Chapitre 15

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D'accord ! Continuons alors l'exploration dans les catacombes déjà en cours.

Chapitre 16 – Les Voix du Passé

Le dédale des catacombes semblait ne jamais finir. On progressait à l’aveuglette, les murs suintants resserrant leur emprise autour de nous. L’humidité imprégnait l’air, chargée de cette odeur âcre de pierre pourrie et de moisissure ancienne.

Merde... Tout se ressemble ici... Kentin grogna en balayant les murs de sa lampe. Son faisceau tremblait un peu, incapable de percer l’obscurité au-delà de quelques mètres.
C’est un vrai labyrinthe, murmura Eloïse, sa voix réduite à un souffle inquiet. — Comment est-ce qu’on est censés retrouver quoi que ce soit ici ?
On continue, répliqua Mickey, les dents serrées. — Il n’y a pas d’autre option.

Il marchait devant, obstiné, chaque pas un défi lancé au vide glacial qui nous entourait. Sofia, elle, restait près de moi, jetant des regards nerveux par-dessus son épaule.

C’était comme si les murs nous observaient. Comme si chaque recoin dissimulait des yeux invisibles, attendant notre prochain faux pas. Mon souffle se faisait court, haché par l’angoisse qui me broyait la poitrine.

Et puis, il y avait ce murmure. Ce putain de murmure qui persistait. Sa voix. Celle de Jordan. Impossible de l’ignorer, impossible de croire que c’était mon imagination. Elle m’appelait, répétait mon nom avec cette insistance spectrale qui me glaçait le sang.

Finn ? me lança Kentin en me fixant d’un air inquiet. — T’as l’air... Livide.
Non... Non, c’est rien.

Un mensonge évident. Mais je n’allais pas lui avouer que j’entendais la voix d’un disparu. Il était déjà suffisamment paumé sans que je lui balance mes délires.

On marcha encore. Longtemps. Le temps semblait se distordre ici. On aurait tout aussi bien pu être là depuis des minutes ou des heures. Ma montre affichait une heure qui n’avait plus aucun sens.

Arrêtons-nous une minute, proposa Sofia. Sa voix se brisait presque, comme si elle était à bout de souffle. — Il faut qu’on réfléchisse. On fait que tourner en rond.
On avance, c’est tout. On trouvera quelque chose, je le sais, insista Mickey avec une rage fébrile.

Je voulais croire qu’il avait raison. Qu’il y avait un sens à tout ça. Mais cette foi aveugle me terrifiait.

Ça n’a pas de sens... Pourquoi on se souvient de rien ? murmura Eloïse, ses yeux glissant sur chaque ombre comme si elles allaient se jeter sur elle. — Et pourquoi ces souvenirs qui reviennent... Pourquoi maintenant ?
Parce qu’on est de retour ici, répondit Sofia, l’air abattu. — C’est comme si cet endroit essayait de nous forcer à nous rappeler.
C’est n’importe quoi, lâcha Kentin. — Vous devenez parano... Je veux dire, ouais, c’est flippant. Mais rien de tout ça n’est réel. C’est juste... Un vieux manoir et des catacombes qui devraient être scellées depuis longtemps.

Mais même lui n’y croyait pas vraiment. Ses yeux trahissaient son anxiété, ses mains serrées sur sa lampe torche au point d’en blanchir les jointures.

Un craquement résonna. Brutal. Venimeux.

On se retourna d’un seul coup, scrutant l’obscurité béante derrière nous. L’écho de ce son vibra dans ma cage thoracique, me figeant sur place.

Y a quelqu’un ?! cria Mickey, sa voix ricochant sur les murs comme un animal blessé.

Le silence retomba, étouffant. Oppressant.

Puis, ce fut comme si un voile se déchirait dans mon esprit. Une image. Claire. Précise.

