Et si l'humanité était une phrase ?
Point d’interrogation permanent au milieu de points d’exclamations envahissants et de points de suspensions anxiogènes par leur côté indécis. Je me retrouve terrifiée par ces points un peu trop persuasifs, un peu trop binaires, pour qui rien ne peux changer. Une cause, une conséquence. Je trouve les guillemets sans originalité et les parenthèses trop hypocrites. Elles sont fausses par nature, vivent à travers les autres ou sont médisantes. Elles omettent toujours une partie de la vérité, quand elles n’usurpent pas le talent des autres. Les points virgules eux, sont plus ouverts que leur moitié, et laissent place à plus de nuances. Mais je me dois de rester méfiante : leurs nuances ont des limites, et aussitôt ces dernières atteintes, elles redeviennent aussi bornées que ces simples points. Quid des points de suspensions aussi indécis que songeur ? Ils perçoivent une vérité plus nuancée que les points, mais sont incapables de la traduire. Ils restent perplexes, laissant la place pour que leurs lecteurs fassent le travail à leur place. Ils attendent en permanence que les autres les décodent, les comprennent et s’adaptent à eux. Les virgules, elles, sont avides de détails, de précisions. Elles en demandent toujours plus. Adjectifs, qualificatifs, adverbes, compléments de lieu, compléments de temps, elles veulent tout savoir, quitte à noyer la vérité sous une montagne de superficialité. Parfois, elles sont juste l’introduction à une injonction, elles aiment se pavaner auprès des points d’exclamations, leur donne de la matière pour qu’ils s’imposent de manière exponentielle. Avec leur sens du détail, elles leurs donnent tout ce dont ces derniers ont besoins pour écraser leurs semblables, les faire douter d’eux même. Et qui sont les premiers à en souffrir ? Les points d’interrogations, déjà perturbés par l’effervescence de leur cerveaux surréficients, sont les victimes toutes trouvés de leurs cousins abrupts. Pour eux, tout n’est que remise en question, possibilités multiples. Il y a une justification pour tout et pour tous, même pour le comportement le plus répugnant. Ils n’excusent pas, loin de là, mais sans explications logiques, ils bloquent. Ils ruminent jusqu’à trouver la réponse à l’équation. En permanence, ils veulent s’adapter pour s’intégrer. Et les premiers qu’ils cherchent à intégrer sont leurs exacts contraires, les points d’exclamations si narcissiques. Résultat ? Ils s’auto-flagellent en essayant de correspondre à des attentes inatteignables pour eux. Mais de part leurs nombreuses questions, leurs réflexions en toile d’araignée et leur besoin d’exactitude pour répondre en conséquence ils passent souvent pour des personnes agaçantes, hautaines, pointilleuses. Ils s’en rendent compte, mais c’est plus fort qu’eux, sans exactitudes dans les termes employés, ils ont peur de commettre une énième bourde, de comprendre les choses de travers et donc de moins s’intégrer. Détecteurs de nuances sur pattes, si les mots ne sont pas les bons, c’est vite la catastrophe. Il en est de même pour le langage non verbal, les expressions, les mimiques, le regard. La moindre nuance inexacte, et c’est l’angoisse. Souvent, c’est le quiproquo qui guette : la communication étant biaisée à l’origine, les propos échangés vont à contre-courant des autres éléments et crée la confusion. Ainsi, quelqu’un qui va bien mais donne tous les signes de quelqu’un ayant le moral dans les chaussettes aura bien du mal à persuader les points d’interrogations de leur bien être du moment. On en arrive même à des extrêmes où les points d’interrogations ayant fait les questions et les réponses avant leur interlocuteur, se retrouvent coincer dans un syndrome de Cassandre inévitable, puisque s’ils parlaient, ils iraient droit à la dispute, au déni ou à l’incompréhension. Puis ils rencontrent parfois les slashs, ces barres obliques qui permettent d’apporter ce dont ils manquent cruellement : des nuances. On pourrait croire que ces dernières sont synonymes d’oppositions, mais il n’en est rien. En réalité elles adoucissent, font le lien entre les points d’interrogations torturés, les points de suspension incertains et les autres. Elles apportent juste ce qu’il faut de détails, sans noyer le sujet d’origine. Viennent ensuite les deux points. Eux, ils exposent, expliquent. Ils apportent des solutions et des justifications. Ils ont un côté très rassurant pour les points d’interrogations. Parfois, à la suite d’une maladresse, on fait appel aux astérisques : elles documentent, complètent, corrigent parfois les lapsus et autres étourderies. Autre copine des ponctuations trop binaires, l’apostrophe. Si elle fait parfois le lien entre consonnes et voyelles ou avec les consonnes muettes, elle est surtout une suiveuse. Elle désigne toujours quelque chose de particulier, une appartenance. Elle est dépendante des autres. Enfin, il reste les tirets. Les plus bas ouvrent le dialogue, quand les plus hauts font le lien, complètent les demi-mots. Ils permettent de lister, de trier les éléments, de mettre les choses au clair.
Annotations
Versions