fin
Par le hublot de son abri le ciel se strie de graffitis roses et verts. C’est l’heure de l’atelier peinture à la R.C.[1] Ses potes taguent les nuages avec leur lance-pigments à air-comprimé. Sigismond reconnaît dans l’ébauche, les nymphéas de Monet. De nénuphars, il n’y a plus! Il pose alors son stylo et arrache la page du journal qu'il renseigne chaque matin. S'attelle maladroitement à de savants pliages et quelques minutes plus tard, d'un geste large s'invite au céleste spectacle. Puis il serre l’urne de porphyre (les cendres de Louise) entre ses genoux. Caresse l’accoudoir de cuir. Inspire profondément. Appuie sereinement sur la noix incrustée au creux de son nombril.
…Antoine termine sa lecture. Lové dans son dos le renard se lève, couche ses oreilles et file soulagé pour une fois de n'avoir pas été de la fable! Songeur l'aviateur plie, déplie, replie la feuille. S'applique à refaçonner l'avion de papier qui a véhiculé cette histoire telle qu'elle a atterri par surprise à ses pieds il y a quelques minutes. Arrivée de nulle part sur un nuage poudré de blanc et de rose bleutés elle s'est posée dans un clapotis de feuilles mouillées. Caressant les ailes ponctuées de mots et d'espaces, il murmure:
-Comme c'est étrange!
Abasourdi le Petit Prince s'assied au pied de sa rose dont le cœur de velours se diapre d'une larme:
-Étrange! Vous avez dit Étrange! Mais c'est effrayant!
[1] Retraitale Communauté
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