A Dieu
Dans les livres de bonnes manières, c'est écrit qu'il ne faut pas commencer une lettre par "je". Mais peu importe la forme, seul le fond compte.
Je voulais simplement te dire que je ne viendrai sûrement pas au weekend que tu organises. Je pourrais me trouver des excuses; dire que c'est à cause du prix du train, de la longueur du voyage, de la masse de travail à fournir pour la fac, de la fatigue, du manque de temps ou que sais-je encore...
Mais en vérité, ce n'est rien de tout cela. Ça m'est égal l'argent, j'adore les voyages en train, le travail au fond ça n'est pas si important et dans les wagons tout est prévu pour qu'on puisse et travailler et dormir.
En fait, je n'ai pas d'excuse. J'ai simplement une drôle d'appréhension à l'idée de me retrouver dans la même ambiance qu'à Jérusalem. Non pas que je la regrette, mais je pense qu'elle doit rester là-bas; en Orient, et dans les souvenirs. On en fait ce qu'on veut des souvenirs, c'est ce qu'il y a de pratique avec eux.
A mon âge, c'est important d'être prudent, d'autant plus dans nos milieux où l'on est si prompt à condamner. La prudence, ça veut dire savoir où l'on va, où l'on veut aller et où nos actions vont nous mener. C'est là qu'est le problème: je sens bien que dans cette situation je ne maîtrise pas grand chose. C'est pourquoi je préfère l'éviter. Certains parleront de fuite et de lâcheté... peut-être ont-ils raison.
J'ai bien conscience que rien est clair dans ce message, et que tu ne vas sûrement pas y comprendre grand chose, puisque, comme tu l'as si bien dit, on n'est pas du même monde. C'est sûrement à cause de cela que le rêve et la réalité n'arrête pas de s'emmêler dans ma tête, rendant cette histoire si instable.
Peu importe au final ce que tu en retires, je ne te demande rien. C'est sûrement mieux que tout reste vague : vague souvenir, vague sensation, vague interprétation. Surtout ne pas y infliger le carcan des mots qui obligerait à agir en conséquence.
Je me rends compte à présent de ce que ma démarche peut avoir d'égoïste. J'espère que cette lettre ne t'aura pas mis mal à l'aise. Tu peux la faire disparaître, elle importe peu.
Sur ce, je te souhaite le meilleur pour ta vie, particulièrement de parvenir à mener ta barque là où tu l'as prévu. Mais je ne m'inquiète pas pour ça, ce n'est pas comme si tu étais n'importe qui...
Les derniers mots qu'il me reste à écrire sont les plus importants:
A Dieu
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