20 Septembre 2015 - Graham Stole Electronics Society, Phoenix, Arizona, USA :
Merde ! Ce café est trop bon !
Je suis obligé de le dire à haute voix, comme la plupart des choses que vous devez faire chez vous !
Malgré les pétasses, le bazar informatique et les obnubilations pour la programmation, l'entreprise sert un délicieux café chaud, avec une lichette de crème et un sachet de sucre comme j'aime.
Le cappuccino que vient de me servir Ash est d'un délice que je n'arrive même pas à me défaire de son goût. Le liquide chaud descend dans mon oesophage sans vraiment disparaître. Je pourrais être brûlée, je n'en ressentirais que du bonheur.
Ash, quant à elle, a osé prendre une cannette de Coke avec une pomme, et Teddy lui a opté pour un thé Lipton à la verveine.
Nous buvons nos breuvages en silence, tandis que Teddy feuillette son actualité sur son iPhone. Je n'avais jamais vu d'engin aussi gros, et rien que de voir ce bijou technologique me donne froid dans le dos. Qui peut se payer un tel machin ?
Entre deux gorgées, Ashley me demande, d'une voix moins forte et plus chaleureuse :
- T'étais où avant ? Laisse-moi deviner : Seattle, la ville de Fifty Shades ?
Merde alors ! Elle connaît aussi Fifty Shdes ? On va devenir amis ! Je le sens. Je lui réponds posément, d'une voix douce :
- Non, je viens de New York en fait, mais j'ai passé l'entièreté de mes études ici, à Phoenix. D'ailleurs, je trouve les gens de l'Arizona rudement bien grossiers en comparaison à New York.
- Normal, New York c'est pour les bourges ! Attends, rassure-moi, t'es pas une bourge ?!
Je secoue la tête. Elle soupire de soulagement :
- Oh ! dieu soit loué ! Parce que la seule bourge ici que je peux pas me faire, c'est bien Cindy ! Quelle pouffiasse ! Et elle croit en plus qu'elle peut devenir patronne. Je la vois bien éboueuse dans Manhattan, moi, qu'est-ce que t'en dis ?
Malgré le fait qu'on soit en Arizona, à l'autre bout de la côte est, j'hôche de la tête. Je ne connais pas Cindy, et j'ai bien peur de la connaître plus rapidement que mes deux nouveaux collègues.
Je me rends aussitôt compte que je viens de finir mon café, et que j'ai horriblement faim, ce qui a l'air réellement insolite dans le cas présent. Je fixe Ashley comme si elle me devait quelque chose, tout en me levant de table :
- Bah, qu'est-ce que tu fais ?
- Je vais chercher une banane ou un petit remontant, histoire d'être prête pour cet aprèm.
- D'acodac. Je t'accompagne, j'ai aussi faim qu'un gorille en période de famine ! Miam, ce que je raffollerais d'un cookie !
Je n'ai le temps que de me lever et de faire deux mètres. La dernière chose que je vois avant de me prendre Cindy en pleine figure, c'est une horrible femme toute gonflée, qui doit avoir au plus vingt ans.
Elle me percute - et je doute qu'elle ne l'ait fait involontairement -, profitant de cet instant pour lâcher une théière de thé bouillonnant à mes pieds. Je n'ai pas le temps d'hurler de douleur, puisque le reste de mon café vient de recolorer son chemisier blanc : je l'ai littéralement aspergé de café à la crème. Elle hurle comme si une bête venait de monter sur elle :
- Espèce d'aveugle, tu ne peux pas regarder où tu marches ? Ah j'oubliais que t'étais aussi grosse ! Va, sale idiote d'aveugle...
- Ta gueule, Cindy, personne a besoin de savoir ton putain d'avis ! me défend Ash, qui vient d'aussitôt me rejoindre, et qui a constaté les dégâts.
Si nous avions fait un accident de voiture, ce serait elle la fautive, et je serais obligé de signer un constatr pour me défendre aurpès du garagiste. Etant donné que ce n'est qu'une altercation brutale, c'est sans doute moi la plus fautive, malgré les deux témoins qui nous entourent, et la demi-douzaine de programmeurs qui décident de regarder la scène. Cindy en profite pour me taper l'affiche, ce qui me donne plus envie de la tuer qu'autre chose :
- Regardez-moi ç'a : la cochonne pipelette et ses amis défendent la grosse aveugle ! Quel beau film !
