2.2 La tombe
La cérémonie terminée, la directrice revint auprès du groupe de nobles afin de les conduire à l’écart. Ces derniers mois, un musée sur la guerre vlin'ns avait été construit sous le lieu de commémoration et les jeunes élites étaient invités à le visiter en premier. Enfin à l’abri des regards, Vaillance crut pouvoir se détendre. Elle essaya bien de se concentrer sur les explications de la directrice qui étalait son savoir sur tel ou tel objet, mais rien n’y faisait, à chaque fois qu’elle clignait des paupières, les yeux bleus de Lesskov apparaissaient dans son esprit. Elle finit par s’asseoir sur l’un des bancs pour reprendre son souffle et remettre de l’ordre dans son esprit. Gwën l’y rejoignit, un sourire ne quittait plus son visage depuis leur rencontre avec le groupe de haïkadens.
— Tout va bien, Vaillance ? Tu as l’air un peu pâle.
La noble aux cheveux de jais hésita. L’étiquette lui demandait de toujours bien paraître et donc de ne pas montrer ou dire ses problèmes. Pourtant, elle avait vraiment envie d’en parler avec Gwën.
— C’est cet homme, Lesskov. Il n’a pas arrêté de m’observer durant toute la cérémonie. C’est un peu dérangeant.
— C’est vrai qu’il est très impressionnant, même si Honestie est bien plus cool ! Un écrin de malice envahit le sourire de la noble. Peut-être qu’as-tu retenu son attention et qu’il souhaite te prendre comme écuyère ?
— Ne raconte pas n’importe quoi. Un homme pareil ne prendrait jamais une fille telle que moi en tant qu’écuyère. Qui plus est, je suis une noble, ce genre de personne ne peut pas me déranger et il en est très bien ainsi.
— Pas vrai… répondit Gwën une note de tristesse dans la voix. Le groupe s’éloigne, on les rattrape ?
Vaillance hocha la tête et se leva à regret de son siège. Elle s'apprêta à la suivre quand son regard tomba sur un couloir à peine éclairé. En plein centre, une boule de lueur pâle flottait dans les airs, clignotant légèrement.
— Gwën, vois-tu cela ?
La seconde s’arrêta net en voyant l’étrange sphère qui pulsa de plus belle. Les deux adolescentes se sentirent tels des moustiques dans la nuit, irrésistiblement attirés par l’étrange bolide lumineux. Elles firent un premier pas vers celui-ci et il s’éloigna d’autant, laissa un ruban irisé derrière, invitant la jeune noble à la suivre. Elles passèrent un fil rouge qui marquait la limite de la zone autorisée et s’enfoncèrent dans le couloir.
Le cœur de Vaillance s’emballa quand, à mi-chemin, l’architecture changea du tout au tout. Les murs modernes laissèrent place au même marbre noir qu’elle avait vu à la surface et les lueurs pâles s’intensifièrent jusqu’à former un mur entre elle et la sortie. Gwën s’arrêta à ses côtés et les deux filles échangèrent un long regard avant de hocher la tête de concert. Leurs petits cœurs tambourinaient dans leurs poitrines, elles se prirent par la main et traversèrent le voile. En rouvrant les yeux, Vaillance découvrit une grande salle ronde plongée dans l’ombre à l’exception du centre où un trou dans la voûte projetait une colonne de lumière. Sous le faisceau, une armure haute de trois mètres attendait.
— C’est un Orca, murmura Gwën, n’osant perturber le silence stellaire. On s’approche ?
Vaillance acquiesça. À quelques mètres, leurs cheveux se dressèrent sur leurs crânes et un frisson les traversa de part en part. Vaillance fit aussitôt un pas en arrière, mais cela ne fit pas peur à Gwën. Elle serra plus fort la main de sa camarade, et la tira jusqu’à la plaque érigée au pied de l’armure.
— « Carmillia Eleros, qu’à jamais ta lumière nous guide », lut-elle à haute voix. Je pense que c’est l’armure de la haïkadenne qui est morte ici.
Vaillance, qui suivait son intrépide amie à petits pas, observa de plus près l’armure. Elle hésita un peu puis s’osa à poser la main sur le métal froid. Un léger picotement se fit sentir sur toute sa peau et remonta le long de son bras. L’armure s’éveilla à la présence de la noble, ronronna légèrement.
— Elle… Elle fonctionne encore ? s’étonna-t-elle. Pourquoi l’avoir laissée ici ?
