les dragons respectent l'intimité. Nous sommes naturellement solitaires et contrairement à nos dragonniers, nous ne sommes pas voués à vos figures d'autorité.
- C'est entièrement à ta discrétion Azéna, souligna Fayne, voyant que son amie semblait hésitante à la suggestion. Mes os ne pourront pas supporter le froid qui s'approche et Buhrik n'est pas exactement résistant à cela non plus. »
En fin de compte, l'archère acquiesça. En premier lieu, elle avait annoncé qu'elle marcherait à la série de cavernes où résidaient les dragons soi-disant domestiqués, mais décrit par les créatures ailées comme tout simplement tolérant à la présence humanoïde. Buhrik lui accorda une place sur son dos ce qu'elle apprécia en le remerciant une dizaine de fois, sachant que c'était un privilège spécial.
Ils passèrent à l'académie pour ramasser des torches, sachant qu'à l'intérieur du Nid des Dragons, il n'y aurait pas de luminosité. Les dragons pouvaient aisément voir au travers de la noirceur et n'avait nul besoin d'aide là-dessus.
Rapidement, ils atteignirent l'endroit désiré. Fayne était encore impressionnée par l'ampleur de ses grottes, certaines attachées, d'autres séparées, mais le tout formait un labyrinthe formidable. Le trio emprunta de multiples tunnels, croisant plusieurs dragons bleus, avant d'aboutir au nid de Buhrik. Celui-ci était composé d'une seule chambre, assez ample pour y accueillir deux dragons de taille maximale. Au centre, reposait une plateforme de roc sur laquelle une couche de foin y avait été installé. Ici, l'odeur corporelle de Buhrik dominait et chatouilla les narines de Fayne qui s'y sentit immédiatement amadouée.
Azéna s'attarda la plus longtemps à l'entrée, méfiante d'une éventuelle présence indésirable.
« Ne t'inquiète pas, ronronna Buhrik qui plongea son regard dans le sien, turquoise et azur se croisant longuement. »
Cela en fut assez pour la convaincre et elle vint s'asseoir sur la plateforme avec la permission de l'hôte.
« Juste à temps, dit Buhrik en jetant un coup d'œil à la voûte arrondis. »
Les adolescentes s'accordèrent un moment de confusion partagé. C'est un instant plus tard que les vents s'intensifièrent brusquement et ce qui semblait comme le début d'un blizzard se manifesta.
« J'espère que Tyrath et Harath reviendront bientôt. Tyrath a une meilleure tolérance au froid, mais Harath... elle est née du feu, dit le dragon des tempêtes en se caressant la barbiche.
- Ils sont des survivants, affirma Fayne sans hésitation. Je ne doute pas de leurs capacités. »
Elle se tourna vers la demie-elfe et sourit chaleureusement.
« Nous sommes ici pour toi, ma chère amie. D'ailleurs... Si toi et Tyrath étiez déjà liés à un âge infantile, ce serait probablement ta mère biologique qui en saurait plus. C'est elle qui ta portée, après tout. Tu devrais peut-être lui en parler.
- Bonne observation, complimenta Buhrik.
- Je vais essayer, dit Azéna en s'efforçant un petit sourire. Je suis fatiguée de tout ces secrets. C'est un fardeau et la vérité fait mal, mais elle me libère. »
La maintenant-Valkirel semblait effectivement alourdis par ses émotions turbulentes. On dirait qu'elle n'avait pas eut de repos depuis quelques jours : des poches noires se dessinaient sous ses yeux, ses orbites humides trahissaient le besoin de pleurer et ses mains tremblaient doucement. Elle était stressée et Fayne aurait tant aimer lui concocter son nouveau philtre de relaxation qu'elle avait dénommé « lait de lavande », un liquide crémeux et pourpre.
« Tu t'es toujours adapté fluidement à ce que la vie te tire dans les pieds.
- Qui veux dire? questionna l'archère, haussant un sourcil curieux.
- Tu ne seras rien de moins qu'une grande Valkirel et cette-fois, tu serais entourée de ta famille de sang. »
Elle savait que ce terme avait toujours été un sujet controversable pour son amie. Elle ne connaissait que le support de sa famille de choix et rien d'autres, mais elle s'était solidement soudée avec Arièlla durant les deux dernières années et peut-être que cette-fois, son désir de faire parti d'une famille de son propre sang allait devenir positive. Fayne l'espérait pour elle; elle qui adorait sa propre famille plus que tout au monde. Les Litfow étaient une bande de fous chaleureux qui appréciaient une bonne bière et de la compagnie énergisante. Elle avait été bénie pour cela. C'était au tour d'Azéna de trouver son bonheur familial.
