Chapitre 1: Une lettre.
"Quand j'étais petit, ma mère m'a dit que le bonheur était la clé de la vie. Quand je suis allé à l'école, ils m'ont demandé ce que je voulais être quand je serai grand. J'ai répondu heureux. Ils m'ont dit que je n'avais pas compris la question. J'ai répondu qu'ils n'avaient pas compris la vie"
- John Lennon.
— Je ne sais pas quoi faire de ma vie, vous savez. Je suis une jeune fille brillante à qui on destine un grand avenir, de grandes études... Pourtant, au fond, j'ignore si tout ceci m'intéresse. J'aspire à une chose : avoir une grande famille. Ensuite le reste m'importe peu.
— Mademoiselle Black, vous êtes en terminale. Dans moins de six mois, vous allez entrer dans une quelconque licence. Il faudrait que vous ayez au moins une idée sur vos goûts. Que comptez-vous faire?
— Puisque je vous dis que je n'en ai aucune idée, monsieur, soupira Maëlys Black, une élève en année de terminale ES.
Elle prit son sac en main et se leva. L'homme assit en face d'elle se redressa soudainement, et cria, exaspéré par son comportement.
— Mademoiselle, je ne crois pas avoir dis que l'entretien était terminé.
— Qu'avez-vous à me dire en plus si ce n'est que je suis une personne irresponsable ? Je ne sais pas et c'est malheureusement ainsi.
— Mais..., intervint l'homme d'une voix surprise et sèche à la fois.
— Au revoir, monsieur Mark.
Maëlys sortit de la salle, attristée par cette entrevue. Celle-ci lui a servi seulement à lui rappeler qu'elle était une bonne à rien. Tout le monde avait une idée sur ce qu'il aimerait faire, sauf elle. La jeune adolescente entendit un cri hystérique et redressa la tête. Elle fit un pâle sourire en voyant son petit ami, James Bown. Il l'attrapa dans ses bras et l'embrassa fougueusement. Les joues de Maëlys devinrent subitement rosée et elle balbutia.
— James ? Je croyais que tu avais cours de littérature anglaise ?
— Et toi la matière la plus ennuyante au monde : mathématiques, lui rétorqua l'homme.
— C'était prévu mais le proviseur m'a convoqué pour l'orientation.
— Oh, répondit seulement son interlocuteur.
Elle sourit tristement. Elle remonta son sac sur son épaule et lui répondit.
— Je dois rentrer chez moi. Ma mère m'a laissé un message me disant de venir de toute urgence à la maison.
— Elle qui n'aime pas que tu sèches... Ça doit réellement être important.
— Ouais, je crois que cela concerne mon père, j'ai rêvé de ça cette nuit, murmura Maëlys.
Elle embrassa furtivement son copain et partit aussitôt. Elle sortit de l'établissement et se rendit chez elle en bus. Une vingtaine de minutes plus tard, elle posa son sac à l'entrée et cria.
— Je suis là !
— Dans le salon, ma chérie, répondit une voix fluette.
La lycéenne alla dans la pièce et s'affala sur le canapé. Elle bailla effrontément et dit d'une voix endormie.
— Alors, que me voulais-tu?
Elle attendit une réponse, en vain. Elle se frotta les yeux et fixa sa mère. Ce qu'elle vit la bouleversa: sa mère était assise par terre, devant la cheminée. Elle tenait dans ses mains plusieurs lettres qu'elle semblait hésiter à jeter dans les flammes. Elle tourna sa tête en direction de sa fille. Celle-ci put observer son visage strié de larmes. Maëlys se précipita à ses côtés et la prit dans ses bras.
— Que se passe-t-il, maman?
Laure, la mère, baissa la tête en direction des papiers. Sa fille les prit avec délicatesse et les lit aussitôt, comprenant que la source des problèmes provenait de ça.
Jacques de Lguad. Laure Black.
Palais d'Astramo. 13 chemin de la Source.
33 000 Bordeaux.
Objet: Enlèvement de la fille héritière au trône.
Palais d'Astramo, le 2 janvier 2034.
Madame,
Lors de la nuit du 21 avril 2016, le roi d'Astramo, Max d'Astramo, a signalé l'absence de deux personnes: Maëlys du même nom ainsi que la fiancée de monsieur et mère de l'enfant, Laure Black.
Après plusieurs mois de recherches, nous avons déduis que la disparition de la princesse était due à un enlèvement de la part de sa propre mère. Dix huit longues années sont passées et nous avons enfin retrouvé votre trace. Nous vous informons que votre acte est un acte violant les règles qui régissent le royaume de votre ex-fiancé. De ce fait, le roi Max d'Astramo viendra le lundi 10 janvier à 10h du matin. Nous exigeons votre présence ainsi que celle de l'héritière au trône.
Dans l'attente de vous rencontrer prochainement, veuillez recevoir, madame, l'assurance de ma considération distinguée.
Jacques de Lguad.
Maëlys reposa la lettre, les sourcils froncés. Sa mère l'observait à la dérobée, appréhendant sa réaction. La jeune femme prit la parole après quelques temps de réflexion.
— Donc mon père m'a retrouvé.
