E. M. I. Sphère

7 minutes de lecture

Je me suis toujours demandé ce que je m'empresserais d’emporter avec moi si je devais m’échouer, seule sur une île ou me faire enlever par des extraterrestres. -Rire-

Pas toi ?

Une chose est sûre, je prendrais de la musique...certainement deux trois bouquins et mon smartphone au cas où...

C’est ce à quoi je rêvasse allongée sur mon lit, ce soir-là.

Étant plus rapide, j’ai pour habitude chaque soir de méditer à des questions existentielles pour provoquer mes rêves, pendant que ma soeur répète son petit rituel d’avant coucher: choisir un pyjama différent de la veille “parce que c’est trop ringard de porter deux fois d’affilée la même tenue, Silver ^^” ; se brosser les dents pendant 3 minutes ; passer 4 coup de brosse dans ses cheveux crépus bien que cela ne fasse aucune différence et vérifier que la porte est bien fermée à double tour.

Elle a toujours été peureuse et moi plus effrontée malgré le fait que je sois un peu parano sur les bords. Dès qu’elle a le dos tourné, je passe derrière elle pour tout vérifier ; mais chuuuut, ça il ne faut pas le lui dire. Ah oui, je ne vous ai pas dit, Swann et moi sommes jumelles.

Quoiqu’il en soit, nous sommes allongées dans nos lits respectifs ; Swann dans une de ses positions acrobatiques à faire sa pipelette au sujet de son dernier crush et moi l'écoutant à peine, sur le dos, fabriquant mon futur rêve, la basse musicale de mon artiste du moment grondant dans mes écouteurs...
Lorsque soudain, je sens une odeur de fumée se rapprocher.

Ni une ni deux, je saute sur pieds et sors de notre chambre pour faire le tour de l’appartement mais rien. J’ouvre la porte menant au palier et constate que tout le couloir empeste la fumée mais silence radio, aucun habitant de l’immeuble n’a l’air de s’en soucier. Ça doit encore être le voisin du dessus qui s’en grille un ^^. Je ne sais pas ce qui lui arrive, il s’est soudainement mis à fumer et à nous enfumer par la même occasion. Je retourne expliquer cela à ma sœur et de retour dans ma chambre je la retrouve sur la pointe de ses pieds nus, le haut du corps par-dessus la fenêtre me criant de venir car quelque chose prend apparemment feu à même notre trottoir. Bien que le trou soit à peine de la taille d’une brique, du tabac n’aurait pas fait autant de dégât. Nous décidons donc de descendre inspecter les lieux et appeler les pompiers. Visiblement, il n’y a vraiment que nous que l’odeur de fumée dérange parce que tous les habitants ont l’air de dormir à poings fermés. Une fois dehors et à peine le numéro des pompiers composé, voilà que deux d'entre eux surgissent de nulle part. L’un nous met sur le côté pour nous questionner pendant que l'autre éteint le mini incendie. Ils nous expliquent qu’ils doivent évacuer tout le quartier et nous ordonnent de courir vers une certaine direction jusqu'à croiser leurs collègues qui nous donneront plus d’indications. Swann et moi nous retrouvons à courir en pyjama en pleine nuit, sous une température à peine printanière, dans notre quartier populaire pourtant bruyant d’habitude mais là pas un chat ne miaule. Deux minutes plus tard, nous apercevons enfin une espèce de filet de sécurité jaune, posé là à la hâte, délimitant un périmètre apparement assez large pour faire le tour du quartier, de chez nous à la Place de la Justice. Là où nous devrions voir l'éclipse demain soir, maintenant que j’y repense. Ma sœur me jette un regard perplexe et je devine à ses yeux l’inquiétude qui commence à monter en elle. Toujours aucune trace de collègues ; nous continuons donc à remontrer le petit chemin pentu menant à cette place que nous ne devions retrouver que le lendemain.

Ma soeur et moi sommes passionnées d’astronomie ; alors lorsque nous avons vu cette annonce dans le journal du quartier, disant qu’un évènement sur inscription serait organisé, matériel mis à notre disposition pour pouvoir profiter pleinement de l'éclipse et échanger sur notre passion commune autour d’une boisson chaude, nous avions immédiatement sauté sur l’occasion !

Je me questionne sur la coïncidence de ces deux évènements en marchant lorsque je ne ressens plus la présence de Swann…

Elle est debout à quelques mètres au devant comme intriguée par une certaine chose.
Et plus je me rapproche d’elle, plus je prends conscience que l’odeur de fumée s’estompe ainsi que le froid. Au bout de la pente, la Place de la Justice nous permet de voir un horizon qui a toujours été mon lieu préféré de méditation depuis petite ou lorsque ma sœur et moi nous disputons. Je viens de comprendre ; elle regarde des ombres, d'innombrables ombres avançant paisiblement comme une seule et même personne. Un petit groupe de gens s'agglutine autour d’une lumière.