Quatre ans plus tôt, on avançait dans ces mêmes catacombes, riant de l’absurdité de l’endroit. Jordan menait le groupe, sa voix moqueuse résonnant contre les parois. Il n’avait pas peur, lui. Il marchait en éclaireur, et nous le suivions sans poser de questions.

J’avais oublié ce passage. Comment est-ce que j’avais pu oublier ?

Vous vous souvenez ? ma voix trembla en prononçant ces mots.
De quoi ? demanda Sofia.

On était déjà là. On est passés par là, tous les six. On a continué à explorer malgré tout. Malgré les bruits. Malgré...

Je n’osai pas aller au bout de ma phrase. Parce que je savais ce qui venait ensuite. La perte. L’oubli. La culpabilité.

C’est pas possible... murmura Eloïse, son visage livide. — Pourquoi est-ce qu’on a oublié ? Pourquoi... Pourquoi est-ce que ça revient maintenant ?

Je ne trouvai pas les mots. Parce qu’ils n’existaient pas. Parce que cette folie rampante, elle ne faisait que s’amplifier.

Faut qu’on sorte d’ici, trancha Kentin. — Vous entendez ? On est ici depuis trop longtemps. On perd tous la tête.

Non ! hurla presque Mickey. — On continue ! On doit aller jusqu’au bout.

Mais je ne savais même plus ce que ça voulait dire, « aller jusqu’au bout ».

Et dans ce chaos d’ombres et de souvenirs, je sentis mes jambes céder sous moi. Une faiblesse soudaine. Comme si mon corps lui-même refusait d’avancer.

Je m’effondrai au sol, ma lampe roulant dans la poussière froide. L’obscurité m’enveloppa, et avant que je ne perde connaissance, j’entendis une dernière fois cette voix.

Finn... Tu m’as abandonné... Pourquoi ?

Puis ce fut le néant.

Le souvenir revenait à Finn comme un éclair dans l’obscurité, frappant son esprit avec une intensité qu’il n’avait pas anticipée. Le temps semblait se dilater, et chaque détail de ce moment refaisait surface, aussi vivace que si c'était aujourd’hui. Il était là, sous la trappe, entouré par la froideur de l’air, mais il n'était pas seul dans ses pensées. Le reste du groupe était là, les visages marqués par une tension palpable, tous trop conscients de ce qui allait se passer. Mais c’était l’histoire de Jordan, racontée ce jour-là, qui marquait le début de leur descente dans l'inconnu.

Jordan avait toujours été celui qui avait l’art de raconter des histoires captivantes, des récits qu’il façonnait avec une telle passion qu’ils étaient prêts à tout pour l'écouter. Ce jour-là, il avait décidé de leur raconter une histoire sur des esprits perdus dans les bois, sur des créatures invisibles qui n’étaient visibles que par leurs ombres difformes.

"Imaginez que vous êtes dans la forêt," avait-il dit d’une voix basse et presque envoûtante. "Vous marchez, et vous sentez que quelque chose vous suit. Ça vous prend aux tripes. C’est comme si vous pouviez entendre les bruits de quelque chose qui se cache derrière chaque arbre, derrière chaque ombre. Et ce n'est pas un simple animal. C'est... autre chose."

Les autres avaient écouté avec des yeux brillants, fascinés par cette façon de lier les éléments de son histoire à la réalité. Mais, au fur et à mesure que les mots de Jordan se mêlaient à l’air lourd de la pièce, une sensation étrange s’était installée. Finn avait remarqué que les bruits alentours étaient devenus plus insistants. C’était comme si la bâtisse elle-même commençait à réagir aux paroles de Jordan, comme si les murs tremblaient à l'unisson avec l'histoire racontée. Le froid dans l'air se faisait de plus en plus glacial, comme une présence invisible qui les encerclait.

Les ombres projetées par leurs lampes de poche dansaient sur les murs, créant des formes qui semblaient se mouvoir par elles-mêmes.