— Oui, répondit seulement Laure avec un ton hésitant.
— Je vois.
La princesse connaissait cette histoire. Quelques années auparavant, sa mère lui avait raconté afin de répondre à ses questions.
***
Flashback.
Maëlys était rentrée chez elle en larmes. Ses amies s'étaient encore moquées d'elle: elle n'avait pas de papa, comme elles. Son père ne l'aimait donc pas pour l'avoir abandonnée ? Peut-être était-elle moche ?
La petite fille s'était cachée sous ses draps et pleurait de toutes les larmes de son petit corps frêle. La porte de sa chambre s'était ouverte lentement et quelques secondes après, son lit s'était affaissé. C'était sa mère. Elle avait posé tendrement sa main sur son dos et murmura.
— Il s'agit encore des filles de ton école?
Maëlys avait hoché la tête sous sa couverture en guise de réponse. Laura poussa un profond soupir.
- Je vais t'expliquer pourquoi toi, ton papa n'est pas présent.
La fillette sortit de sa cachette et observa le visage pâle de sa mère. Elle l'observa de ses grands yeux bleu glace. Laure fit un petit sourire.
— Tu ressembles tant à ton père, tu sais. Tu as ses beaux yeux, ainsi que la même couleur de cheveux... Tu sais, il t'aime énormément.
— Pourquoi n'est-il pas avec nous?, l'interrogea Maëlys.
Laure soupira à nouveau.
— Tu sais... C'est moi qui ai choisi cela. Je me suis enfuie avec toi peu de temps après ta naissance.
— Pourquoi?
— Je le devais, répondit-elle tristement. Je te dirai un jour pourquoi...
Maëlys avait hoché la tête à nouveau. Néanmoins, cette fois-ci, elle avait un grand sourire. L'idée que son père ne l'avait pas abandonné l'avait grandement soulagé. Il l'aimait même s'il ne la connaissait pas.
Fin du flashback.
***
Laure rassembla les papiers. Maëlys l'aida aussitôt et lui demanda une fois après avoir tout mis ensemble.
— Comment se fait-il qu'il n'ait pas réussi avant?
— La vieille femme avait masqué notre présence. Je suppose que quelqu'un nous a trahi, lui répondit-t-elle les traits tirés.
Maëlys pensa à James. Lui aussi était d'originaire d'Astramo selon sa mère. Se pourrait-il...? Non, elle n'osait y penser! Cela devait être la vieille femme qui avait failli à sa tâche. Cette personne était quelqu'un d'assez mystérieux. Elle s'occupait de la maison et était, par ailleurs, une amie proche de Laure. Elle l'avait aidé durant la nuit du vingt-et-un avril, quelques heures seulement après sa naissance. Elle ne l'avait vu que très peu de fois. Celle-ci l'avait aidé à se fier à ses pressentiments.
Laure alla ranger les papiers et s'installa dans le canapé. Sa fille l'avait rejoint, les pieds traînant. Elle allait rencontrer son père. Elle était mitigée entre la joie et l'inquiétude. Qu'allait-il faire à sa mère? Après tout, toutes deux avaient disparues sans rien dire. Il avait dû être mort d'inquiétude. Comme si elle lisait dans ses pensées, Laure murmura.
— Je m'en suis voulue de t'avoir prise ainsi... Max a dû être très inquiet. Je n'ai même pas eu le temps de lui laisser une lettre afin de lui expliquer pourquoi.
— Vas-tu me révéler pourquoi tu as fais ça?
— Pas maintenant, c'est trop tôt.
Laure coupa court à la discussion, sous le regard scandalisé de sa fille. Celle-ci se leva et se rendit directement dans sa chambre. Elle en avait assez de vivre dans des secrets. Pourquoi ne lui révélait-on jamais la vérité? Elle attendait que ça après tout!
Elle prit son téléphone et envoya un message à James afin de lui raconter la discussion qu'elle venait d'avoir avec sa mère. Peu de temps après qu'elle l'eût envoyé, elle reçut un appel.
— Allô?, dit-elle en décrochant, le sourire aux lèvres.
— Comment te sens-tu?, lui demanda-t-il d'une voix inquiète.
— Étrangement, ça va plutôt bien. Je ne m'attendais pas à apprendre que j'allais rencontrer mon père ainsi, certes, mais je vais pouvoir enfin vérifier si je lui ressemble tant que ça!
— Je peux te certifier que si...
Maëlys resta silencieuse. Elle oubliait souvent que James était d'Astramo. Cela l'agaçait fortement par ailleurs. Il avait déjà rencontré son père et pas elle. La vie était si injuste!
— J'ai quelque chose à t'annoncer par ailleurs..., ajouta James, la voix tremblante.
La princesse était ailleurs. Elle n'avait pas entendu sa phrase. Soudain, elle se rappela d'un détail. Un détail aux conséquences assez dramatiques. Elle bondit sur ses jambes.
— Je te rappelle plus tard, James, j'ai oublié quelque chose!, s'écria Maëlys. A toute à l'heure, mon cœur!
La jeune femme raccrocha et se précipita hors de sa chambre. Elle devait parler à sa mère, et vite!
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