— Je pense que c’est par respect, un peu comme une tombe, expliqua Gwën. Tu ne trouves pas ça un peu poétique de rester à jamais dans l’armure que tu as portée au combat ?
Elle retira sa main et murmura des excuses au corps de métal endormi. Elle s’en voulait un peu d’avoir dérangé la guerrière somnolant dans le sarcophage d’acier. Lâchant la main de sa camarade, Vaillance commença à faire le tour. Derrière le pilier de lumière, une petite alcôve faiblement éclairée se discernait.
— Qu'est-ce ? Une épée ?
Au centre d’un champ à vide flottait paisiblement une lame. La pulsion qui avait appelé Vaillance jusqu’ici s’intensifia. Elle descendit les marches jusqu’au renfoncement, suivit de près par Gwën. Elle n’en arrivait même plus à dire si elle respirait encore, tant son être tout entier était aspiré par l’objet.
Elle fit un dernier pas et entra dans le champ, l’épée était au bout de ses doigts. Cette dernière était comme venu d’un autre temps, une lame qui aurait traversé les âges pour se retrouver en face des deux filles.
Aussi longue que son bras, la lame plate était couverte d’un fourreau de satin noir richement détaillé. Un fil rouge courait à travers le tissu, minutieusement brodé pour former des glyphes au sens inconnus. En passant ses doigts dessus, le cœur de la fille se contracta et une mélancolie empoignant l’âme se déversa en elle. Le manche de l’épée était de bois blanc, recouvert d’une corde noire tressée pour la rendre plus confortable et se terminait par une boule noire en guise de pommeau.
Vaillance humidifia sa bouche devenue aussi sèche qu’un désert et prit la lame en main. Des étincelles fusèrent, léchant les mains de la fille sans lui faire le moindre mal avant de s’éclipser dans un tourbillon de lueurs. Elle tira l’arme de son caveau, l’acier se révéla avec un léger vrombissement. L’épée n’avait rien à voir avec les armes qu’elle voyait dans ses films et séries favoris. Aucun laser ou énergie comme elle s’y attendait, mais un sable couleur encre qui s’assembla pour former un tranchant. D’abord aussi large qu’un doigt, la relique s’affina jusqu’à ne pas être plus épaisse qu’une feuille.
— Vaillance ? Que fais-tu ?
— Comment ?
Tirée de ses pensées, la petite noble se tourna vers sa camarade qui l’observait intensément.
— Cela fait bientôt trente secondes que tu regardes l’épée…
Vaillance secoua la tête pour se remettre les idées au claire. Elle ne s’était même pas rendu compte qu’un aussi long moment s’était écoulé.
— Désolée, tu veux la tenir ?
Gwën agita la tête, au comble de l’excitation. Elle tendit la main pour s’en saisir, aussitôt une pluie d’étincelle s’échappa de la poignée et une vive douleur se répandit dans le bras de la noble aux cheveux d’argent. Le cri de douleur de Gwën fit sursauter Vaillance, qui lâcha l’arme aussitôt.
— Gwën ? Elle attrapa la main de la fille, une touche rouge sur le dessus. Que s’est-il passé ?
— Je pense que ton épée ne m’aime pas trop…
Elles se retournèrent vers l’arme qui glissait à travers le champ à vide. Vaillance la récupéra et la remit dans son fourreau avant de la repositionner comme elle l’avait trouvée.
— Nous devrions partir.
Gwën acquiesça vivement, encore sous le coup de s’être fait attaquer par une vieille épée. Les deux filles rebroussèrent chemin jusqu’au musée et retrouvèrent le reste du groupe qui n’avait même pas remarqué leur absence. La visite était terminée et les jeunes nobles se dispersaient pour rentrer chez eux afin de se préparer pour l’événement du soir. Vaillance raccompagna Gwën, jusqu’aux pistes de décollage où leurs serviteurs respectifs les attendaient. Elle salua la jeune fille, mais oublia de lui demander si elle voulait venir à sa soirée. Légèrement déçue de son oubli, Vaillance retrouva Jasper qui l’attendait là où il l’avait déposée. Le retour se fit rapidement, l’esprit de la jeune adolescente encore rempli des étrangetés qu’elle avait découvertes.
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Quazar point :
Le mémorial de la bravoure fut construit dans un cratère créer par l'impact des soldats vlin'ns descendant sur la planète. C'est aussi dans celui-ci que le dernier duel a eu lieu, permettant une victoire pour la confluence au prix d'un grand sacrifice.
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