2 juin 1771
2 juin
J’ai cru mourir. En pleine nuit, alors que je ne sommeille pas encore, la porte de ma chambre s’est lentement ouverte dans un grincement inquiétant. Craignant une bestiole ou un malfaiteur, je bondis de mon lit. Elisabeth. Que fait-elle au milieu de la nuit ? Nous nous regardons. Elle est vulgairement vêtue dans un peignoir en flanelle rose, un habit de dernière mode que je lui ai généreusement offert. Elle se précipite dans mes draps. Je lui demande ce qu’elle me veut. Ses yeux de biche se font insistants, ses mains glacées viennent frôler mon entrejambe. Je la repousse. Elle saisit mon menton pour que je l’embrasse. Je proteste. Elle crie, mécontente :
"Je suis ta femme, comment peux-tu me repousser ? J’ai envie de toi, pourquoi me fais-tu ça ?"
"Ce n’est sans doute pas le moment. Et ce n’est certainement pas toi qui décideras ce que nous allons faire."
"Les héritiers, tu as pensé aux héritiers ?" Fait-elle d'un ton suppliant.
"Je n’en ai cure des héritiers !"
Elle me frappe, me griffe, hurle, hystérique. Je suis contraint de me protéger les bras pour ne pas que cette créature m’arrache les yeux et transforme ma peau en lambeaux. C’est un petit bout de femme mais c’est une chatte déchaînée que j’ai devant moi. Je la supplie de cesser cette bagarre, je réussis à la saisir sans ménagement par le bras. Il n’y aura pas d’héritiers avant un certain temps l’objectif reste le même : je dois gagner assez d'argent pour subvenir à ses besoins.
Elisabeth resserre son peignoir, pleure, sanglote, boude. Je n’en ai que faire. Je lui ordonne de quitter la chambre, la discussion se terminera demain matin. Elle claque la porte, vexée. Je mets beaucoup de temps à me rendormir, vérifie que ma chambre est bien verrouillée. Je rallume 7 bougies pour surprendre les ombres malicieuses.
Le lendemain, j’ai dormi 3 heures. Je me réveille en sursaut, en sueur. Je m’habille. Je descends les escaliers. Dans la terrasse nouvellement aménagée, ma femme, assise, dos à moi. Je m’assieds. Elle est encore très peinée, me regarde à peine. Je réussis à lui arracher des excuses, je souris faiblement. Je n’y crois pas. Le petit-déjeuner est délicieux, Elisabeth se montre charmante. Sa voix douce et mielleuse me parvient, elle pose des questions sur mes projets de la journée.
Elle propose une promenade. Séductrice dans une toilette légère, nous nous baladons à travers les parterres de fleurs. Elisabeth tient absolument à faire de ces jardins une magnifique promenade où les invités se plairaient après le déjeuner. Elle me demande l’avancement de mes textes. Je lui réponds que quelques sous doivent me revenir bientôt.
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