Prologue

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Un pas devant l'autre, d'une manière presque réticente, elle avança lentement vers le temple canonique diptère. Son regard émerveillé glissa sur les multiples détails de la bâtisse en marbre immaculé alors qu'elle accédait au péristasis, le ventre noué. Tout semblait diablement immense.

Diablement.

Un rire nerveux s'échappa de ses lèvres. Comment pouvait-elle penser aux Enfers en plein cœur de l'Olympe ? Elle se racla la gorge, peu certaine, puis toqua à la porte dorée. Le bruit eut l'effet d'un diapason, résonnant dans le temple. A peine quelques secondes plus tard, quelqu'un vint ouvrir. L'homme qui se présenta était d'un charisme foudroyant et d'une prestance sans équivoque. Zeus, en chair et en os, qui venait l'accueillir. Il n'avait pas l'air heureux de la voir ici.

« Perséphone. » lâcha-t-il d'une voix froide.

Elle ne répondit pas tout de suite, partagée entre l'envie d'entrer créer un scandale et celle de partir sans dire un mot. Choisissant la seconde option, elle se retourna, avalant sa salive, et rebroussa chemin. Ses pensées bourdonnaient incessamment dans son esprit, et aucune d'entre elles ne l'épargnait.

« Perséphone ! » répéta Zeus, sur un ton plus ferme, qui fit écho dans la vallée.

Les poings serrés, elle s'arrêta net, puis tourna la tête vers lui.

« Votre Altesse. répondit-elle en se courbant dans une révérence ironique.

— Tu as laissé les Enfers aux mains des âmes damnées dans le but de venir ici, j'attends que tu m'en expliques la raison. »

Il avait cet air colérique qu'elle n'aimait pas lire sur son visage. Le roi de l'Olympe portait bien son titre, personne ne pouvait le contester.

« Hadès est revenu. » lança-t-elle, sur un ton platonique.

Zeus écarquilla les yeux, et fit un pas de recul. Cette annonce lui donnait le tournis, si bien qu'il dût se retenir au mur.

« Mon frère est sur Terre depuis des mois, Perséphone, je doute qu'il ait l'intention de revenir honorer son poste, nia-t-il, secouant la tête.

— Et pourtant. »

Un éclair déchira le ciel, faisant gronder l'Olympe.

« Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? s'énerva-t-il.

— Je suis enceinte »

Un silence de plomb emplit l'atmosphère. Un silence lourd, oppressant, presque douloureux.

« Enceinte, répéta-t-il dans un murmure. Enceinte... »

Elle le laissa digérer la nouvelle. Deux secondes s'écoulèrent avant qu'il ne vire au rouge, emplit d'une haine incontrôlable.

« Comment est-ce possible ?! » vociféra-t-il, sur le point de déclencher un autre orage.

Un soupire traversa les lèvres de Perséphone, qui s'avança vers Zeus, une main sur son ventre légèrement arrondi.

« C'est une fille. » ajouta-t-elle, dans l'espoir que cela l'apaiserait.

Ça ne fit qu'empirer les choses.

« Il est hors de question qu'elle grandisse ici. Je l'enverrais sur Terre, là où est sa place, et je vous enfermerais tous les deux aux Enfers pour l'éternité ! »

Un autre éclair retentit dans les nuages, plus fort que le précédent.

« Je ne vous laisserais pas me prendre mon enfant, Zeus.

— Je ne suis pas en train de te demander la permission, Coré.

— Ne m'appelez pas comme ça ! siffla-t-elle.

— Tu as transgressé les règles, tu es allée le voir sans mon accord, et tu as enfanté avec lui ! Il a été évincé des Enfers pour une bonne raison, mais tu n'as fait qu'à ta tête !

— Je l'aime ! » s'exclama-t-elle dans un souffle désespéré.

Il lâcha un rire jaune.

« Il t'a enlevée à Déméter et t'a réduite en esclavage à ses côtés. Ce n'est pas de l'amour que tu ressens pour lui, c'est une maladie !

— Il ne m'a pas enlevée, il m'a sauvée. J'étais promise à un avenir de nymphe, et lui m'a fait reine.

— Reine des Enfers, merveilleux ! se moqua-t-il avec amertume. Tu n'aurais pu rêver mieux.

— Oh, je vous prie Zeus, ironisa-t-elle, combien de fois avez-vous mis les pieds là-bas ? Une ou deux fois en un millénaire ?

— Je doute que vous ayez payé une décoratrice d'intérieur durant ce temps.

— Cessez vos attaques, ça n'en vaut pas la peine. Macaria sera élevée aux Enfers, et vivra dans notre monde, que cela vous plaise ou non.

— Macaria... C'est un joli nom. »

Elle déglutit.

« Vous êtes un monstre, cracha-t-elle avec acidité.

— Un monstre ?! J'ai protégé l'Olympe de la destruction maintes et maintes fois contre ton mari. Si ta fille suit son exemple, il n'y aura plus de mortels pour vénérer notre existence. Ce sera la fin !

— Vos querelles familiales m'insupportent ! Je me fiche de vos animosités entre frères, je refuse que l'on m'éloigne de mon enfant. Elle a le droit aux mêmes traitements qu'Athéna.

— Ma fille n'a rien à voir avec la tienne !

— Elle n'est même pas née ! s'énerva Perséphone. Elle est encore dans mon ventre et voilà que vous la jugez déjà.

— Quand bien même, je refuse qu'elle mette l'Olympe en péril. Elle grandira sur Terre, dans une bonne famille.

— Non, Zeus, il faudra me passer sur le corps pour cela.

— Ce n'est pas un problème. »

Elle plongea ses yeux dans les siens, avec une haine amère et sanguine, mais il se contenta de rester froid. D'un geste de la main, il referma les portes, qui claquèrent dans un bruit sourd. Seule, Perséphone se mit à trembler, retenant un sanglot. Elle se laissa tomber sur les marches d'escalier, les larmes dévalant ses joues.

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