« Donne-leur une chance. »
L'aéromancienne grimaça, semblant gênée avec l'idée. C'était sûrement encore un choque qu'elle dût encaisser.
« Merci de l'encouragement, murmura-t-elle doucement. »
En cet instant, Fayne pouvait visionner en son amie la frêle fillette dont elle avait eu l'honneur de sauver d'une brute lors de leur première rencontre, il y avait à peu près dix ans. Elle sourit et changea le sujet pour adoucir la tension :
« Cette prophétie... C'est Leith qui l'a reçu... Tu devrais la questionner aussi.
- Cette vieille femme continue à me surprendre, avoua Azéna avec un demi-sourire aux lèvres. Elle est si mystérieuse.
- Elle garde bien ses secrets, approuva l'herboriste. Mais je sens qu'elle cédera à ton enquête. Il n'y plus de raison pour le cacher maintenant que le cœur de l'histoire a été dévoilé. »
Buhrik poussa un grognement sourd qui roula mielleusement en arrière-plan comme s'il était incertain de cela. Il posa une patte avant par-dessus l'autre et observa ses deux visiteurs avec intérêt. Il n'était décidément pas prêt à intervenir dans leur interaction, gardant ses pensées pour lui.
« J'irai lui rendre visite, décida la demie-elfe, convaincue. De toute façon, ça fait un long moment que je ne l'ai pas vu. Je me sens un peu honteuse. J'ai l'esprit tellement préoccupée...
- C'est bien normal, lui dit la brunette. Je la vois une fois de temps en temps et elle est satisfaite de savoir que tu te portes bien, mais elle grogne que tu devrais t'avérer plus prudente. Je lui réponds tout simplement que c'est dans ta nature et que rien ne t'arrête. »
Elle était dans le même bateau que son amie. Non seulement devait elle retenir pleins d'informations pour ses classes, elle était hantée par sa performance physique moins que désirable, s'efforçait de planifier ses prochains plans en herbes pour aider ses prochains, incluant Umah et par-dessus tout, elle s'inquiétait pour Azéna. Elle répétait la prophétie divine reçu par l'ancienne dragonnière en boucle dans le silence et tentait de la comprendre. Certains détails étaient évidents. Les deux âmes qu'elle portaient étaient la sienne et celle du grand Turion. Elle s'était liée à des yeux améthyste : Tyrath et une légende améthyste : Turion, mais qu'est-ce que les multiples cœurs signifiaient? Était-ce possible de se lier à tant de dragons? Elle n'avait jamais entendu parler d'un tel miracle. Elle allait forger son chemin au travers de ses talents d'aéromancienne, d'archère et d'animancienne. Et que signifiait cette histoire d'elle qui allait guider Aerinda à son prochain âge? Ça me semblait grandiose, mais dans quel sens, elle ne sut le dire. Clairement, les divinités avaient des plans importants pour elle et cela n'était pas toujours bon. Aussi pieuse qu'elle fût, Fayne était consciente de la nuance variante de chaque visage divin. Comme les mortels qu'ils surplombaient, ils étaient imparfaits.
Tant de la prophétie avait déjà été fidèle à la réalité. C'était franchement inquiétant. Le reste lui était énigmatique et plus elle y songeait, plus elle sentait son appréhension amplifier.
Elle partagea de ses pensées avec Azéna et Buhrik et ils semblaient agréer sur toute la ligne. Même Buhrik qui faisait partie des créatures les plus rapprochées du statut divin avoua qu'il fallait parfois se méfier des veilleurs d'Aerinda.
« Ils nous ont façonnés à leur image, expliquait-il avec une touche d'amertume qui teintait sa sage voix. Un être imparfait, qu'importe son pouvoir, ne peux créer la perfection. »
Il fit une pause, grattant doucement son menton pointu en marmonnant dans sa barbe.
« Qu'est-ce qu'il y a Buhrik? questionna Fayne qui connaissait cette expression. À quoi as-tu penser?
- S'enflammer, mentionna le dragon en plissant les yeux. Cela signifie bien souvent qu'on éprouve des émotions fortes et aveuglantes. Cela se produit, spécialement chez vous humanoïdes, lorsque vous éprouver le besoin de procréer.
- Mais la prophétie réfère à des femmes, semble-t-il, souligna la brunette avec perplexité. Ça n'a aucun sens. »
Elle se tourna en direction de son amie et remarqua ses anormalement joues sombres ainsi que ses yeux baissés en direction du sol, indiquant clairement de la gêne. Logique ou pas, cette réaction confirma les sentiments de l'archère.
« Et qu'est-ce que je viens de mentionner? fit remarquer Buhrik.
- Que nous sommes des êtres imparfaits, souffla Fayne, abasourdie par la réalisation que sa meilleure amie aimait la gente féminine. »
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