"Vous commencez à reculer," continuait Jordan, ses yeux fixant chacun d'eux avec une intensité déconcertante, comme s’il voulait que cette histoire prenne vie. "Parce que vous savez que, peu importe combien vous marchez vite, ces choses qui vous suivent ne s’arrêteront jamais. Elles veulent... elles veulent vous attraper."

C’était au moment où il prononça ces mots que tout changea.

Finn se souvenait du frisson qui l’avait parcouru à ce moment-là. La pièce était soudainement devenue plus sombre, comme si la lumière se réduisait à chaque respiration. Les grattements, ces bruits qui étaient d'abord discrets, étaient devenus un tapotement inquiétant, lointain, comme un doigt qui se glissait sur le sol pour approcher un silence sournois. C’était presque imperceptible au début, mais en y repensant, Finn savait que les autres l'avaient senti aussi. Ils avaient tous échangé un regard furtif, comme si quelque chose d'invisible les avait poussés à se lever en même temps, comme un instinct primitif qui leur soufflait de partir.

Ils s’étaient levés lentement, se reculant avec précaution, mais personne n’avait osé dire un mot. Le souffle de chacun était court, pressé, et c’était comme si l’air lui-même devenait plus épais. La panique s’était emparée d’eux sans qu'ils ne puissent comprendre pourquoi. Finn se souvenait du regard de Jordan, de l’étonnement dans ses yeux lorsqu’il avait continué à rester là, assis, tourné vers eux, inconscient du danger qui se rapprochait. Il avait été trop concentré sur son histoire, trop plongé dans l’instant pour voir ce qui se passait autour de lui.

Puis les ombres s’étaient mises en mouvement. C’était étrange. D’abord, ce n’était qu’une ombre, une forme qui s’étendait lentement du coin de la pièce. Mais rapidement, les formes s’étaient multipliées. Des ombres difformes, des silhouettes qui semblaient se déformer à mesure qu’elles s’approchaient de Jordan, avançant sans bruit, sans rien pour les ralentir. Finn avait reculé sans réfléchir, les yeux fixés sur ces ombres menaçantes, mais Jordan ne se voyait pas. Il était toujours là, immobile, comme si le danger invisible ne l’avait pas atteint, comme si la peur était une étrangère pour lui.

Et c’était à ce moment-là que la vraie peur s'était installée.

Personne n’avait osé crier. Ils étaient tous trop pétrifiés, trop accrochés à ce qui se passait. Le temps semblait s’être arrêté, suspendu dans l’air froid, tandis que les ombres avançaient toujours plus près de Jordan. Il ne les voyait pas. Ils savaient qu’ils ne pouvaient pas parler, qu’ils ne pouvaient pas l’avertir, alors ils étaient restés là, immobiles, reculant, leurs cœurs battant à toute vitesse.

Et finalement, après ce qui semblait être une éternité, l’un d’eux s’était aventuré à faire un pas en arrière. Puis un autre. C’était Mickey, si Finn se souvenait bien. Ils avaient tous suivi, lentement, mais sans bruit, jusqu’à ce qu’ils soient à une distance sécuritaire. Mais Jordan était toujours là, en plein centre de la pièce, la bouche entrouverte, les yeux fixes sur l’obscurité autour de lui, inconscient du danger.

Les ombres avaient disparu. Mais l’écho de cette expérience hantait encore leurs esprits.

Les larmes aux yeux, le groupe se souvenait maintenant de ce moment avec une douleur sourde. Ils se demandaient si tout cela n’était pas de leur faute, si leurs propres peurs et hésitations avaient joué un rôle dans ce qui était arrivé à Jordan. C’était cette culpabilité qui leur serrait la gorge maintenant, les empêchant de trouver une paix qu’ils n’avaient jamais connue depuis ce jour.

Sauf Mickey. Lui, il n’avait jamais pensé que c’était leur faute. Il n’avait jamais remis en question ce qu’il avait vu. Mais à présent, Finn se demandait, avec une angoisse grandissante, si tout cela n’était que le début d’une histoire qu’ils n’étaient pas prêts à comprendre.

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