Le vent de l'Est

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Par la volonté des dieux, et grâce aux connaissances de ceux qu’on appelle les shamans, l’humanité connut un nouvel Age d’or. Pour la première fois depuis la disparition du royaume des alchimistes, un empire est parvenu à unifier la race des hommes. Et cette fois ils avaient une arme pour défendre leur héritage : l’Ether.

Durant des décennies des armées de chamans assistés de vertueux chevaliers se sont sacrifié pour repousser les impurs, jusqu’à ce qu’un jour tous disparaissent sans laisser de trace.

Les colombes transportèrent la nouvelle pendant des semaines, et devinrent le moyen de communication officiel du royaume en récompense de leurs bons services.

La paix. Enfin

Hélas le temps fit son effet. A défaut d’adversaires valables, ceux qu’on appelait jadis les anges de la mort changèrent. Ils ne furent bientot plus que l'ombre de ceux qu'ils étaient.

Les cupides successeurs des shamans conspiraient chaque jour entre eux dans une incessante lutte politique, affamant le peuple qu’ils avaient jurés de protéger.

Quant aux chevaliers, et bien la froide flamme qui animait leur ordre a fini par s’éteindre. Il n’y avait plus de cause à protéger, le bonheur revenait peu à peu dans les foyers. Les guerriers de fers étaient simplement redevenus humains.

C’était une après-midi comme une autre pensait le chevalier, du moins, ça devait être le cas.

« Protégez la cité de Lanmar capitaine ! Le fléau ne prendra pas racine ici ! Le fer de lance de l’humanité frappera son cœur avant !!! »

Le quarantenaire et sa troupe sortit en trombe de la forteresse qui surplombait la ville, courant vers la place à toute allure. Ils étaient 10 hommes.
Richard serra les dents, fer de lance de l’humanité, foutu shaman. Il regarda derrière lui, les mines étaient basses, les regards inquiets. Aucuns d’eux n’avaient signé pour ça. Il voulait juste que son fils soit fier de lui. Etre chevalier soit, il fallait bien que quelqu’un s’occupe des monstres et des bandits, mais à présents…

La petite troupe passa l’angle d’une rue, la place du marché n’était plus qu’à 200m.

Les gens fuyaient les lieux par dizaines en un mouvement de foule chaotique. Le capitaine voulait hurler, rassurer tout le monde, mais il n’en avait pas le temps.

Ça avait commencé y a deux mois. Ces…ces espèces de monstres étaient venu de l’Est. Ils ne se reposaient pas, ne pillaient pas, ne violaient pas. Ils marchaient de village en village et massacraient tout le monde.

Les shamans pensèrent d’abord à des barbares, après tout il n’y avait qu’une petite centaine de combattants, ils envoyèrent donc 400 hommes dirigés par 50 chevaliers à leur rencontre. Que pouvait-il arriver au fer de lance de l’humanité après tout ?

Seuls 3 hommes revinrent. Couverts d’estafilades comme si ils revenaient des enfers même. L’unique chevalier survivant, Richard le connaissait bien : un jeune homme plein de bonne volonté, toujours le sourire aux lèvres. Ils avaient l’habitude de jouer aux cartes ensembles, ce bon vieux Lance. A son retour, il fit son rapport puis disparu dans les ghettos de la ville.

C’étaient des mages, au moins la moitié, et ils avaient seulement perdus 10 hommes en face. Leur chef était une femme aux cheveux pourpres. Perdre des centaines d’hommes pour apprendre ça… foutus shamans.

La troupe arriva dans la place désertée. Une bonne douzaine de cadavres de gardes lacérés gisaient là, rougissant le sol de leur sang. Au milieu du charnier se tenait un de ces fumiers. Habillé d’une tunique noir dont la capuche dissimulait ses traits, sa main droit tenait un poignard, l’autre était posée sur l’épaule de… Lance. C’était Lance ?

« Chevaliers ! »

Richard raffermit sa prise sur son javelot, le poison dont il avait été enduit pouvait tuer un éléphant, ce démon n’avait aucune chance.

« T’aura pas le temps d’arriver jusqu’à nous, rend t »

Un chevalier de sa troupe l’interrompit, il projeta son javelot en hurlant.

 - « MONNNSTRE !!! »

Un éclair lumineux survint brusquement. Lorsque la vue revint à Richard, Lance convulsait dans les bras du maraudeur, un sang noir s'écoulant du trou béant dans sa cuisse, et Bors chargeait épée à la main. Son sang ne fit qu’un tour, il chargea.

« Chaaarg… »

Le maraudeur éclata de rire. C’était un rire puissant, suraigu, froid. Le chevalier sentit quelque chose couler de ses oreilles alors qu’il observait impuissant la tête de Bors tomber au sol. Son corps…il ne pouvait plus bouger.

Il observa ses chevaliers mourir un à un, leur peau se frippant comme si leur âme même leur était arrachée alors que leur tète roulait sur les dalles de pierres rougies.

Le maraudeur se tourna vers lui. Un visage fin encadré de cheveux pourpres, c’était elle.

« Cela fait un mois que je cherche cet homme….un mois »

Richard la vit appliquer son poignard sous sa gorge sans pouvoir rien faire.

- « Hg »

- « Et vous le tuez maintenant, alors que je viens de le retrouver, ESPECE DE POURCEAU IMMONDE !!! »

D’un geste précis, elle trancha la gorge du capitaine.

Ils mentaient pensa t’il alors qu’il heurtait le sol. Ceux qui disaient que la morsure d’une lame est froide. Non, ça n’avait rien à voir…

Le capitaine rendit son dernier souffle alors que la guerrière revenait au chevet du chevalier.
Faisant apparaitre dans sa main une boule d’un liquide noir et fumant, elle entreprit de refermer la plaie du jeune homme.

« Je t’interdit de mourir humain. »

D’autres soldats arrivaient sur la place par dizaines alors que 3 corbeaux aux yeux émeraude quittaient la sphère, s’envolant vers l’est.

« Et je condamne ce peuple »

La rouquine prit Lance sur son épaule et entreprit de se frayer un chemin hors de la ville. Il ne fallut pas bien longtemps avant que les derniers défenseurs sur place soient réduits en pulpe sanglante.

Elle partit en marchant, regardant le chevalier inconscient avec un mépris appuyé. Elle détourna soudainement le regard, perplexe.

« Skraetling… même si je dois te torturer, je découvrirai pourquoi tu n’as pas abattu ton épée comme tes frères »

La guerrière et son prisonnier disparurent dans la brume, marchant vers les cités marchandes du nord.

Des trois partis, un seul corbeau parvint à éviter les flèches des archers de Lanmar. Il voyagea pendant des jours au nez et à la barbe des chasseurs engagés par les shamans pour le retrouver.
Après 9 jours de voyage il était arrivé à destination.

Me’liv était assise en tailleur aux milieux des grands ormes de la cour des généraux.

Le corbeau se posa sur l’épaulette pale de la chef de guerre, lui susurrant le verdict de sa sœur à l’oreille.
Alors la générale se leva et rassembla ses immaculés.


Pour la première fois depuis plus d’un millénaire, le vent d’Est se leva.

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