01 - Fausse première (ZX)
"Réveillez-le."
ZX se réveille après une nuit sombre et immobile. Méticuleusement, il dénigre tout aspect de la réalité comme si j'en étais absent. Les paupières lourdes, l'oeil fatigué, ZX se lève instinctivement du pied gauche, qu'il enfile dans la pantouffle droite, celle qui ne s'est pas enfouie loin loin sous le lit. Il manque alors de se ramasser lorsqu'il dandine dans tous les sens pour se permettre un levé naturel et dynamique, et tandis qu'un café coule, je me demande ce qu'il y a de plus abscons que ce personnage qui m'habite, ce ZX inconnu au bataillon avant même hier soir, et qui ce matin est là comme si de rien n'était.
ZX, c'est le fragmenteur.
Il voulait s'appeler skizoboy, mais c'était déjà pris, et il voulait être unique à être multiple.
Alors que les rayons frappent derrière les lattes de bois, je me fais la réflexion que tout ceci ne vaut pas le coup, sans y penser vraiment, juste en affirmant mon déni de la réalité. Je n'ai aucun avenir, aucun plaisir ; je n'ai aucun devoir, aucun pouvoir ; c'est ainsi que je n'ose me mouvoir, car de désespoir je rends mon affligeant concert devant l'oratoire de mes propres sphères. Pendant ce temps, ZX bois mon café, et je le savoure de côté...
Le réveil est difficile. Il traine lamentablement d'un bout à l'autre de mes hémisphères, sans me permettre de le toucher autrement que par le désir imminent, le besoin vital de m'extraire d'un sommeil auquel je suis inconsciemment drogué. Et ZX le sait, lui, ou du moins il le voit. Et l'agit.
Alors que moi, je ne peux que loquer sur ma chaise, les coudes sur la table antique, le regard perdu entre des personnalités qui s'entrechoquent. Pourquoi ces figurines dans mon esprit ? Pour ne pas exister, bien sûr. Et c'est ainsi que je me mesure.
Du haut de son phare, ZX plonge dans les bas-fonds des commandes de ma psyché. Il active quelques leviers, pousse quelques boutons, tourne des molettes ; c'est archaïque comme il se représente la mécanique de mon cerveau, mais je crois qu'il manie plutôt bien son engin, et quelque part je me sens obligé de suivre en parallèle l'aventure qu'il me décongèle.
Furieusement
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