Fermé
Je ne réponds rien, je suis confus. Que s’est-il passé ? Je sors la lame et l’inspecte. Rien n’est anormal, elle n’a pas changé par rapport à la première fois que je l’ai attrapée. Pourtant, je sais qu’un événement inexplicable s’est produit lorsque le vendeur me l’a tendue.
— Tu comprendras plus tard, James. Mais ne t’en sépare jamais, promis ?
— Promis.
Mais suis-je réellement capable de comprendre ? Elle ne semble pas en douter et je veux lui faire confiance. Je n’arrive pas à imaginer qu’elle puisse avoir autant de connaissances sur les dagues et leurs effets sur notre corps, que je n’ai jamais remarqué jusqu’ici ce qu’elle portait à sa ceinture.
Nous ressortons du magasin et allons prendre un verre dans un café proche. L’après-midi passe trop vite, ainsi que notre dimanche. Maman sait désormais que Sophie est ma petite-amie et tout semble trop calme, trop paisible pour durer.
பிற்பாடு
Il est lundi matin, jour de risques et de plaisir. Pour la première fois, je ressens une certaine impatience à réaliser ces forfaits. Sophie n’y est pas pour rien.
Lorsqu’elle me parlait d’emmener un marteau, j’avais dans mon esprit un petit outil et non cette grosse massue qu’elle glisse à l’intérieur de son sac. « Je suis prête ! », affirme-t-elle tout sourire. Il est temps d’y aller.
Nous empruntons le bus pour nous rendre au lycée mais ne nous arrêtons pas à l’arrêt habituel. Il est hors de question de prendre le risque de se faire reconnaître par quelqu’un. Nous allons jusqu’à l’arrêt suivant, plus proche du passage secret. Il n’y a personne autour de nous, les cours ont déjà débuté. Je sens la pression augmenter et observe Sophie, qui n’a pas perdu son sourire. Elle mène la marche jusqu’au grillage, avant de s’arrêter net.
— Fermé.
— Comment ça, fermé ?
— Ils avaient menacé de condamner cette entrée, à la suite des différentes disparitions d’élèves. Apparemment, il y en a eu une nouvelle.
— Des disparitions d’élèves ?
— Tu n’es pas au courant ?
— Non, on ne nous en a pas parlé.
— Ils tentent de garder cette histoire sous silence. Mais leur projet était de reformer le grillage pour empêcher quiconque de s’introduire sans passer devant l’accueil. Ainsi, les comportements suspects sont immédiatement repérés. Je suis certaine que cette mesure n’aura aucun effet, mais ils sont persuadés qu’il s’agit de la meilleure solution.
Nous voilà bloqués à l’extérieur du lycée. Notre seul espoir est parti en fumée, nous n’avons pas prévu d’outil pour le couper et nous introduire à l’intérieur et, comme d’habitude, cette entrée ne sera probablement pas rouverte avant une semaine, le temps que toutes ces histoires se fassent oublier.
— Ta dague, James.
Je la sors de son fourreau. Une fois de plus, je sens quelque chose de puissant couler entre mes veines, une forme d’énergie. Ce monde ne tourne pas rond, ou je deviens fou. Quelque chose ne va pas.
— Utilise-la pour nous créer un passage.
— Mais, elle ne peut pas couper un grillage !
— Essaie.
Sophie serait-elle en train de devenir dingue, elle aussi ? Je l’écoute mais ne crois pas une seconde en l’efficacité de ce plan. J’essaie de détruire l’un des fils qui nous obstrue le passage, mais rien ne se passe. La lame n’est pas assez tranchante pour l’abîmer. J’essaie, je m’obstine, j’abandonne. Rien à faire. Je la range à ma ceinture.
Les feuillages commencent à faire du bruit, mais il n’y a pas de vent. La nature est immobile mais bruyante. Ma main est tremblante et se rapproche de ma hanche. Je dégaine mon arme et la pose instinctivement sur le grillage. Je ne contrôle plus mes mouvements, je suis comme en transe. Impossible de savoir pourquoi je fais ces actions, mais j’ai la sensation de devoir les faire, de ne pas avoir le choix. La même sensation se propage à nouveau dans mon corps, mais à l’envers. Là où le flot semblait envahir mon corps, je le sens désormais s’échapper à travers mes mains en direction de la ferraille. Les plantes s’agitent, les arbres soufflent. Des racines sortent du sol. Elles se dirigent vers ma main et s’en emparent, mais je ne panique pas. Malgré toutes ces incohérences, je suis serein.
La nature n’est pas mon ennemie, elle est mon amie. Je ne suis pas la cible, le grillage l’est, et la pointe de ma dague est le point d’entrée de leur action. Les barreaux s’écartent à mesure que différentes plantes s'enroulent et tirent dessus, jusqu’à former une parfaite entrée, de taille humaine. Plus rien ne bouge.
— C’est incroyable.
Je l’avais totalement oubliée, avec tous ces événements. Sophie est toujours avec moi et ne semble pas dérangée par ce que je viens de vivre. Au contraire, ses yeux sont remplis d’admiration.
Nous suivons le chemin que nous avions prévu d’utiliser pour atteindre la voiture de notre cible, en même temps de discuter. J’essaie de comprendre et je sais qu’elle a des réponses à mes questions. Elle m’explique qu’il est encore trop tôt pour elle de me dire pourquoi elle savait que je devais utiliser ma dague, mais est capable de me donner quelques informations. Je n’ai pas acheté une simple lame, mais un réceptacle de pouvoir. Dans les mains de n’importe quelle personne, elle n’aurait aucun effet. En revanche, lorsque je la possède, elle me permet de dépasser les limites physiques. Selon ses dires, je suis capable de maîtriser un environnement composé de plantes pour entraver ou débloquer des passages. Selon les miens, je suis un être en transe incapable d’avoir une quelconque emprise sur un objet qui semble être bien au-dessus de toutes mes connaissances et qui se révèle puissant et dangereux. Ne serait-ce pas la solution que je recherche pour me libérer de l’emprise de cet inconnu qui me tourmente ces derniers temps ? Sophie, tu es peut-être celle qui me permettra de revivre normalement, alors merci.
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