Demain, déjà, j'irai mourir

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Il y a encore tant à vivre, mais demain déjà, j’irai mourir.

J’irai mourir sans avoir entendu

Ni les femmes d’Alexandrie en quête d’un marin mythique

Ni le cerveau bouillonnant d’un savant qui sauvera l’hiver

Ni ces rires enfantins qui enchantent Santiago,

Ni ce rêve d’un matin, d’un café et son silence des Andes.

Je partirai sans même avoir vu ton corps vieillir avec le mien dans nos sourires,

Une rose trémière devenir bleu dans la nuit,

Les rivages de chaque mer et les tréfonds du ciel,

Mes enfants naitre puis devenir pour s’accomplir.


Il y a encore tant à vivre, mais demain déjà, j’irai mourir.

J’ai peur déjà de ne plus connaitre l’écrin de la neige

De ne plus pouvoir lire sous un vieux cèdre

J’ai peur encore que la folie des autres me consume

Embrase lentement les esprits, puis après, l’horizon.

Je sais que mon départ sera chargé de cette tristesse,

Celle de partir sans goûter aux repas de tant de grand-mères

Celle d’avoir perdu, un matin, l’occasion de te voir,

Et de m’être laissé avoir par trop de colère

Avoir couru après le temps, après l’argent, pour rien ou si peu.


Il y a encore tant à vivre, mais demain déjà, j’irai mourir

Je sais que déjà, je t’offrirai mon dernier soupir

Comme s’il pouvait déchainer en furie ces souvenirs

Ces nuits blanches, mais si bleue de désir

Où je te sacrai reine de mes baisers pour immédiatement te profaner,

Où ton corps était un songe de brume et de son,

Où je croquai ton cœur, tes seins, parcourrai ton monde de mes mains.

Et je sais déjà, que ces moments, ma merveille

Sont milles joies en sommeil, un acompte sur mes larmes,

Elles qui n’ont plus à couler depuis que je connais tes baisers salés


Il y a encore tant à vivre, mais demain déjà, j’irai mourir

Et si j’écris ces vers, si jeune, mon ami, mon frère

Ce n’est pas pour pleurer en avance, ou dresser un requiem

Mais chanter ce que je n’arriverai jamais à vivre

Et offrir à toutes mes joies en sursis un instant éphémère et imaginaire

Où j’ai foulé de mes pieds les rues de Pékin, d’Oslo, Reykjavik, Sarajevo

Où je lui ai demandé ta main sur le fleuve amour après le transsibérien

Où j’ai vandalisé la lune, pour la lui tailler en montre

Où j’ai gardé le silence devant les splendeurs de ce monde

Et si je n’ai pas connu tout ça, j’ai été heureux de l’avoir espéré.

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