Chapitre 13 : Un évènement très matinal

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Le lendemain matin, je me réveillai de très bonne humeur, en me sentant étrangement légère. La douche chaude me fit l'effet d'un doux réveil, et je laissai l'eau glisser sur ma peau, comme pour dissiper les bribes de rêves qui persistaient encore.


Une fois prête, je descendis au salon, une atmosphère vivante et agréable m’accueillit. Les éclats de rire et les échanges joyeux emplissaient la pièce, rendant ce début de matinée particulièrement plaisant. Une sonnerie de téléphone m’indiquait que j’avais reçu un message. Je le consultais. Ce message venait de l’entreprise qui spécifiait que celle-ci organisait un petit-déjeuner exceptionnel ce matin pour sept heures trente.


Sans perdre de temps, je me préparai pour la journée qui m’attendait. J’enfilai ma veste, nouai rapidement mes lacets, prête à partir.


—   Tu pars déjà ? Demanda ma mère, une touche d’étonnement dans la voix.

—   Oui, maman. Tu sais bien que je travaille maintenant, répondis-je avec un sourire amusé.

—   Certes, mais tu ne commences pas à sept heures, quand même.

—  J’ai reçu un mail ce matin indiquant que l’entreprise organise un petit-déjeuner pour les employés. On doit être là une heure avant l'ouverture à sept heures trente.

—   Ah, je vois. Amuse-toi bien, ma chérie.

—   Merci, maman. À ce soir !


Je quittai la maison en hâte. Le froid mordant du matin me surprit dès que je mis un pied dehors. Il n'était que 6 h 55, et je me rendis compte que j’étais un peu en avance. Les rues étaient étrangement calmes pour une heure si avancée, un silence inhabituel régnait, comme si la ville s'était encore un peu endormie sous le ciel encore sombre. En chemin, j’aperçus un marchand de vin chaud. L’idée de réchauffer mes mains glacées me parut irrésistible, alors je m'approchai.


—   Bonjour, mademoiselle ! Que puis-je vous servir ce matin ? S'exclama le marchand, un homme d'un certain âge, visiblement d’humeur joyeuse malgré le froid.

—  Un grand verre de vin chaud, s'il vous plaît.

—   Ah, excellent choix ! Avec ce froid, même les écureuils devraient en boire, plaisanta-t-il en secouant la tête. C'est un hiver rude pour tout le monde.

—   Ils sont habitués. Ils se préparent bien pour l’hiver, vous savez, dis-je en souriant.

—   Ah, vous avez l'air de bien connaître les animaux ! Répondit-il, visiblement impressionné.

—  Ma mère est vétérinaire, expliquai-je.

—  C’est un beau métier, ça. Voilà votre vin chaud, ça vous fera cinq dollars.


Je le remerciai, payai et repris ma marche. Le vin chaud était parfait, et en plus de réchauffer mes mains, il semblait aussi réchauffer un peu mon esprit. Le vendeur, avec son humeur joyeuse, avait apporté un peu de chaleur dans cette matinée froide. Le contraste entre son optimisme et le silence pesant des rues m'avait fait sourire.


En arrivant à l’entreprise, je constatai que le hall d’entrée était déjà bien rempli. Des tables disposées en forme de U longeaient les murs, couvertes de viennoiseries, de fruits frais, et d’un large choix de boissons chaudes. Mes collègues étaient déjà là, discutant paisiblement.


—   Salut ! Lançai-je en m’approchant.

—   Salut ! Répondit l’un d’eux. Pourquoi tu n'étais pas là hier ? On commençait à s’inquiéter.

—   Oh, désolée. Mes parents viennent d'arriver de France, je voulais passer un peu de temps avec eux.

—   C’est super ça ! On croyait que c’était à cause des journalistes qui traînaient ici ces derniers jours.

—   Ah, cette histoire, j’avais presque oublié ! Répondis-je en souriant légèrement.


Tout à coup, une agitation se fit sentir dans la salle. Brandon, notre patron, venait d’entrer. Il était impeccable dans son costume bleu marine, les cheveux légèrement coiffés en arrière avec du gel. Il monta sur l'estrade préparée pour l’occasion et prit la parole :


—   Bonjour à tous, et merci d’être venus aussi tôt. Je voulais vous réunir ce matin pour clarifier quelque chose qui s’est passé il y a quelques jours.


