25 - Prévert
Claire a ainsi organisé sa vie.
Un mari et deux amants réguliers.
Elle n'a pas trouvé la réponse aux interrogations qui l'assaillaient.
Ce n'est pas seulement l'adultère qui la questionnait.
J'éprouvais du plaisir à être baisée. Par toi Pierre bien sur. Mais aussi par Olivier, par Gérard et même par un inconnu...
Ou cela allait-t-il s'arrêter ?
Qu'allais-je trouver au bout de ce chemin ?
Comment se détourner de la voie qu'elle prenait avec délectation ? Et est-ce qu'elle voulait réellement s'en détourner ?
Adultère qui avec Gérard prenait des formes épicées et qui semblait être un gouffre auquel elle ne pouvait échapper.
En ce début de soirée, après la chaude après-midi passée avec Gérard elle est allée attendre Pierre à La gare. Dans sa tête, son corps, bien des émotions l'assaillaient.
Dans le hall , un homme qui semblait attendre lui aussi un voyageur, l'observait.
Elle ne voyait pas d’où elle pouvait le connaître.
Ou simplement la trouvait-il à son goût ?
C'est toujours une sensation agréable que d'être appréciée.
Comme Gérard, qui aimait la regarder nue. Et devant lui, Claire n'en avait ressenti aucune gêne.
Gérard qui voulait la garder toute une nuit pour lui. Il lui a réitéré la demande avant qu'elle ne le quitte.
Elle pensait bien que ce ne serait pas que pour dormir...
Elle allait réfléchir. C'est ce qu'elle lui a répondu. Mais dans son esprit, l'idée creusait son sillon.
Le regard de l'homme était insistant.
Il avait peut être remarqué qu'elle ne portait pas de soutien-gorge.
S'il avait vu sous sa jupe, il aurait eu une autre surprise.
Elle a voulu faire ce cadeau à Pierre.
Nue sous la robe, pour lui. Saura-t-il apprécier ?
L'inconnu la trouvait sans doute baisable, comme disent les hommes.
Mettable.
Il était jeune et assez bel homme. Vingt ou vingt cinq ans, a-t-elle pensé.
Style décontracté. Jean, polo, cheveux plutôt longs.
Un bon baiseur peut-être.
Claire était émoustillée, avec la démangaison d'aller plus loin.
Il lui a souri.
Une forte pulsion l'a poussée à y répondre.
Mais les passagers ont commencé à arriver. Certains étaient attendus d'autres pas.
Échange de poignées de mains, bises ou baisers. Il y a tous les types de retrouvailles.
Le jeune inconnu attendait sa copine. Elle s'est accrochée à son cou et il l'a serrée dans ses bras.
Ils ont échangé un long baiser sans se soucier des regards.
Elle s'est surprise à les envier.
L'homme lui a adressé un dernier regard avant de partir.
Un clin d’œil.
Il embrassait sa copine et aguichait en même temps une autre femme !
Le respect n'était pas au rendez-vous.
Il a été à moitié pardonné, Claire était la bénéficiaire et elle était d'humeur frivole.
Un dernier sourire.
Occasion manquée. Elle a exhalé un soupir.
Elle a aperçu Pierre.
Une main dans la poche, tirant sa valise de l'autre. Cravate défaite au cou.
Le costume n'a jamais été son vêtement préféré. Loin de là. Il ne le portait que pour répondre aux conventions liées à son activité professionnelle.
Fidèle à lui même, il avait la tête dans les nuages et ne devait pas remarquer les gens autour de lui. Comme souvent son esprit était ailleurs.
Dans ces cas là, quand Claire lui posait la question il affirmait ne pensait à rien .
Elle ne le croyait pas évidemment.
Mais son esprit vagabondait vers des endroits dont elle n'avait pas la clé.
Elle espérait seulement y avoir sa place.
Il serait plus attentif s'il y avait un cul à regarder. C'était son truc. Avec les poitrines.
Il lui arrivait de mater des femmes même en compagnie de Claire et ça la faisait sourire.
Comme avec Julie, la femme d'Olivier.
Mais il s'en était toujours tenu au regard.
Il touchait avec les yeux.
Regarder le menu sans consommer.
Il a vu Claire.
Une sourire a éclairé son visage.
Arrivé à sa hauteur. Il l'a embrassée sur les lèvres. gentiment.
Il était content de la retrouver.
Leur baiser a duré au plus … deux secondes.
Si tu avais été un amant, 5 minutes auraient été à peine suffisantes.
Est-ce cette fougue que je recherchais avec Olivier ou Gérard... ou un autre ?
Ils ont pris la direction du parking.
Un amant m'aurait pris par la main ou mieux, enlacé la taille pour me serrer contre lui.
« Tu as fait bon voyage ? »
« Fatigant »
Échange des banalités de circonstance.
