Moi, Sarotia Darkheart, je suis perdue. Ashureas Curropted, la première femme qui a osé devenir nécromancienne doit se retourner dans sa tombe. Quel déshonneur !

Mes Squelettes Guerriers, Squelettes Mages, mon Golem et Abby, ma Mercenaire ne m'aident pas. Je leur donne la vie et ils sont à mon service pour anéantir les serviteur des Démons Originels. Je suis quelque part entre la Forêt de l'Araignée, le Grand Marais ou la Jungle de l'Ecorcheur. Mon bouclier d'os gravite autour de moi et m'assure une protection. Je n'ai pas trouvé le Portail et je n'ai plus de Parchemins de Porte de Ville. Cette forêt est immense, et il n'y a aucun repère. Seuls les cadavres laissés sur notre chemin indiquent que je suis déjà passée par là.

Je me renforgne. J'ai fini deux actes, j'ai réussi à vaincre Andarielle et Duriel. Et je suis perdue. Mon sac est lourd, il est rempli de potions de vie, de mana et d'objets précieux que je pourrais utiliser après que Deckard Cain les aura identifiés ou les revendre au plus offrant. Heureusement que j'utilise la mana pour attaquer, sinon ma lame serait tellement emoussée qu'elle en serait inutilisable. Heureusement que je peux compter sur Hartli. Ormus saura me soigner si je me fait attaquer. Pour l'instant, savoir à qui m'adresser en ville est le cadet de mes soucis. J'oeuvre pour la Lumière et tout le monde compte sur moi, or je suis perdue.

A quelques mètres, le chemin est remplacé par les arbres, sans doute un virage. A ma droite, l'immonde rivière coule et me coupe de la route, bien qu'il y ait un tronc d'arbre qui fasse office de pont. Je ne veux pas prendre le risque d'affronter une embuscade au détour du passage. Ces teignes de minis cannibales tapent fort et sont très nombreux. Si ça tourne mal je serais incapable de m'échapper et rentrer au Quai de Kurast. Des Cadavres Noyés traversent le pont de fortune, agressifs. Abby déambule, son arc prêt à l'usage. La corde s'effile, il faudra que je lui achète un meilleur équipement. Elle tire de ses flèches gelantes et mes douze Squelettes se préparent à l'affrontement alors que mon Golem est déjà passé à l'offensive de son corps puissant. Mon arme en avant, je passe en revue les malédictions et autres sorts que je peux infliger.

Dame de Fer n'est pas très utile car les revenants sont relativement faibles et les dégâts sont minimes. Mon Golem passe à l'attaque et je lance Lance d'Os sur le premier adversaire. Ma Mercenaire en abat un à force de tirer dessus. Les Squelettes Mages gardent leurs positions et libèrent leurs sort de poison, feu, froid ou encore foudre. Les Squelettes Guerriers en tuent trois avec leurs sabres. Dans quelques minutes, ceux que je cible seront morts. Le combat est preque fini, je le sens. Malgré la fragilité des monstres, ils me détruisent un Squelette, à la dernière seconde. J'utilise un sort de réanimation sur un cadavre pour invoquer un nouveau Squelette. Je pille les autres corps à terre ; or, bouclier rare, casque magique et potion de gaz de strangulation. Je consomme une potion de Mana pour être à bloc en cas de nouvelle attaque. Comme j'ai passé l'autre rive, j'apperçois deux piliers de pierre sculptée.

Finalement, il faut absolument que je suive le chemin, peu importe s'il y a une embuscade car il y a une chance que je trouve un Portail : retour à la maison. Au pire, je trouverais peut être un Parchemin de Porte de Ville qui me téléportera à Kurast. Je reviens donc sur mes pas. Mes cheveux blancs et mon teint cireux, dû à ces années enfermée à étudier, contraste avec le vert uniforme des alentours. Tout est vert, même l'eau et les troncs sont recouverts de mousse.