À mesure que nous nous approchons de la petite foule qui commence à se raidir autour de ce je ne sais quoi, c'est comme si ma sœur et moi étions aimantées autant l’une à l’autre qu’au sol. Forcées de constater qu'à présent nous ne marchions plus volontairement vers cette unique lumière dans la pénombre mais qu'une espèce d'énergie magnétique nous attirait tout bonnement vers le même endroit. Swann et moi nous rendons compte à cet instant précis, nous serrant la main l'une dans l'autre au point de s'en désarticuler les poignets ; que quelque chose qui nous dépasse est en train de se produire actuellement. Car, face à nous, clairement, distinctement à découvert et "À HAUTEUR DE NOTRE CORPS”,

se trouve : La lune !

Nous nous lançons un regard furtif, interrogateur et plein de désarroi.

  • “ Silver ??!!!! Silver, dis moi que je rêve, dis moi que je suis dans mon lit accolé au tien, et que je fais un rêve un peu trop SF pour moi steuplé !!! Parce que...mais bordel.... qu’est-ce que la lune en éclipse fout en plein devant nos yeux carrément au niveau de notre corps ??!! "
  • “ Silver? Je la secoue encore, SILVERRR ???? "

La Lune est belle, ronde, si grande et attractive. Même si nous ne pouvons plus communiquer par l’usage de la parole tellement cette force est puissante , je sais que nos regards se comprennent et que ma sœur vit les choses exactement comme moi.

À peine le temps de me rendre compte que Silver est dans le même état de zombification que tous les autres, que moi aussi je commence à me sentir partir. Je revois ce couple qui était à notre gauche et ce groupe d’amis entre nous, se déplacer limite en lévitant à cinq centimètre du sol vers ce cercle lunaire, cette sphère dont la seule imperfection est le futur passage par lequel nous allons comme être aspirés avant de laisser ce vide derrière nous. J’ai peur, je ne me rendais pas compte que Silver et moi nous tenions toujours la main tellement j’ai l’impression de ne communiquer que par la pensée. C’est une sensation assez étrange. Comme si tout mon corps était mort, comme si j'avais perdu toute forme de vie et que seules mes capacités mentales me maintenaient en veille. J’ai l’impression de planer, d’être droguée à l'atmosphère. Nous voici tous complètement enveloppés, envoutés, enlevés et transportés par une force gravitationnelle vers un autre monde à l’aide d’une Lune qui ne devait se présenter à nous, de la sorte, que le lendemain.

De l’autre côté c’est ineffable, indicible. Il y fait une douceur incomparable aux coucher de soleil estival sur Terre. Nos sens y sont pures, nets et précis. La lumière se réfléchit sur notre peau et la rend reluisante de beauté. Et nous, nous, c’est comme si nous étions soudainement pris d’une clairvoyance extrême et d’un état d'apaisement tel que nous pourrions nous enticher de tout. Bien qu’il n’y ait rien à proprement parler devant nous ;

chaque chose nous paraît fascinante. Nous sommes tous absorbés par ce que nous ne pourrions voir de nos yeux terrestres. Sans aller jusqu’à nous deviner respectivement...nos flash personnels sont d’une immensité indescriptible mais les regards que nous échangeons entre chacun de nos mouvements nous permettent d’une certaine façon de nous comprendre. Faisant les cent pas, entre mon voyage et mes découvertes, je fais connaissance à distance, avec la foule dans laquelle Silver et moi nous sommes perdues quelques minutes auparavant. Le temps paraît éternel mais en réalité quelques minutes à peine sont passées.

D’un coup une voix surgit, comme un grand echo inaudible et évident à la fois :

“ Pim Pow Paw paw Pow- le choix est entre vos mains les filles " ; TaTa...Ta...Ta..Titi- titi- ti- ti.

  • “ On les perd, on les perd, elles ne veulent pas se lâcher les mains, il y en a une qui entraîne l’autre ; " Ti...ti….tiiiii...ti.
  • “ Augmentez les décharges non de Dieu; on ne peut pas les perdre, c’était les moins exposées !! "

Pim Pow Paw paw Pow- il est temps de prendre une décision les enfants. "

  • “ Laisse moi poursuivre le voyage, toi tu dois y retourner pour témoigner ; "

ti… ti... tiiiiiiiiiiiiiiiiiiit/ Ta- ta-ta- toum-ta-toum-ta-toum

  • “ Non NOOOOOON, nous aurions dû prendre le risque de les sortir de cette chambre malgré l’incendie extérieur ! ”
  • “ Calme toi, c’était l’endroit le plus safe au vu de la situation, nous n'aurions rien pu faire, sa sœur avait déjà trop de fumée dans le corps à notre arrivée; arrêt cardiaque à 01:38. "

Deux jours plus tard - groupe de parole du quartier sur la Place de la Justice :

  • “Bonjour, je m’appelle Swann, j’ai 19 ans ; j’ai ...enfin j’avais une soeur jumelle du nom de Silver et je vais vous raconter son histoire. Du moins, notre histoire au dernier jour de sa vie car nous le lui avons promis”.
  • “Bonjouuuur Swaaann” !!!! Claironnent-ils en chœur.
  • “Pour commencer, je me suis toujours demandé ce que je m’empresserais d’emporter avec moi si jamais je me retrouvais échoué sur une île ou la Lune.

Sans hésiter, j’y échouerais avec ma sœur, Silver”.

Annotations

Vous aimez lire Ultra Violette ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0