Se réveiller dans un Nouveau Monde

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Ils avaient marché pendant plusieurs heures et la a nuit était déjà avancée, il s'agissait maintenant de monter le camp ou de trouver un abri. La nuit était fraîche mais le ciel dégagé et Peter avisa qu'ils n'avaient pas à risquer de trouver un abri et qu'ils pourraient coucher à la belle étoile à condition d'être vigilant. Ils avaient croisé quelques « gourmands » en venant jusqu'ici mais leur itinéraire les avaient préservé des groupes plus dangereux. Peter et Jack connaissaient bien le chemin pour l'avoir emprunté régulièrement avant tout ça et ils choisirent d'emprunter les bords de Loire au lieu de traverser le bourg de Thouaré ou la nationale par Belle-étoile. Peter n'avait pas été si tranquille depuis des mois. Il s'attendait à être bouleversé par le changement et la tristesse d'un monde vide de monde mais rien de tout cela. En passant devant les usines toujours aussi neuves, le même soleil plein d'espoir. En traversant la bourgade de Mauves il remarqua que la ville avait toujours eu la même apparence triste et grise à quelques exceptions prêt. C'étaient les bords de Loire où ils installèrent leur campement et construisirent leur feu qui l'émerveillaient maintenant. Il n'était jamais venu de nuit à cet endroit et il fut immédiatement choqué par la beauté de ces jardins secrets. Le manque de la trace humaine ne se faisait pas ressentir et au contraire nourrissait son sentiment de liberté. Il se rappela ses rêves d'Ouest et se promis d'apprendre à naviguer et de traverser l'Océan pour camper dans la nuit américaine sauvage. Son sentiment de force retrouvée s'était vite dissipé pour faire place à un constat difficile. Il n'avait pas fait de vrai sport depuis des mois et se nourrissant du peu qu'il trouvait, il était maintenant affaibli. Il l'avait remarqué à la fatigue qu'il ressentait à marcher sous la chaleur suintante qui lui collait au corps et l'aurait autrefois fait sourire et au temps qu'il lui avait fallu pour se contenter d'abattre seulement un « glouton » isolé. « Nous devrions décider d'un tour de garde. » Jack acquiesça, il redevenait le cow-boy d'autrefois.

« -Je prends le premier, je n'arriverais pas à dormir de toute façon.

-Je ne pourrais pas dormir tout de suite non plus, la nuit est trop belle.

-Oui c'est vrai. »

 Il s'assirent autour du feu sur leur sacs de couchage. La Loire, souveraine et prestigieuse, les attirait mais ils savaient qu'il était déraisonnable de se baigner la première nuit sans savoir les dangers qu'elle pourrait apporter. Peter jura intérieurement de ne pas posséder un harmonica, l'atmosphère était trop épique. Ils étaient deux vagabonds errants comme au temps d'autrefois. Il pensa sortir son livre et se rappela soudain l'existence de son téléphone et de son enceinte, chargés spécialement avant le départ. Hurt de Jonnhy Cash conviendrait parfaitement, suivi du Clair de Lune de Debussy et de Where is my mind de Pixies. Fier de son programme musical, Peter s'en remit à la fatalité pour décider des chansons suivantes.

Sourire aux lèvres et sourcils levés, Jack déclara :

« -Eh ! Et si je sortais la bouteille ?

-Yem yem yem ! »

Il était de retour ! L'effet de la prodigieuse onomatopée, expression avérée de Peter fut immédiat sur les deux compagnons qui se retrouvèrent submergés de bonheur.

Jack avala virilement une gorgée et tendis la bouteille à son ami :

« -Saint Emilion. Grand cru 2015 aux notes Automnales et parfumées ! C'était une bonne année ? Il souriait, moqueur des anciennes traditions.

-Aucune idée. Je ne me rappelle plus vraiment de ce qu'on me racontait là-dessus dans les vignes. -Ça remonte à loin. C'était l'époque des nuits glorieuses et des pintes douces amères. Trois écrivains. »

Il y eu un moment de silence. Trois écrivains. C'est ce qu'il avait dit. Des milliers de souvenirs lui revinrent en mémoire en un instant, réminiscences d'une vie qu'il croyait ne pas avoir vécue.

« -Tu crois que c'est pour lui qu'on fait ça ? Le vent agitait les arbres qui semblaient grincer sous son poids. Pour nous faire pardonner ?

-Je suis sûr qu'il comprendra. La mine sombre de Peter confessait son doute ,et les yeux échappés de Jack, son inquiétude.

-Il te pardonnera peut-être, mais pas à moi. Tu as refusé de m'abandonner, c'est pour ça que tu ne l'as pas cherché. Mais c'est ma faute si nous sommes restés.

-Écoute mon vieux, Jenny est morte et puis il y a eu...

-C'est moi. Tout est de ma faute. »

Ils partagèrent un long regard triste, la compassion avait toujours régné sur l'âme de Peter et le courage sur celle de Jack, en ce moment chacun jouait sa pièce maîtresse. Ce n'était pas un affrontement, aucune lueur de conflit n'était discernable dans ce lien qu'ils partageaient. En réalité les yeux n'étaient que le couloir reliant leurs deux âmes, en cet instant ils triomphaient du solipsisme et mélangeaient leurs âmes. Peter se repris ensuite à repenser à la belle époque, quand lui, Jack et Will écumaient les bars enchaînant les discussions philosophiques et mêlant leurs rêves. Ils n'étaient qu'une seule et même âme difforme et le manque de Will avait torturé Peter pendant des années. Ils étaient maintenant à sa recherche en quête de retrouvailles et d'un pardon. La musique enchaîna sur leur chanson phare et ils se retrouvèrent à chanter King of the Road de Roger Miller en choeur, Peter pris le premier quart. Il réveilla Jack au bout de 4 heures et s'endormit, il était épuisé.

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