- La ferme, je te dis ! Tu vas voir, si tu continues...
- Toi, ta gueule, Ashley ! Je crois pas qu'on t'ait appelé, retourne chez ton ami le vocabulaire !
Je bouillonne de rage, et je la fixe, en serrant les poings. Ne craque pas, ne craque pas, ne craque p...
- Sortez tous vos portables, les gars, vous attendez quoi ? Que vos mamans vous les prennent, peut-être ?
- Cindy, t'abuses, arrête, c'est pas très drôle, tente de me défendre Ted.
- Oh ! regardez moi ç'a : le plouc dragueur des supermarchés décident de défendre la grosse aveugle ! J'ai hâte de voir la prescription d'ordonnance de son médecin ! Attends quoi ? On vient de me dire qu'il avait un problème de cerveau, faut lui faire une greffe !
- TA GUEULE !!!
Je sais me retenir, mais pas cette fois-ci. Je la gifle, d'une gifle monumentale. Elle bascule en arrière, et ce n'est que sur son postérieur qu'elle comprend ce qu'elle vient de dire. Je bouillonne toujours de rage, et je suis à deux doigts de la déchiqueter vivante, malgré le fait qu'il y ait une limite. Les programmeurs restent de marbre, tandis qu'Ash pouffe tout en montrant du doigt la persécutrice du service. Cindy porte lentement sa main à sa joue brûlante, la bouche béante. Une fois qu'elle l'a touché, elle hurle et s'écrie, tout en me pointant du doigt :
- Toi...TOI !!! JE TE JURE QUE JE VAIS TE LE FAIRE PAYER !!! TU AS RUINE MA JOUE !!! JE VAIS TE TUER, JE VAIS TE...
- Casse-toi, ma belle. Et si t'as besoin de Botox, va voir chez moi si t'y es !
Outrée, Cindy court vers le couloir menant au secrétariat. Je suis encore sous le choc, tandis qu'Ash me rejoint, et que Teddy rigole.
Je ne comprends rien. Pourquoi m'ai-je tant énervé ? Je viens de risquer ma place dans une des meilleures entreprises américaines, une entreprise de programmation à Phoenix !
Je n'obtiendrais jamais deux fois le même entretien d'embauche ! Tandis que je panique, Ashley me fait rasseoir, et me tend une cannette de Coke. Elle dit, d'une voix enrouée :
- Tiens, tu l'as mérité, ma belle ! Détruire dès le premier jour la pouffe de service, je n'y aurais jamais cru !
Je comprends alors d'un coup ce qu'il vient d'arriver, et je rit nerveusement.
Ah, Ah, Ah...
Je bois lentement la boisson chimique, tout en fixant mes deux collègues : l'un est à demi penché sur sa chaise, sa carure si sexy et envieuse, tandis que l'autre est complètement avachée sur la table, rêveuse comme une hyperactive. Je ne sais pas qui des deux j'envie le plus, mais si ç'a ne tenait qu'à moi, je ne choisirais aucuns des deux.
Finalement, je déclare, d'une voix monotone :
- Je ferais mieux d'aller me remettre au boulot, non ?
Teddy et Ash se regardent, malicieux. Leurs regards se reposent sur moi, et Teddy lance, d'une voix presque narquoise :
- Qui a dit qu'on devait forcément travailler ?
- Attends, où tu veu...
- On va te présenter Phoenix, à notre façon ! Si tu nous aides pour le programme et qu'en plus tu défonces la pouffe de service, faut qu'on t'aide nous aussi à t'y faire ici ! Viens, on va manger autre part !
- Mais...
Sans que je ne m'y attende, mes deux amis me tirent vers l'ascenceur. J'ai une peur bleue qui se bloque dans mon coeur, comme si on essayait de me faire sécher les cours. Je haïs le crime, et je ne veux pas le côtoyer, y compris J.R.
Mais comment veux-tu l'oublier, idiote ?
Je ferais à ma manière, me dicte ma conscience. Et pourtant, une boule amère se bloque dans ma gorge rien qu'à cette pensée.
Zou, allez, c'est parti pour un après-midi promenade à Phoenix ! Hou hou !
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