Chapitre 2 - Le soleil blanc
Je continuai à me hisser entre les fils du nœud géant. Au bout, une lumière se matérialisa ; bien plus forte et pure que la lueur qui s'exhalait des œufs et de leurs nerfs. Elle paraissait si lointaine, tellement aveuglante et pourtant mes yeux ne savaient la quitter. Ils tiraient mon corps vers elle, comme enjôlés par un chant inexorable. Je ne pouvais qu'approcher, jusqu'à dépasser les fils et les laisser derrière moi, à ce qu'aucun lien ne me retienne plus. Je nageais sans retenu dans le vide, sans appui.
La lumière était là, totale et immense, un soleil blanc sans chaleur, une masse démesurée, obnubilant mes sens. J'étais minuscule et baignais dans l'énergie de l'éclat. J'entendais son murmure, son souffle, sa respiration puissante qui envahissait l'immensité, comblant chaque espace de bruit. Il bouillonnait, comme vivant, tonitruant de lumière. Il brûlait et je brûlais avec lui.
Une douleur naquit, minuscule, grandissante. C'est alors que je me rendis compte à quel point j'étais proche et de la distance que j'avais parcourue. Je devais fuir ! La douleur se propageait sur ma peau, à toute vitesse. Mes yeux restaient accrochés, incapables de se défaire de l'emprise de la lumière. Mon corps parvenait à peine à se dérober. Il semblait lourd et pesait sous la souffrance. Il m'épuisait, me tirait dans les entraves de sa torpeur. Comme un Icare déchu, je traversais les brumes qui environnaient le soleil, d'une chute lente et morte.
Je tombais à reculons et en m’éloignant, mon attention se réduisit, me libérant peu à peu de son influence. De plus loin, je pouvais le contempler : toute cette splendeur, impassiblement avide. Son cercle était parfait et sa lumière pure. Des nuages flottaient autour de lui, des courtisans étranges et drapés de couleurs, qui s'écartaient en volutes sur ma fuite. L'astre était immense, une sphère cristalline napée de nuées chatoyantes. Quant au brasier que j'avais ressenti, il ne provenait nullement de la chaleur, mais plutôt d'un trop-plein de lumière que ma peau n'avait su supporter ; une lumière froide, mais puissante.
L'emprise se dissipait dans la fraîcheur retrouvée et je pu enfin lui tourner le dos. L'amas d’œufs se tenait désormais devant moi. De l'extérieur, lui aussi ressemblait à une énorme boule, mais de taille plus raisonnable. Une étoile et une planète majeure. La pelote lâche et parsemée de cocons oscillait doucement dans le vide, gorgée de cette lumière qui la traversait. Les dormeurs semblaient en boire l'énergie d'un air vorace et avide de rêves.
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