Chapitre XX - Prestidigitation
Uüstia se précipita vers eux deux et approcha son oreille de leurs visages. Ils respiraient encore mais semblaient évanouis. Elles leur tapota les joues, aucune réaction. Leur pinça les fesses, pas mieux ! Elle commença alors à vraiment s'inquiéter, que devait-elle faire ? Ça lui était déjà arrivé qu'un de ses partenaires s'évanouisse suite à ses assauts corporels, mais c'était un humain. Ici, c'était pas pareil, comment réagir ?
Elle prit leurs pouls, ils étaient lents, voire même trop lents. Fallait-il qu'ils boivent ? Qu'ils mangent ? Elle les embrassa et, ni une ni deux, se releva.
~ Je reviens, marmonna-t-elle inquiète à leur intention.
Puis elle se dématerialisa dans sa volute d'écailles scintillantes laissant les deux corps nus de ses amants sur le futon.
Elle se rematerialisa dans une rue passante sans faire attention à se cacher. Elle fût accueilli par des clameurs et des stupeurs, mais n'y prêta pas attention, et se dirigea vers l'épicerie la plus proche. Uüstia était en panique, ignorant tous les passants qui se retournaient à son passage. Certains la sifflaient, d'autres lui donnaient des noms d'oiseaux assez fleuris. Elle continua en accélérant le pas en pensant à Sähmyêll et Lilith. Que leur était-il arrivé ? Un orgasme trop intense pouvait-il provoquer cela ? Ou alors, était-ce l'expérience en elle-même ?
Elle trotta aussi vite qu'elle le pouvait et se dit qu'il aurait été plus simple qu'elle se téléporte directement dans l'épicerie. Prise dans l'élan et la panique, elle n'y avait pas pensé. Elle fut sortie de ses pensées par un homme en uniforme qui tentait de l'arrêter en se mettant devant elle une main levée. Elle l'esquiva incrédule et continua en se mettant à courir. Ce dernier surpris se retourna en jurant et se mit instantanément à sa poursuite.
Uüstia slalomait entre les passants, sautait même parfois au dessus d'eux. Le policier derrière courait et prévint ses collègues avec son oreillette bluetooth, des sirènes commencèrent à se faire entendre dans des rues adjacentes. Elle fut stoppée par un comité d'accueil de trois policiers, dont deux femmes, devant la supérette.
Le premier arriva derrière elle en haletant et mit ses mains sur ses genoux pour reprendre sa respiration.
- La vache, vous courez vite !
- Ou vous, pas assez !
- Faudrait penser aux Jeux Olympiques.
- Mais pourquoi vous me poursuivez ?
Une foule s'était regroupée autour de la scène, certains tentèrent de la filmer avec leurs smartphones. Pendant ce temps, une des demoiselles en uniforme avait retiré sa veste et s'approchait de la Succube rousse.
- Mais c'est évident non ?
- Bah... non !
- Mais... Vous êtes nue !
- Ah ?
Uüstia parût interloquée, se regarda, contempla la foule et vit celle qui lui proposait sa veste pour couvrir sa nudité. Elle se mit à rire nerveusement.
- Vous n'avez pas plus important à faire ?
- Mais on fait notre boulot !
- On devrait tous être tout nus tout le temps, ça serait plus naturel !
Quelques personnes dans la foule se mirent à applaudir.
- Mais c'est que c'est interdit dans l'espace public madame ! Cela peut choquer, les plus jeunes surtout...
- Alors c'est choquant d'être sans artifice ? Mais quel animal êtes-vous ?
- Mais, je ne vous permets pas madame !
Des rires et des huées se firent entendre dans la foule.
- Vous êtes, comme tous ici, des Homo Sapiens, une espèce de primate qui vient d'Afrique qui se croit au dessus du règne animal. Moi, c'est ça qui me choque !
Le policier fût estomaqué et ne sut quoi rétorquer. Une partie de la foule applaudissait, d'autres imitèrent de cris de chimpanzés quand certains vilipandaient au contaire.
- Votre arme là devrait plus choquer que ma nudité, quelle invention honteuse !
L'homme mit la main à sa poche pour recouvrir son arme en la regardant. La policière, elle, s'apprêta à entourer Uüstia de sa veste mais celle-ci s'esquiva.
- Olé ! s'écria un passant.
- C'est bon, je vais m'habiller.
- Mais ? vous n'avez r...
Uüstia claqua des doigts et un combinaison pourpre apparut dans un scintillement pour vêtir son corps.
- Mais ? comment ?
- C'est bon là ? Je peux y aller ? Je suis pressée ! s'irrita-t-elle.
La foule éructa et applaudirent à tout rompre, ce spectacle paraissait improbable tel un exercice d'illusionniste fort bien réalisé.
- Heu... Ben oui du coup, répondit le policier en invitant ses collègues à s'écarter de l'entrée de l'épicerie pour la laisser passer.
- Merci Gérard !
- Mais comm...
- Et oui, tu devrais rappeler ta femme !
- Mais...
- Arrêtez de commencer vos phrases par "Mais" aussi.
- M...
Uüstia posa son index sur les lèvres du policier totalement déconfit par l'aplomb de cette femme. Cette dernière, sous la ferveur du public, marcha avec détermination, vêtue de sa combinaison, vers l'intérieur de la boutique. Ceux qui avait filmé regardait de nouveau cette incroyable performance et cela lança moultes discussions. Évidemment, elle fut partagée sur les réseaux sociaux.
Une fois dans les rayons, des hommes tentèrent d'engager la conversation pour la féliciter ou de maladroitement la draguer. Elle les ignora et cherchait ce qu'elle était venue chercher, de l'eau et des sucreries. Elle ne savait pas si ça aurait un effet sur des êtres de son espèce mais tentait le tout pour le tout.
Elle saisit un pack de six bouteilles d'eau, des barres proteinées et des bonbons gélifiés et se dirigea vers les caisses. Son regard fut attiré par un groupe de personnes figées devant un écran de télévision. Elle s'approcha et remarqua que c'était la scène qui avait eu lieu peu de temps avant qui était diffusée sur une chaîne en info continue.
À ce moment là, elle se dit qu'elle avait peut être fait une erreur de dévoiler ses pouvoirs. Les Succubes n'avaient pas pour habitude d'apparaître en public, seulement dans le cadre intime d'un rêve. Qu'allait engendrer cette polémique ?
- C'est elle, s'écria une femme obèse avec un doigt accusateur.
- Oh, elle est là, fit un jeune homme les yeux pétillants.
Uüstia fit volte face et tenta d'echapper a ses fans et détracteurs. Mais à chaque rayon, ils apparaissaient et tentaient de l'alpaguer. Elle comprenait à présent ce que lui avait raconté un homme, se disant célèbre, qu'elle avait visité concernant sa difficulté à circuler librement pour faire des activités anodines.
Elle était de plus en plus acculée, les bras chargés de ses emplettes. Cette horde de zombies aux intentions variées la cloitrait contre les étagères. De dépit, elle décida de se téléporter et disparut dans une tornade de paillettes qui laissa tout le monde ébaubi et stupéfait. Quelles seront les conséquences de ses actes ? Telles n'étaient pas ses considérations immédiates !
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