XXV. Revenir, deuxième partie (mini-chapitre)
- Ayez confiance, messager Dernéant. Vous aviez raison, votre cousine fera de grandes choses.
Le mage braqua son regard sur Liz. Il n'avait toujours pas souri, mais ses yeux avaient perdu la lassitude lourde que Jal leur avait remarquée pour leur scintillement habituel.
- Mademoiselle Bertili...
Il prit une profonde respiration.
- Vous êtes à présent apprentie mage sous ma responsabilité.
Liz poussa une exclamation joyeuse et se jeta au cou de son cousin.
- Jal, c'est fabuleux ! Tu m'a encore sauvée, c'était une idée merveilleuse !
Elle retrouva toute sa dignité, sans perdre son sourire, pour courber la tête devant le mage Mathurin.
- Merci, maître Mirant. Je ferai tout mon possible pour ne pas décevoir vos attentes.
- Bien, apprentie. Soyez demain matin au palais.
Il saisit une feuille de parchemin vierge sous les documents qui couvraient son écritoire et rédigea quelque chose rapidement, puis signa et apposa un sceau.
- Montrez ceci, on vous laissera entrer. Vous recevrez une robe d'apprentie et je vous présenterai aux autres mages. Félicitations.
Elle prit le rouleau de papier.
- Je serai là.
- Je fonde de grands espoirs sur vous, apprentie Liz. Vous pouvez partir. D'ici demain, vous n'avez aucune obligation.
- Mes salutations, maître Mirant.
- Appelez-moi Mathurin.
- A demain, maître Mathurin.
- Adieu, mage de ce royaume, intervint Jal en saluant à son tour. Merci infiniment d'avoir accepté. Le sort de ma cousine ne m'inquiète plus, j'ai confiance en vous. Je vais probablement devoir bientôt quitter cette ville, je pense que nous ne nous reverrons plus, mais vous avez toute mon estime et ma reconnaissance.
Le mage inclina la tête.
- Messager Dernéant, le dévouement que vous manifestez pour mon apprentie plaide en votre faveur. De plus, l'absence de magie chez vous a favorisé le développement de capacités d'improvisation et une force d'âme hors du commun. Vous possédez donc quelque chose que même les magiciens les plus puissants ne peuvent égaler : l'indépendance. Mon estime personnelle vous est toute acquise.
- Mage, c'est un honneur.
Jal souriait.
- Les Lunes veillent sur vous, jeunes gens. Particulièrement sur vous, messager. Je sais que vous prenez une route pleine de risques.
- J'ai choisi cette route. Votre Lune vous garde, mage, et offre un havre à Flora Hechid.
Les yeux de Mathurin se voilèrent.
- Elle vous remerciera.
Jal remontait la rue, Liz voletait devant lui, au comble de la joie. Apprendre l'art des mages avec Mathurin Mirant ! Jamais elle n'avait espéré autant. Son cousin, lui, était convaincu qu'elle le méritait. Elle accédait à une éducation parmi les meilleures, et échappait à l'influence mauvaise de Goulven Divef. Il continuait à observer, à savourer la vie. Oui, Jal Dernéant était de retour dans le monde. Et le monde ne perdait rien pour attendre.
Il pressa un peu le pas pour rattraper Liz, mais une vision du coin de l’œil le retint. Il venait de voir un objet dans la vitrine à sa droite. Sa cousine remarqua son absence et revint en arrière. Jal contemplait le présentoir d'une boutique.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Regarde ça.
Il posa son doigt sur la vitre. La magicienne siffla.
- Il est magnifique ! Mais ce n'est pas pour toi...
- Bien sûr que non. Mais j'ai mon idée.
Liz sourit en coin et le regarda.
- Tu vas l'offrir à Lidwine, c'est ça ?
- Tu imagines ?
Liz détailla le futur présent.
- Ça lui irait à merveille. Mais ça coûte un bras !
- Peu importe. Figure-toi que je ne la reverrais plus de plusieurs mois ! Il faut que je lui laisse un bon souvenir.
- Jal, tu es... Tu as raison, va.
- Une autre fois, la boutique est fermée. Mais au moins, je sais où aller.
Il contempla une dernière fois le modèle exposé avec un soupir, puis fit claquer ses chaussures sur le pavé.
- Bon, je crois qu'il est temps de revenir.
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