Un murmure parcourut la salle, des regards inquiets s'échangèrent.


—  Ne vous en faites pas, ce n’est rien de grave, continua-t-il d’un ton rassurant. C’est simplement au sujet de la venue des journalistes.


Des exclamations s'élevèrent. Les employés étaient visiblement agacés par cet épisode qui avait perturbé leur quotidien. Une dame murmura à voix haute :


—  On va enfin savoir pourquoi ils étaient là, ou bien, c’est encore un coup pour nous embrouiller !


L’ambiance devint tendue. Les voix s'élevaient, des reproches fusaient. Brandon leva les mains pour calmer le tumulte.


—  Écoutez, je comprends votre frustration, mais je n’avais pas prévu leur venue. Je tenais à m'excuser pour l’intrusion et à vous rassurer : cela ne se reproduira plus. Pour me faire pardonner, je vous ai organisé ce petit-déjeuner. Nous aurons l’occasion de discuter ensemble, mais je ne répondrai à aucune question concernant ma vie privée.


Les murmures se dissipèrent peu à peu. Brandon descendit de l’estrade et se dirigea vers les tables pour se mêler aux employés. Je suivis la conversation d’une oreille distraite, observant surtout Brandon, dont l’attitude trahissait une certaine tension. Tandis que je m’apprêtais à m’approcher de lui, ma collègue me tira par le bras.


—   Viens, on va manger quelque chose, dit-elle avec un enthousiasme un peu forcé.


Je me servis un pain au chocolat et un verre de chocolat chaud. Nous discutâmes brièvement du discours de Brandon, mais je restais absorbée par mes propres pensées.


Quelques minutes, plus tard, prétextant une envie pressante, je me rendis aux toilettes.


En traversant la salle, je sentis le regard de Brandon suivre chacun de mes mouvements. Une fois dans les toilettes, j’ouvris la porte de celle-ci et fis mon affaire tranquillement, le cœur battant à toute allure. Le temps semblait s’étirer à l’infini, et chaque seconde s’alourdissait d’un mélange de désir et de nervosité. J’entendais, de l’autre côté du mur, les voix étouffées de mes collègues dans le hall, leurs rires et conversations mêlés au cliquetis des tasses de café. Pourtant, à cet instant, tout ce qui occupait mes pensées, c’était Brandon. Une part de moi espérait qu’il ne viendrait pas, que cette folie cesse ici, avant qu’elle n’aille trop loin. Mais une autre part, plus intense, brûlait d’impatience. Quand j’eus fini ma petite commission, la grande porte d’entrée des toilettes grinça doucement. Mon estomac se noua de façon irrépressible. J’hésitai un instant, puis, comme une comédienne se préparant pour sa scène, je me penchai vers le lavabo, afin de me laver les mains, tout en faisant semblant de l’ignorer, chose qu’il détestait par-dessus tout. Quelques secondes suffirent à ce que sa présence emplisse la pièce. Je sentis son regard sur moi avant même de l’avoir vu dans le reflet du miroir. C’était lui. Brandon.


Je levai la tête, croisant ses yeux avec une nonchalance feinte.


—   Dis donc, Cher monsieur, dis-je en me tournant vers lui, vous vous trompez d’endroit. Vous êtes dans les toilettes des filles. Je vous prie de bien vouloir partir, afin que je puisse terminer tranquillement mes affaires.


Je tentai de maintenir un ton détaché, mais la tension était palpable. Il me regardait avec ce sourire en coin, celui qui mélange insolence et séduction, celui qui faisait battre mon cœur un peu trop vite à chaque fois.


—   Je suis désolé de vous déranger, Chère madame, rétorqua-t-il, sa voix grave résonnant dans l’espace clos. Mais je dois rejoindre mon amante qui se trouve dans cette pièce en ce moment même.


Mon cœur fit un bond. Il prononçait chaque mot avec cette aisance désarmante, comme si notre relation n’avait rien de secret, comme si nous n’étions pas sur le point de franchir une nouvelle limite.


—   Ah, mais je ne souhaite absolument pas connaître les détails de votre vie privée, monsieur, rétorquai-je avec un sourire amusé, jouant le jeu tout en essayant de garder une distance. Maintenant, si vous me permettez, je vais m'en aller avant que cette pièce ne devienne une véritable porcherie.


