Le petit village au doux nom fleuri de Centaurée vivait au rythme des saisons. Enserré par deux glaciers aux formes majestueuses, les six hameaux s’articulaient autour de son bourg principal et son école. Dans ce coin perdu, aux allures de bout du monde, les habitants vivaient en symbiose avec les éléments. Venir se perdre sur cette terre isolée, pour certains relevaient du miracle. Pour tout ceux qui posaient leur valises, tout était différent. La nature à sa façon leur livrait un merveilleux conte de fée. Poser ses yeux sur la toile en perpétuel mouvement était un moment de partage fabuleux. Prendre le temps de s’arrêter pour observer l’infiniment petit se mêlait à l’infiniment grand était juste parfait. Battis en pierre de schistes, les maisons aux murs épais étaient chapeautées d’un toit de lauze soutenus par de robustes charpentes. Solides gaillards, ils formaient un rempart lors des journées hivernales. Les venelles du village, abruptes et sinueuses conduisaient aux habitations. Autour, les mélèzes formaient un doux cocon.

La Chapelle sonna midi, les enfants se réunirent sous le préau. Ils voulaient en ce premier jour offrir à leur maîtresse un cadeau. Valentine attrapa la main de sa voisine Capucine, celle-ci saisit avec joie les doigts d’Éloi. Peu à peu, une ronde se forma. Les élèves étaient contents de l’effet de surprise. Ils commencèrent à chantonner à leur guise :

Dans les montagnes, nous nous amusons

Chaque jour nous chantons

Avec joie, nous rêvons

Et des comptines nous inventons.

Les enfants entonnaient le refrain en sautillant avec entrain. Julie se joint à eux, elle appréciait de les voir si heureux. Camille s’approcha d’elle, elle tenait dans ses bras une corbeille. Chaque jeune pouce avait choisi un présent. Valentine et Capucine avaient tricoté avec leur tantine une écharpe et des mitaines. David avait écrit un poème. Tony et Alexis avaient confectionné des brownies avec leur mamie. Les triplés avaient sollicité leur père pour fabriquer un solitaire. Éloi et sa petite sœur Coralie avaient façonné des bougies. Paul avait dessiné les sentiers qui menaient vers les sommets. Étienne et Caroline avaient avec le potier modelé une tasse pour le thé. Mikaël avait ramassé des brins de romarin et de thym dans le jardin. Océane et Bruno avaient préféré créer un herbier avec des fleurs des alpages. Tom avait choisit un pot de confiture aux mures. La dernière Camille avait mis une toute autre attention, un carton d’invitation pour le dîner dans sa maison. Julie sourit, les enfants l’avaient pourrie gâtée. Les rôles étaient inversés et si ce village lui réservait bien d’autres surprises.

Les jeunes gens se rendirent à la cantine, la cuisinière Maria et son commis Aristide les attendaient les bras ouverts. Eux aussi, pour l’occasion, avaient confectionné un repas d’exception. Julie s’installa à la table des grands sous le regard envieux des petits loups. De peur de faire des jaloux, elle prit sa chaise et s’assit entre les deux groupes. La maitresse rapprocha les deux tables. Ainsi la salle serait organisée pour permettre à tous de discuter. L’idée fut valider à l’unanimité. L’entrée servie, ouvrit les appétits. Les assiettes se vidèrent à la vitesse de la lumière. Comment résister à une part de pizza ? Le plat fit tout un tabac, les affamés se jetèrent sur le dessert une mousse au chocolat avec une langue de chat. Une fois les assiettes débarrassées, les couverts barbotèrent dans la bassine et les verres s’empilèrent. Valentine avec son éponge faisait la maline. Aujourd’hui avec Éloi et Étienne, ils étaient de service et mettaient au supplice les taches récidivistes. Les déchets rejoignirent le poulailler où Dame Roussette attendaient ces mignardises avec gourmandise. Les jeunes ramassaient les œufs qui serviraient pour la fabrication du prochain goûter. Leur camarade avait rejoint le coin récrée. Ainsi l’après-midi débutait sous le regard attentif de Julie.