VII
Il guida son regard vers une étagère en particulier, dédiée aux livres anciens reliés de cuir, ceux qui renfermaient des histoires oubliées et des mystères non résolus. Mathilde se dirigea instinctivement vers elle, ses doigts glissant avec respect sur les dos rebondis des ouvrages silencieux. Un livre dépassait légèrement des autres, son titre à moitié effacé, mais bien visible : « Les Portes des Mondes ». Ce titre résonna en elle, une vibration qui ébranla ses pensées, allumant une étincelle de compréhension partielle. Inspirée par une confiance renouvelée, elle tira délicatement le volume épais de l'étagère. Alors qu'elle l'ouvrit précautionneusement, la poussière dorée dansante dans la lumière matinée, elle parcourut les premières lignes d'un texte ancien décrivant des lieux mystiques où les âmes errantes pouvaient se croiser, des espaces créés par l'imagination et le souhait collectif d'être réuni à nouveau avec les êtres chers perdus. Mathilde comprit peu à peu que l'écho de cet autre monde n'était pas un simple produit de son imagination exacerbée. Cela devenait tangible. Ses rêves tourmentés la conduisaient peut-être vers des connaissances que peu de gens avaient explorées. Au même moment, dans le royaume des lunes mortes, un frémissement parcourut l'air. Pierre sentit quelque chose changer, un fil invisible tirant légèrement son existence. Le docteur, qui l'avait guidé par le biais des révélations, observa ce changement avec une curiosité mêlée d'appréhension. « Pierre », dit-il, sa voix prenant une teinte mystique, « ce monde est influencé par ceux qui, même sans le savoir, y mettent le pied. Soyez attentif à marcher entre les réalités. » Pierre se concentra, ressentant la connexion qui s'installait, presque imperceptible mais croissante, grandissante. Il ne savait pas comment, mais il avait le sentiment que quelqu'un dans le monde des vivants cherchait à établir un lien avec lui. Mathilde, absorbée par le livre, sentit une chaleur grandissante, une présence réconfortante émanant des pages. Elle savait maintenant que Pierre n'était pas seulement une apparition. Il était réel d'une manière qu'elle devait encore saisir pleinement. Et plus important, il avait besoin d'elle. Elle ferma doucement le livre, serrant le cuir usé contre elle-même, prête à explorer ce mystère qui pourrait bien révéler plus que ce qu'elle n’aurait jamais espéré ou redouté. En quittant la librairie, elle sentit que sa quête ne faisait que commencer, l'inespéré prêt à se frayer un chemin à travers la fragile trame du quotidien. Alors qu’elle quittait la boutique, quelques mots chuchotés flottaient encore à ses oreilles, résidu de la voix du libraire : « Peut-être qu’en démêlant les énigmes du passé, ouvrirez-vous la voie à l’avenir. » Le vent du matin semblait porter ces paroles au loin, entrelaçant à jamais le destin de Pierre et de Mathilde à travers le voile fragile des mondes parallèles.
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