#DéfiMoiEnVrai
Le reflet dans le miroir ce matin était une énigme familière. Des yeux fatigués, cernés d'une nuit agitée dont je ne saurais plus raconter le rêve. Des cheveux en bataille, témoignage silencieux d'une pensée tourbillonnante avant de sombrer dans le sommeil. C'est elle, cette silhouette que je croise chaque jour, dans le hall de l'immeuble, sur l'écran de mon téléphone en mode selfie, dans la vitre d'un bus qui freine brusquement. Une présence constante, presque un fantôme que j'habite sans jamais vraiment la regarder.
Aujourd'hui, l'envie de raconter s'est immiscée, ténue mais persistante, comme un rayon de soleil perçant les nuages. Raconter quoi, au juste ? Pas une épopée, pas une aventure extraordinaire. Juste un instant. Celui où, en préparant mon café, la vapeur chaude a embrumé la vitre et, instinctivement, j'y ai tracé un cœur du bout du doigt. Un geste simple, presque enfantin, un écho d'une émotion que je croyais enfouie sous les couches de la routine.
Dans ce cœur éphémère, dessiné sur la buée, j'ai entrevu une parcelle de cette personne que je ne regarde jamais. Une part vulnérable, capable d'un élan de tendresse spontanée, même dans la solitude matinale. Ce n'était pas l'image que je projette souvent, celle de la personne pressée, efficace, parfois un peu cynique. C'était autre chose. Une fragilité douce, une soif secrète d'affection, tapie dans l'ombre de mes certitudes.
Le cœur sur la vitre a disparu avec la condensation. Mais l'image, elle, est restée. Un instant bref, une scène banale, un reflet fugace. Peut-être que pour se connaître vraiment, il suffit parfois de s'arrêter un instant, de laisser la buée se former et d'oser dessiner un cœur. C'est ça, aujourd'hui, mon envie de raconter. Une simple fenêtre ouverte sur cette personne que je croise chaque jour, et que, peut-être, je commence enfin à regarder.