La chasse
Des jours que je n'ai rien mangé. Mon ventre n'est plus qu'une boule douloureuse. Il faut débusquer une proie, n'importe quoi pour rassasier ma faim et celle de mes petits.
Ils sont moins alertes et moins joueurs. Leur énergie décline.
Je suis trop faible pour traîner une grosse carcasse, un petit animal fera l'affaire.
Le jour décline et la chaleur humide de la forêt devient plus supportable. C'est le moment idéal pour partir à la chasse.
Un cri au loin m'indique une proie potentielle. Je connais bien ces animaux. S'ils sont au sol, ce sera facile mais ils sont vifs et difficiles à approcher.
Un groupe de singes joue et se désaltère près de la rivière. Je les contourne en restant cachée par la végétation dense pour me mettre face à la douce brise du soir. Ma robe rayée et mes pas discrets assurent un camouflage parfait. Ces animaux sont nerveux et rapides. Je dois me rapprocher le plus possible avant de planter mes crocs dans leur chair. Ma meilleure arme est la surprise.
Mes yeux affûtés ciblent une mère dont le petit s'accroche fermement au ventre.
Elle sera plus lourde et déséquilibrée. Une proie moins agile et plus lente qui finira dans mon estomac.
Mon corps se ramasse sur lui même, le regard lié à ma cible. Mes muscles souples se bandent.
Pas trop vite, attendre le bon moment, ne pas se précipiter malgré l'appel incessant de mon ventre.
Tel un ressort, je bondis sur la femelle. Mes griffes se plantent dans son dos tandis que ma mâchoire se referme sur son cou. Un craquement signe l'arrêt de mort du singe.
Le petit est coincé sous la masse de sa mère alourdie par mon propre poids.
La bande de petits mammifères se dispersent dans un tumulte de cris stridents et de sauts.
Le goût délicieux du sang envahit ma bouche.
Ma patte s'est déplacée pour écraser la tête du jeune et l'empêcher de rejoindre son groupe. Mes crocs l'achèvent en brisant sa nuque. Deux proies pour le prix d'une. Ma journée n'est pas vaine.
Le goût métallique du sang et la promesse de cette viande attisent ma faim, mais il ne faut pas tarder et rejoindre mes petits pour manger en sécurité. Un de mes congénères pourrait décider de voler le fruit de mon labeur.
Je prends les bêtes mortes dans ma gueule et les traîne dans la cachette où mes jeunes dorment encore.
L'odeur du repas les réveille. Je leur laisse le petit à dépecer tandis que l'adulte calme ma faim.
La chair est bonne et nous redonne des forces. Le sang barbouille leur truffe que je lèche pour les nettoyer.
J'aime les voir plus alertes, plus joueurs et se chamailler. Bientôt, ils pourront m’aider à chasser, puis épris de liberté et de solitude, ils iront conquérir un nouveau territoire.
Annotations
Versions