Je fis un pas vers la porte, cherchant à me dégager de cette situation brûlante, mais avant que je ne puisse atteindre la poignée, il se déplaça rapidement. En un instant, une pression familière et douce s’abattit sur moi, me retournant contre la porte avec une force maîtrisée. Son corps tout contre le mien, son souffle chaud effleurant mon visage.


Il m’embrassa.


Ce baiser, intense et audacieux, fit éclater quelque chose en moi. Mes lèvres s’embrasèrent sous le contact des siennes. Une saveur délicate de menthe mêlée à un arrière-goût de chocolat envahit ma bouche, créant un mélange déconcertant, mais exquis. Je sentis sa langue caresser la mienne, avec une sensualité calculée, presque douloureusement lente. Le temps semblait s'être suspendu dans cette petite pièce étroite, où seul comptait ce moment, cet échange interdit.


Je me détachai un instant, les lèvres encore brûlantes, cherchant à retrouver mon souffle. Mes pensées étaient en désordre, chaque mot que je m’apprêtais à prononcer s’évanouissant avant même d’avoir atteint mes lèvres.


Finalement, je réussis à murmurer, un léger sourire sur le visage :


—  Waouh… Et à quoi dois-je l’honneur de ce baiser, Brandon ?


Son regard se plongea dans le mien, cette lueur de désir et de malice toujours présente dans ses yeux.


—  Juste parce que… J’en avais envie. Depuis que je t’ai vue là-bas, lorsque j'étais sur cette estrade, entourée par tous ces gens. Je ne pensais qu'à une chose… Te rejoindre.


Mon souffle se fit plus court. Sa réponse, simple mais si directe, me fit vibrer. Il aurait pu venir vers moi à tout moment, mais non, il avait attendu ce moment, dans l’intimité volée des toilettes, loin des regards inquisiteurs de nos collègues.


—   Tu aurais pu venir me voir… Lui dis-je en souriant, tout en sachant très bien pourquoi il ne l’avait pas fait.

—   Non, je voulais t’avoir rien que pour moi, répondit-il, sa voix plus basse. Pas de discussions avec tes collègues. Juste toi et moi, ici… Loin du monde.


Ses lèvres se posèrent sur mon cou, déposant des baisers qui me firent frémir. Je basculai doucement ma tête en arrière, laissant mon corps répondre à chaque baiser, à chaque caresse. Mon cœur battait si fort que j’avais l’impression qu’il allait exploser.


Mais à cet instant précis, un bruit sourd retentit derrière la porte.


Le déclic distinct d’une serrure que l’on force à tourner.


—   Et !!! Qui c’est qui est là ?! Vous bloquez la porte !!


Mon cœur s’arrêta. La réalité de notre situation me frappa de plein fouet. Brandon se redressa rapidement, et lâcha un juron à voix basse.


—   Et merde… Murmura-t-il entre ses dents.


Nous nous reculâmes précipitamment, libérant l’accès à la porte. Elle s’ouvrit brusquement, dévoilant un homme de petite taille, les joues rouges, visiblement mal à l’aise de se retrouver face à son patron dans un endroit aussi improbable. Ses yeux passaient rapidement de Brandon à moi, cherchant à comprendre ce qui se tramait.


—  Qu’est-ce que vous faites là, patron ? Demanda l’homme, l'air incrédule.


Brandon, impassible, le regarda de haut, son visage redevenu impénétrable.


—   Je fais ce que je veux dans mes locaux, Damien, répondit-il avec une froideur qui me surprit. Et vous ? Qu’est-ce qui vous amène ici, dans les toilettes des filles ?


L’homme balbutia une excuse, ses joues devenant cramoisies. Il n’osait plus nous regarder, fixant ses chaussures avec une gêne palpable.


—   Euh… Je suis désolé… Je… Je me suis trompé de porte, bredouilla-t-il en reculant.


Brandon fit un geste sec de la main, l’incitant à partir. Le pauvre homme tourna les talons et disparut aussi vite qu’il était venu, mais pas sans jeter un dernier regard intrigué derrière lui.


