Chapitre 18 L'immortalité

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La porte de ma chambre s'ouvre en fracas et un coup de vent s'engouffre dans la pièce, ébouriffe mes cheveux courts et fait s'envoler quelques feuilles de papier sur mon bureau.

Une lueur doucement étrange parvient du portail qui vient de s'ouvrir et j'aperçois une ombre vaguement humaine qui se découpe dans l'embrasure.

Comme hypnotisée, je m'approche lentement. À chaque pas que je fais, la créature recule et, avant que je ne m'en rende compte, je me trouve dans une immense caverne au plafond haut de plusieurs mètres.

D'immenses horloges emplissent la salle. Un chemin de rocher s'allonge devant moi et serpente jusqu'au pied d'un trône d'obsidienne brillante.

Je m'avance. Sous mes pas hésitants, le sol s'illumine d'une lueur verte pâle. Arrivée à la première marche du siège majestueux, je prends le temps d'observer en silence la personne qui s'y trouve assise.

Son apparence se meut, changeant sans cesse. Je reconnais, parmi les corps qu'elle revêt, certaines grandes figures historiques : Jules César, Cléopâtre, Voltaire, Louis XIV, Simone Veil, et des milliers d'autres que je suis sûre d'avoir aperçues dans les livres d'histoire ou dans les musées, ou encore d'illustres inconnus, probablement d'autres cultures.

— Bonjour, bredouillé-je.

La personne me sourit doucement.

  • Bonjour, jeune demoiselle.

Comme je m'y attendais, leur voix change aussi.

  • À qui ai-je l'honneur ?

J'esquisse une révérence maladroite. Ils rient.

  • Ce n'est pas nécessaire. Je suis l'Immortalité.
  • Hein ? Ce n'est pas... un concept ?
  • Eh bien, comme beaucoup de concepts, j'existe de la croyance des hommes que j'existe, tu comprends.
  • Oui, je vois très bien... Attendez... Chronos existe ? Et Aphrodite ?
  • Oui. Comme moi, ils sont. Et ils changent et s'adaptent aux croyances humaines.
  • Donc... vous pouvez donner l'immortalité à quelqu'un ?
  • Moi ? Non... Enfin, je peux toujours donner des conseils. Et tout dépend de ce que tu veux dire par immortalité. Si tu deviens le pire dictateur de tous les temps, tu seras immortelle dans les mémoires de tous. En revanche, je ne peux te donner la vie éternelle.
  • Je vois... De toute façon, la vie éternelle n'a pas d'intérêt si je vois mourir tous ceux que j'aime.
  • Tu es bien sage, petite. Mais tu pourrais me demander cela pour tous ceux que tu aimes.
  • Eh bien... la perspective de vivre éternellement ne m'attire pas particulièrement. En effet, je pense que la vie a plus de valeur dans la perspective qu'elle ne va pas durer éternellement. Cela encourage à profiter du bien qu'elle peut apporter et à relativiser le mal qu'elle induit.
  • J'entends ce que tu me dis.
  • Voilà... C'était un honneur de vous rencontrer. J'ignore pourquoi vous m'avez choisie.
  • Je t'ai vue et j'ai remarqué ce non-désir d'immortalité, et j'ai ainsi pensé que ce serait intéressant de discuter avec toi.
  • Merci infiniment, c'était constructif, et j'aurai une belle histoire à raconter. Peut-être deviendra-t-elle immortelle.

La créature me sourit.

  • Aie une belle vie, enfant.

Je reviens sur mes pas sur un dernier "au revoir".

La porte de ma chambre se referme, et quand je l'ouvre pour m'assurer que le portail s'est refermé, je fais face à mon habituelle vue : l'arrière-cuisine.

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