Chapitre 4.1 - Un scout ne se perd pas, il explore.

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Soudain, Jeannot fut réveillé par les rayons chauds du soleil sur son visage. Il se redressa en sursaut et chercha du regard les flancs escarpés des montagnes Aragonaises qui auraient dû les cerner, mais ils avaient mystérieusement disparu. À leur place, une clairière entourée d'une végétation dense, d'où émergeaient des arbres majestueux, s'étalait devant lui. Il se frotta les yeux, croyant que son esprit lui jouait des tours, mais la scène était bien réelle. Jeannot ne pouvait s'empêcher de se demander : comment avaient-ils atterri ici ?

Tous les autres membres de l'équipe dormaient encore paisiblement à ses côtés, inconscients de ce qui venait de se produire. Il se releva et les secoua un par un.

— J'ai la dalle, grommela Bertrand.

— C'est pas moi, répondit Aimé en s’étirant.

— Quoi ?

— C'est pas moi, répéta Aimé en bâillant.

— Ce n’est pas toi, quoi ?

— Ce n'est pas moi de pddm.

Christophe lâcha un long soupir d'exaspération.

— Aimé, si tu faisais comme la petite bouteille jaune ? pesta-t-il. Tu remues la tête de droite à gauche jusqu'à ce que la pulpe se décolle du fond de ton cerveau. Regarde autour de toi, idiot ! Il y a plus important que de savoir qui doit préparer le petit-déjeuner du matin.

Ils se relevèrent et observèrent leur environnement avec des yeux écarquillés.

— Mais où sont les Pyrénées ? s'inquiéta Pierrot.

— Jeannot, qu'est-ce qu'on fait ? s'enquit Axel.

Les regards insistants des autres membres de l'équipe firent naître une anxiété grandissante chez Jeannot. Sa gorge se noua et il se sentit pris au dépourvu.

— Pourquoi tu me demandes ça ? répondit-il avec embarras.

— Tu es le chef d'équipe, rappela Axel d'un ton ferme.

— Oui, mais là…, balbutia-t-il, incapable de cacher son inquiétude.

— Ah non ! Pas de « Oui, mais là... », récrimina Axel. Quand il s'agit de jouer au chef d'équipe ça va bien, mais quand c'est pour de vrai : il n’y a plus personne. Tu penses peut-être que Francis en cas de problème, lui, il se défilerait ? Tu crois qu’il dirait : « Ah non, les gars ! Vu la situation, je ne suis plus votre chef scout. Débrouillez-vous tout seuls » ?

Les reproches d'Axel firent monter la pression en Jeannot, qui sentit la panique le submerger. Il se leva lentement, comme s'il peinait à supporter le poids de ses responsabilités. Les jambes flageolantes, il inspira profondément comme pour nettoyer son esprit des doutes qui l'assaillaient.

Que ferait Francis ?

Cette simple question lui redonna courage.

Il dirait… Il dirait : « analysons la situation ».

— Par où sommes-nous arrivés ? demanda-t-il.

Les scouts scrutèrent leur environnement avec inquiétude. Ils étaient entourés d'une dense forêt, avec seulement une petite clairière et aucun chemin en vue.

— Vous imaginez vraiment que les montagnes ont bougé pendant la nuit ! s'exclama Axel.

Le désarroi de l'équipe se lisait sur leurs visages, chacun semblait perdu. Jeannot prit conscience qu'il était temps de reprendre le contrôle de la situation. Isolés de la sorte, personne ne viendrait les chercher ici. Ils devaient se mettre en marche, pour trouver de l'aide et déterminer leur position.

— Oh là là ! Ça y est, nous sommes paumés ! se lamenta Axel.

— Mais non, voyons Axel ! Un scout ne se perd pas, il explore, lança Aimé en riant aux éclats.

— Il ne nous reste plus qu'à couper à travers bois, suggéra Jeannot.

— Oh non ! À chaque fois qu’on le fait, on se paume, se lamenta Axel.

— Je ne sais pas si tu es au courant... mais nous sommes déjà perdus, rectifia Christophe.

— Non ! On explore ! s’esclaffa une nouvelle fois Aimé.

Christophe le fusilla du regard, agacé par ces traits d'humour en de telles circonstances. Afin de désamorcer le conflit naissant, Jeannot donna rapidement les consignes. Jeannot désigna Christophe pour prendre la tête groupe et assigna Pierrot à la tâche de veiller à ce que personne ne se perde en marchant à l'arrière. Malgré les réprobations de ses coéquipiers, peu enclin à se déplacer comme une meute de petits louveteaux, Jeannot ne céda pas d’un pouce.

Ils avançaient en file indienne dans la forêt, traversant des taillis, sautant des ruisseaux, grimpant sur des rochers. Ils avaient déjà marché pendant des heures et n'avaient toujours pas trouvé de chemin clair ou de piste à suivre. La fatigue et la frustration commençaient à se faire sentir.

— Je ne sais pas vous ? Mais moi, je ne trouve pas ce silence très normal, dit Bertrand en le rompant.

Tout le monde s'arrêta net, écoutant attentivement les bruits de la forêt. Leur absence était assourdissante. Même les oiseaux semblaient avoir déserté les lieux.

— Chut !

— Qu'est-ce que j'ai encore dit ? demanda Bertrand, se retournant vers Axel.

— Ce n'est pas moi, répondit ce dernier.

— Chut !

Un jeune scout, l'index posé sur les lèvres, sortit d'un fourré derrière eux. Chemise beige, foulard et béret vissé sur la tête, il les dévisagea un instant.

Silencio, que nos van a pillar, baragouina-t-il avant de déguerpir.

— Qu'est-ce qu'il a dit ? demanda Bertrand.

— C’est de l’espagnol, il a dit : « silence, ils vont nous choper », répondit Pierrot.

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