Une fois seul, un silence étrange s’installa. Je regardai Brandon, et un éclat de rire silencieux monta en moi. Mais lui, fidèle à son rôle, haussa simplement les épaules.


—   Pauvre type… Murmurai-je en secouant la tête. Tu l’as vraiment traumatisé.


Brandon soupira, me fixant avec cet air désinvolte qui me rendait folle.


—   Ne t’en fais pas. Il voulait juste voir ce qui se passait. Je parie qu’il a entendu ma voix et qu’il s’est dit qu’il allait découvrir quelque chose d’intéressant. Je ne le trouve pas net.

—   Pourquoi ?

—   Eh bien… Ce n’est pas moi qui l’ai embauché, grogna-t-il. C’est mon père…

—   Oh !!! Mais ne peux-tu pas le licencier ? Demandai-je, l'inquiétude et la curiosité mêlées dans ma voix.


Brandon laissa échapper un soupir, comme si le simple fait d’en parler était une épreuve en soi. Il secoua la tête, les yeux perdus dans une réflexion qui semblait aussi lourde qu'un poids.


—   Tu ne comprends pas, me répondit-il finalement, la voix teintée d’une exaspération contenue. Licencier Damien, c’est comme ouvrir la boîte de Pandore. Mon père ne manquerait pas de s’en servir pour me reprocher de ne pas savoir gérer l’entreprise, d’avoir licencié un employé qu'il considère comme « brave et honnête ». Ce ne serait pas seulement une question d’embauche ou de débauche. Cela ouvrirait la voie à des accusations bien plus graves, comme quoi je ne suis pas capable de mener l’entreprise comme il se doit. Et puis, il serait bien assez sournois pour utiliser cela comme prétexte pour me faire des reproches incessants. Crois-moi, ça va me retomber dessus d’une manière ou d’une autre, et je préfère éviter ce genre de complications.


Je le regardai avec compassion, comprenant mieux le tourbillon dans lequel il se trouvait. Son père semblait être une ombre omniprésente dans sa vie professionnelle, un fardeau qui se manifestait dans chaque décision, chaque conflit.


—  Je comprends, murmurai-je, les mots flottant dans l'air chargé de tension. Ton père te fait vraiment vivre un enfer. Entre ton ancienne copine, ses prétendus « employés parfaits », et toutes ces autres complications…


Brandon fit un geste distrait, comme pour balayer la conversation. Il approcha lentement, ses yeux rencontrant les miens avec une intensité qui m’enveloppa entièrement. Il avait ce regard déterminé, celui qui faisait fondre toutes les résistances.


—   Je t’en prie, n’en parlons plus, demanda-t-il avec une douceur inhabituelle. Ce dont j’ai vraiment besoin en ce moment, c’est d’être avec toi, loin des préoccupations liées à mon père et de ses manigances incessantes.


Je hochai la tête, acceptant sans réserve sa demande. Les problèmes semblaient s’estomper dans l’immédiat, comme si tout le reste devenait secondaire face à ce moment partagé. La chaleur de sa présence était réconfortante, et je me laissai entraîner dans cette bulle de tranquillité qu’il créait autour de nous.


Il m’attira doucement vers lui, ses mains se glissant sous la robe beige que je portais. La sensation de ses doigts sur ma peau me fit frémir. Il me souleva avec une délicatesse infinie, me plaquant contre la porte d’un geste à la fois ferme et tendre.


L’espace entre nous se rétrécit à chaque instant, et tout le reste sembla s’évanouir. Il n’y avait plus de bruits de toilettes, plus de regards curieux. Il n’y avait plus que lui et moi, perdus dans un monde où seuls comptaient nos désirs et nos sentiments.


Les lèvres de Brandon se posèrent sur les miennes dans un baiser fiévreux, passionné. Sa main caressa le bas de mon dos, s’attardant à chaque courbe comme pour en mémoriser la douceur. Mon cœur battait au rythme de ses gestes, chaque mouvement amplifiant la connexion entre nous.


Je me perdis dans cet échange, oubliant tout le reste. Les murmures de mon esprit, les préoccupations de la journée, tout cela sembla se dissoudre dans la chaleur de son étreinte. Et alors que je m’abandonnais à cette intimité, un nouvel éclat de désir scintillait dans ses yeux, prêt à être exploré dans les moments qui suivaient.

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