Chapitre 43
À la pause, Marion se jeta sur lui comme un requin affamé sur sa proie..
— Tu veux me tuer, en fait ? lança-t-il en rigolant.
— C’est prévu pour plus tard, t’inquiète pas.
Alec la dévisagea durant un moment.
— T’as un problème ?
— Ouais, j'aimerais te confier un truc…
Là, elle avait l’air vraiment sérieuse, et même presque inquiète. Elle faisait presque peur à voir, comme ça. Elle avait perdu son sourire habituel qui ne la quittait jamais, d’habitude.
— Dis-moi tout, répondit-il.
Il avait pris la voix la plus douce et rassurante possible. Elle n’avait vraiment pas l’air bien.
— Tu te moques pas, hein ?
— Mais bien sûr que non !
Elle prit une grande inspiration. Sa poitrine se souleva, puis redescendit lorsqu’elle expira.
— J’pense que Jordan me fait de l’effet…
Alec écarquilla les yeux. Il s’attendait vraiment à tout, sauf à ça. Jordan et Marion ? C’était juste impossible. Si elle n’avait pas l’air aussi sérieuse, il aurait cru à une mauvaise blague. Comment elle avait pu avoir des sentiments pour un connard pareil ?
— Mais c’est pas du tout ton style, nan ? bafouilla-t-il.
— Je sais… Et je suis pas le sien non plus.
Elle baissa la tête. Elle avait l’air un chien battu, ça faisait de la peine à voir…
— J’croyais que vous étiez presque pires ennemis ?
— Moi aussi… Mais tu sais, dans les histoires d’amour, souvent on commence par être pires ennemis, avant de devenir…
— Marion. On est pas dans tes romans, là. C’est des vrais sentiments, que t’as…?
— Bah oui gogol, sinon je t’en parlerais pas !
Alec ne savait pas trop quoi faire, il était un peu gêné. Ce n’était vraiment pas le meilleur conseiller en amour, mais là il était obligé d’aider son amie. Il fit du mieux qu’il pouvait.
— Et donc, tu voudrais des conseils pour t’aider à le… draguer ?
Ce mot sonna faux à son oreille.
— Oui, j’aimerais bien… J’suis un peu paumée, là.
— Ben… J’pense qu’il faut que t’oublies que t’as aucune chance. Fonce, vas-y. On sait jamais, sur un malentendu ça peut passer.
Marion se mit à relever la tête, ses yeux s’étaient remis à briller.
— Tu penses ?
— Bah franchement, j’trouve que t’as tes chances ! On sait pas de quoi l’avenir est fait, et il vaut mieux tenter, plutôt que de ne rien faire et regretter !
— J’vais essayer, plus tard. J’me sens pas encore prête.
— Prends ton temps, c’est important.
Il fit son sourire le plus rassurant possible. Il était plutôt fier de sa performance, qui était loin d’être étincelante, mais il avait au moins évité la catastrophe.
— Et tu m’aideras, hein ?
Son visage se décomposa.
Ça voulait dire quoi, ça ? Qu’il allait revoir Jordan ?!
« Tout mais pas ça… » se dit-il au fond de lui, désespéré. C’était vraiment la dernière chose dont il avait envie.
— Bien sûr ! bredouilla-t-il, un peu gêné. Par contre, j'dois te laisser, j'ai super envie d'aller aux toilettes...
Il n'attendit même pas de réponse et fila hors de la classe.
Sauf qu’en sortant, il tomba nez-à-nez avec Jordan.
Il perdit instantanément son envie de rire. Jordan avait l’air furieux, et il avait l’air de lui en vouloir personnellement. Ses traits étaient tirés, ses yeux étaient injectés de sang. Il serrait la mâchoire et respirait bruyamment.
Le coeur d’Alec fit un bond. Il frôla la crise cardiaque. Il se remémora le moment de la veille, où il l’avait évité pour aller voir Ruben. Et puis dans la rue, lorsqu’il l’avait aperçu avec lui… Et puis la Chine, les menaces, la conversation avec Ruben sur son téléphone…
Jordan ouvrit la bouche :
— J’sais c’que t’as fait putain ! On avait conclu un accord !
Alec en était sûr : il était dans la merde.
Jordan avait parlé tout bas, ce qui le rendait un peu moins crédible. Mais ça n’empêchait qu’il était terrifié. La veine du front de Jordan ressortait, aussi bleue que la peur d'Alec.
Il le poussa jusque dans la cage d’escaliers pour s’éloigner du monde et éviter d’attirer les regards sur eux.
— Mais j’ai rien fait ! s’exclama Alec spontanément.
Il ne comprenait rien à ce qui était en train de se passer, il était persuadé de n'avoir rien fait. Alors il essaya à toute vitesse de se remémorer les derniers jours, cherchant un moment où il aurait été un peu moins vigilant que d'habitude et aurait laissé filer des informations...
Mais non, rien du tout. C'était pas possible, il devait y avoir une erreur !
— Arrête de jouer à l'innocent, j'suis pas con !
Alec reçut un gros postillon sur la joue. Jordan avait l'air furieux, ses poings étaient serrés tellement fort qu'ils tremblaient.
— Mais j'te jure que j'ai rien fait ! Si y a eu un truc, c'est pas d'ma faute !
— T'es le seul à savoir, connard ! Arrête de m'mentir !
— J'te mens pas, putain !
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