Le Spationef Coincé (28)

4 minutes de lecture

Dans le fracas d’une explosion de pétards chinois en mitraillette, assortie d’un épais nuage rampant de fumée blanche, les lourdes portes matelassées de cuir volent en éclats. L’assemblée mondiale se tait, stupéfaite, abasourdie. Les grands hommes sont pétrifiés, partagés entre terreur soudaine et colère de constater que leur service d’ordre n’a pas pu retenir les fâcheux qui se présentent dans un capharnaüm indescriptible.
J’entends les cris de rage, de colère mais aussi de douleur d’une foule de gens que je pense armés jusqu’aux dents. D’ailleurs, parmi les bruits qui me parviennent, je crois même reconnaître quelques bruits métalliques, sourds et brefs, semblables à ceux d’une mitraillette.

Si la porte à explosé, si le joli nuage blanc continue de s’insinuer partout entre les sièges molletonnés des hommes politiques, si les bruits se rapprochent rapidement de nous…il faut bien admettre qu’il ne se passe rien d’autre pour le moment.

Alors, n’écoutant que leur couardise, quelques grands hommes se redressent prudemment, hissent leurs sourcils juste au-dessus de leur fauteuil puis, ne redoutant rien de l’adversité… hurlent frénétiquement aux types en uniformes sensés les protéger d’aller voir ce qu’il se passe à l’extérieur.

Ça, c’est du courage, non ?

De mon côté, je suis en pleine conversation avec Agent qui me donne toutes les informations dont il dispose, à toute vitesse. Je voudrais bien lui dire qu’il est un peu tard pour me prévenir mais, animé par une improbable compassion, je le laisse débiter ses nouvelles pas fraîches, me permettant de vérifier en direct la solidité de ses informations.

Pourtant, alors qu’il est sur le point de me révéler quelques points essentiels, je suis soudain contraint de ne plus l’écouter parce que, ce sont les aléas du direct en quelque sorte, j’entends les pas lourds d’une armée de djihadistes ou d’un autre genre de terroristes au seuil de la salle. Et les cris sont maintenant parfaitement compréhensibles…

Ça donne à peu près ça :

-    Et moi je te dis que c’est la porte en face, espèce de truffe ! rouspète une voix.

-    Tu es vraiment le dernier des stégosaures de la Ceinture d’Orion, par Hazar l’Inattendu ! rétorque une autre. Il faudrait déjà arrêter de tout faire péter ici, sinon le toit va finir par nous tomber sur le dos !

-    Et là ? Tu vois pas que ça concorde avec nos plans ! Avance encore de quelques mètres, pour voir…

-    Pour voir, t’es marrant, toi ! Je ne sais pas quel est l’abruti qui a exigé ce brouillard de guerre sans prévoir des ventilateurs pour le diriger là où on en avait besoin ! Je ne vois même pas mes pieds, te dire !

-    Arrête de râler pour ne rien dire, sombre patate sidérale, et avance !

Pendant ce temps, quelques gardes armés se précipitent vers l’entrée éventrée, arme au poing et bras tendus, comme dans toute bonne série à suspens qui se mérite. Bon, je reconnais vaguement quelques voix, je sais donc qui arrive nous faire un petit bonjour.
Aussi, quand Kenobi se présente enfin tout en haut des marches de l’amphithéâtre, je dois bien avouer que j’ai les paupières qui s’humectent un peu. Il est impressionnant dans sa tenue de superman de l’espace.

Imaginez un peu ; il porte un t-shirt plus ou moins blanc avec, noté sur sa poitrine chenue, « ça va, le fer ! » sur lequel il a passé une lourde cape noire en feutre, à moins qu’il s’agisse d’une couverture, comme celles qu’utilisent les déménageurs pour emballer les meubles qu’ils transportent. Il se présente à nous, bien campé sur ses maigres jambes, uniquement couvertes d’un grand short bleu clair, qui nous laisse découvrir le désastre de ses mollets, filiformes et couverts de poils raides comme des clous, et qui traversent d’ailleurs ses chaussettes blanches de tennisman aguerri, ses pieds étant, quant à eux, coincés dans de grosses chaussures de sécurité noires, aux  lacets dénoués comme la mode l’exige aujourd’hui.
Les mains sur les hanches, sa silhouette se découpe artistement à contre-jour, nimbée dans les volutes épaisses du nuage blanc qui le fait tousser comme un catarrheux. Derrière lui, la lumière du jour nous parvient un peu, laissant diffuser quelques rayons lumineux qui se dispersent dans le nuage quand quelques objets métalliques, des armes peut-être, reflètent celle-ci.

Voici donc Obi Wan, dans toute sa splendeur guerrière, vociférant je ne sais pas trop quoi, je l’avoue sans honte, tant le bruit qu’il fait nuit à la qualité sonore.

Les grands hommes de la Terre, quant à eux…

Triste spectacle que la vue de ces hauts dignitaires, à la vérité. Les voilà qui tentent, toute obédience politique bue, de se carapater en rampant sous les fauteuils vers les portes de sortie, faisant tout leur possible pour ne pas se faire remarquer. Encore une belle leçon de courage.
Je pense soudain à cet ancien dirigeant d’un tout petit pays par ses frontières, mais immense par son égocentrisme et sa vanité, la France, je crois, et d’un ancien grand général qui s’était essayé à en prendre les commandes. Celui-ci n’aurait pas raté l’occasion de montrer le bout de son nez, aussi énorme que celui d’un Cyrano de bonne famille, pour en profiter et faire un de ces discours dont il avait le secret, malgré les risques évidents.

Mais…Temps passés, que tout cela. Aujourd’hui, et depuis l’enlèvement d’un autre roi français, Jean le Bon, pour ne pas le nommer, les grands dirigeants du monde ont pris l’habitude d’envoyer d’autres qu’eux se faire trouer la paillasse. Aussi ne manquent-ils pas de chuchoter quelques instructions, leur spécialité, aux gardes qui, n’écoutant que leur courage, montent à l’assaut des intrus sans se poser de question, chose qu’ils seraient, de toute façon, incapables de faire.

Presque parvenus à hauteur de Kenobi, ils s’apprêtent dont à tirer sur un signal d’alarme, le seul que l’architecte de l’époque avait pensé à installer, et encore s’avère-t-il que ce n’est pas au meilleur endroit pour cela, quand Obi Wan se trouve soudain piétiné par la horde de ses sauvages qui pénètrent à grands flots dans la salle.

Et là…comment dire ?

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Frédéric Leblog ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0