« Et de bons contrats ? »
« Une signature et des projets à affiner, mais en bonne voie »
« Et toi ma chérie ? Je t'ai manqué ? »
Ce disant, il lui a tripoté les fesses. Geste très masculin !
Comme si le manque se limitait au cul. Un mec dans toute sa splendeur !
Claire faisait un inventaire de frustations supposées pour donner des justifications à son comportement.
« Oui. Je suis contente que tu sois de retour »
Et il n'y avait pas de mensonge de sa part.
« Tu n'as pas du mettre beaucoup de temps pour t'habiller »
La main sur ses fesses faisait l'état des lieux.
« A part ça, tu me trouves désirable ? »
Il s'est arrêté et lâchant la valise, il l'a prise dans ses bras pour l'embrasser plus tendrement.
Enfin !
Je suis comme je suis
Je suis faite comme ça
Quand j’ai envie de rire
Oui je ris aux éclats
J’aime celui qui m'aime
Est-ce ma faute à moi
Si ce n’est pas le même
Que j’aime chaque fois
Je suis comme je suis
Je suis faite comme ça
Que voulez-vous de plus
Que voulez-vous de moi
Claire a repensé à ces vers de Prévert.
Un prof de français de première avait fait travailler la classe dessus.
Ce poème lui est revenu en mémoire.
Je suis comme je suis.
Comme si elle voulait se convaincre qu'il n'y avait rien de répréhensible dans ses agissements. Rien de moralement indéfendable.
Elle est comme elle est. Et il faut l'accepter ainsi.
Elle avait imaginé que Pierre allait la prendre sans ménagement dans le parking de la gare. Que le désir d'elle allait les emporter dans une sarabande sexuelle.
Elle avait mis les atouts et les atours qu'il fallait.
Comme pour la purifier.
Il n'en a pas été ainsi.
Elle en a été déçue.
Elle lui en a voulu sur le moment.
Pierre a attendu qu'ils soient couchés.
Banalement.
Il a alors été tendre comme il sait l'être.
Patient.
Elle a été couverte de caresses, de baisers.
Elle lui a abandonné son corps.
Aucun espace n'a été épargné par ses doigts, ses lèvres, sa langue.
Et quand il s'est allongé sur elle, ses cuisses se sont ouvertes pour l'accueillir.
Et lentement ils ont fait l 'amour.
Elle a pris du plaisir à cette attention, cette délicatesse.
Mais...
Puis il l'a mise sur le ventre et lui a ouvert les fesses et s'est perdu dans ses reins pour une jouissance partagée.
Je suis faite pour plaire
Et n’y puis rien changer
Mes talons sont trop hauts
Ma taille trop cambrée
Mes seins beaucoup trop durs
Et mes yeux trop cernés
Et puis après
Qu’est-ce que ça peut vous faire
Je suis comme je suis
Je plais à qui je plais
Qu’est-ce que ça peut vous faire
Cette même nuit, au petit matin, avant de se lever, Pierre a repris ses douces caresses.
le corps de Claire était encore sensible, réceptif.
Elle avait encore besoin de sa bouée.
Elle l'a attiré sur elle, à nouveau entre ses cuisses il a été aspiré.
Dans la léthargie du réveil, ça a été un moment de grand réconfort, de paix, de bien-être.
Pierre je t'aime.
M'aimerais-tu toujours comme je suis ?
Je suis et tu m'aimeras.
Ce qui m’est arrivé
Oui j’ai aimé quelqu’un
Oui quelqu’un m’a aimé
Comme les enfants qui s’aiment
Simplement savent aimer
Aimer aimer...
Pourquoi me questionner
Je suis là pour vous plaire
Et n’y puis rien changer
Car tu ne le sauras jamais.
Impossible de dire à Pierre qu'elle le trompait avec son collaborateur le plus proche.
Ce serait un désastre autant personnel que professionnel.
Avec un ami. Une trahison impardonnable.
Avec un inconnu. Déplorable retour du passé.
Il faudrait alors qu'elle mette un point final. Mais l'adrénaline était une drogue puissante.
Quelques jours après, Gérard a proposé à Pierre un pique nique au bord d'une rivière. Un coin de pêche de ses parents, à une heure de route.
Ce sera l'occasion de lui faire essayer sa nouvelle voiture lui a -t-il dit.
Je ne suis pas dupe.
Inutile de dire à Pierre que j'avais déjà essayé cette voiture.
Il devait passer nous prendre avec Virginie.
J'avais enfilé un jean pour éviter, si cela était possible, les tentations trop fortes.
Mais Pierre m'a fait changer de tenue.
« En jean ! La météo annonce une forte chaleur. Mets toi donc à l'aise »
Forte chaleur... oui, j'en ai peur.
Va pour une jupe et un chemisier. Mais avec sous-vêtements.
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