J'avance à pas prudents dans mes bottines noires. Mon Golem est devant ses énormes et forts poings en garde. Nous sommes entre les deux piliers. Je matériatise un Mur d'Os mais il n'y a personne. Un sentiment d'incompréhension tord mon cerveau, protégé par un casque en métal. Les piliers indiquent soit un Portail, un changement de lieu, une fausse piste qui est source d'expérience et de combat. Peut importe ce que cela signifie, il y a toujours des monstres à éliminer. A tout instant, je m'attends à voir surgir des Colosses, des Cannibales, des Cadavres Noyés ou encore des Créatures des Marais. Mais, rien, personne. Un cul-de-sac, sans raison, sans lien avec une quelconque quête. Etrange. Il semble avoir un mur couvert d'une plante grimpante. Mon bouclier violet d'une main et ma baguette de l'autre, je repousse la plante. Je suis une nécromancienne-magicienne, pas guerrière. J'ai choisi la baguette en os à la dague empoisonnée et je n'en suis pas moins redoutable.

Je ne dois pas craindre les attaques, or face au bois entouré des pierres au mur, je me sens mal. Une porte, tel est la chose qui se dresse devant mes yeux noirs. La Ville de Kurast est encore infesté par les démons et je suis loin d'y arriver alors je ne peux pas me trouver devant ses portes. De plus, cela fait bien longtemps qu'il n'y en a plus, de portes. C'est une anomalie, un piège. Le bois est pur, presque doré. Comme mon teint pâle, il détonne parmi la jungle fétide. Elle est grande et massive. La poignée est bien ouvragée et brille comme de l'or. De tous mes compagnons je suis la seule à pouvoir la toucher, comme tout dans cet univers, mis a part les monstres à combattre. Le mur qui l'entoure est fait des pierres tristes, tantôt d'un gris foncé, tantôt d'un gris clair. Toutes taillée à la perfection. Je sue dans mes gants de cuir brun. Comme l'arc usé d'Abby, il faudra que je les change. J'en acheterais à Ormus. Il faut que je me concentre sur le présent. Bon, je suis perdue, sans moyen de rentrer chez moi. Je suis accompagnée et armée bien que j'ai un équipement bientôt étheré. Les Quais de Kurast sont le seul endroit humain qui résiste à l'armée de Méphisto. Et en prime, je suis devant une porte qui ne devrait pas exister. Je la touche, la sens, la voit ; elle est vraiment là. Etrange qui plus est, elle est sans surveillance. Personne à occir pour y accéder, juste cachée par la végétation. J'aurais préféré tomber sur un Portail. J'ouvre ? Je n'ouvre pas ? Je pese le pour et le contre :

Le pour : Je suis armée, opérationnelle en magie et vaillamment protégée ainsi que la faible (très faible) hypothèse que cette porte soit un passage qui me conduise chez moi.

Le contre : j'ignore ce qu'il peut y avoir derrière (pas terrible, j'ignore tout de cette jungle et des étapes qui me mèneront au premier Frère : Méphisto). Mon équipement et celui d'Abby n'est pas en état pour un énième affrontement.

Si je meurs, tout est fichu. J'inspire très fort et mon armure me pèse en cet instant de choix et de doute. Je passe mes doigts sur mes bagues magiques et sur mon amulette. Allez, courage. C'est la première fois que je me souhaite du courage. J'appuie. Une lumière intense, aussi dorée que la porte d'où elle sort m'envahit, englobe tout et me rend aveugle. Est-ce la mort ? Est-ce une question que peut se poser une nécromancienne ? J'entends des os cliqueter. Je n'ai pas peur de la mort, c'est elle qui me craint car je lui ravit des proies. Les Barbares, les Amazones, les Druides, les Assassins les Ensorceleuses et les Paladins craignent mon peuple et ses méthodes occultes. Pourtant, nous oeuvrons tous pour un même but ; vaincre le Mal. Le temps s'étire et me laisse avec mes pensées, sombres pour la plupart. Quand je recouvre la vue, je suis dans la forêt, debout. Alors que je me fais la réflèxion que rien a changé, je reconnais quelque chose : miracle dans ce lieu hostile. Des docks. Les docks du Quai de Kurast. Je me retourne et vois ma troupe au complet. Aucune trace de porte. Je m'en fiche, je suis chez les miens.

Pour la première fois de ma vie, comme pour "courage", je prononce un mot. Je ne sais pas à qui je le dit mais c'est pas grave. Merci.