Obi-Wan Kenobi. Je doute de mes sens…
Comment pourrait-il être ici ?
Le mieux est encore d’aller lui demander.

Je n’hésite pas une seconde, ce type est réputé bienveillant et tout ce que j’en connais me pousse à lui faire confiance sans me poser de question.
Et puis…il a une bière à la main.

Alors que je m’approche, il empoigne une chaise et me la présente en souriant. C’est fou ce que ce mec dégage de bonté. C’est presque un pote, déjà. Au moins une personne que j’ai envie de respecter.

-    Bonjour, mon ami, commence-t-il. Surpris, j’imagine ?

-    On le serait à moins, non ? En fait, je suis en train de me dire que je suis encore dans les vapes, ou que j’ai un sérieux pète au casque, genre coma assorti de délire infantile puissant…

-    Je vous rassure : vous êtes bien dans le Faucon Millénium, et…
-    Le Faucon Millénium ?? Non, vous êtes sérieux ?

J’ai crié plus que je n’ai parlé… ma surprise est telle que je manque tomber dans les pommes. De joie ! Quoi, je suis dans LE Faucon, celui qui a mis la pâtée aux vilains de l’Empire, ceux qui voulaient trucider la Princesse, imposer leurs lois à la noix sur un Univers tout entier ??

Nooon… je suis en plein rêve ! C’est juste pas possible. Je dirais même impossible !

-    Mais alors…Luke, Han Solo, Chewbacca, D2R2, Z6PO ?
-    Ils sont là…eux aussi… soupire Ben.
-    C’est fantastique !
-    Si vous le dites… rétorque-t-il
-    Bah, c’est plutôt bien, non ?
-    Plutôt…pas sûr, en fait. Mais vous aurez tout le temps de comprendre pourquoi, répond-il après un instant de silence.

Mince, à quoi dois-je encore m’attendre ? Ils auraient tous pété un câble, ici ?

-    Tout le temps, tout le temps, c’est vite dit, ça ! C’est que j’ai un boulot, là-haut, et un patron qui va encore m’agonir de reproches si je ne remonte pas très vite, vous savez ? Et d’ailleurs, pourquoi ne viendriez-vous pas avec moi ? Je connais le chemin pour retrouver le soleil !

Et voilà que je lui raconte ma vie, au moins les dernières heures, avec moult détails et commentaires précis. Tout y passe, depuis la première vitre brisée jusqu’à mes ultimes chutes. Tout ça pour m’apercevoir qu’il ne semble plus m’écouter...
Depuis combien de temps ? Je ne sais pas trop, mais je vois bien qu’il est figé. C’est bien le mot. Figé. Comme un bloc de béton. Sûrement à prise rapide parce qu’il ne me semble pas avoir disserté pendant des heures, non plus. Le vieil homme est bloqué dans la dernière posture qu’il avait avant que je ne regarde ailleurs. Bras levé, bouche entre-ouverte, il allait se verser une rasade de bière quand quelque chose l’a saisi pour le rendre à l’état de pierre.
Enfin, en pierre, je ne sais pas trop non plus mais il est indéniable qu’il reste de marbre…
Je le regarde sans trop comprendre ce qui arrive. Et puis ça commence à m’irriter profondément. J’allais me lever pour aller faire un tour quand j’entends soudain un bruit que je ne connais que trop. Long, puissant, profond… comme une pompe qui puiserait de l'air dans un tonneau vide. Et puis des bruits de pas, métalliques, lourds et lents.
Misère de misère…
Je me cache dans le premier recoin que je trouve et, à peine calé dans la pénombre, je vois passer devant mes yeux terrorisés la haute silhouette de Dark Vador.

En plus, avec son casque noir, tout brillant, il paraît encore plus grand. Je me dis immédiatement que le côté obscur de la Force va détecter ma présence, aussi sûr que deux et deux font quatre et que Vador va s’emparer de moi pour me faire toutes les misères du monde. Alors, comme dans les films, je ferme les yeux et je tente de faire le vide dans mon esprit, pour qu’aucune onde n’en émane, pour qu’il passe devant moi sans me voir, sans suspecter ma présence. Que dirait-il s’il me trouvait là, planqué dans ce petit coin, dans leur vaisseau ?

-    Ben, je dirais que tu t'es perdu, pourquoi ? fait soudain sa grosse voix.

Rhââ… il m’a découvert, je suis perdu ! 

-    C’est bien ce que je viens de te dire, mon gars… reprend le colosse obscur.

J’ai les jambes qui flageolent, les dents qui glaglatent, les mains qui tremblent et les tempes en feu. Encore un mot et je tombe dans les pommes…

-    Alors, je garderai le silence pour ne pas te forcer à te couvrir de ridicule… murmure Dark Vador. Tu sais, je ne suis pas celui que tu connais. Je veux dire que les films que tu as vus sont loin de la réalité…
-    Monseigneur… que je commence à bégayer, sur le ton le plus flagorneur que j’ai en stock, je vous en prie, ne me faites pas de mal, j’ai déjà eu une journée assez rude comme ça. Je ferais ce que vous me demanderez sans discuter. Tenez, je ne dirais à personne que je vous ai rencontré, je ne vous demanderais même pas un autographe ! Pourtant, je pourrais carrément faire fortune avec votre signature, vous savez ?
-    Arrête avec tes singeries, pauvre minable ! Tu risquerais de m’essouffler plus que les autres… Viens plutôt avec moi dans le poste de commandement. J’ai besoin d’un regard neuf…

Je ne me fais pas prier, bien entendu. Si ce mec me demande de lui décrocher la lune, je ferais le max pour ne pas prendre le risque de le contrarier. Je ne connais que trop son caractère de cochon et…

-    Bon, alors là…tu vas arrêter de penser des trucs comme ça, sinon je risque de le mal le prendre, tu comprends, fait-il soudain en se plaçant pile devant moi, les mains sur les hanches en signe de mécontentement. Je te rappelle que je lis dans tes pensées, alors arrête de dire n’importe quoi !

Il me regarde au travers de son casque. Avec insistance, je pense. Moi, je regarde par terre avec dévotion, n’osant pas affronter le maître de l’Empire.

-    Suis-moi.

Je.