Une machine de guerre
Celeste est un démon, un monstre. Sa brutalité n’a d’égal que sa solitude et le sang ne coule plus sur ses mains, il les tache. Son arme, un espadon aussi haut qu’elle, le double tranchant, taillé dans la pierre noire du château, large comme une main. Hiver après hiver, son entrainement acharné, inhumain presque, seule dans la cour de l’Åkvardem, fort des Protecteurs, elle est devenue une guerrière si crainte que même ses pairs n’osent pas l’approcher. Os brisés, articulations démises étaient le lot de ses adversaires en duels.
Et lorsqu’une expédition meurtrière contre les kargals, créatures ailées dévoreuses d’hommes, est entreprise pour en éradiquer un peu plus l’espèce, Celeste se transforme en un animal plus terrible encore. Redoutée par les kargals eux-mêmes.
Elle ne tue pas les kargals, elle les écharpe, les dépèce. D’un animal aux couleurs de neige haut comme deux hommes, il ne reste que du sang et des morceaux épars.
Si nombre de protecteurs sont morts au cours de tous ces hivers d’expéditions, il est dit que Celeste n’aurait jamais perdu une goutte de sang.
Haïs par ses pairs, crainte par tout être vivant, ce qui rend Celeste authentiquement fascinante, est sa peur. Une terreur qui lui ronge les boyaux, lui comprime les poumons, à tel poing qu’elle a préféré se noyer dans le sang plutôt que d’affronter ses démons. Aimer. Mais surtout, perdre.
Jusqu’au jour où une main lui sera tendue. Une main qu’elle attrapera avec courage, la transformant en l’invincible guerrière douce et silencieuse qu’elle aurait dû devenir.
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