Jeudi 6 juin
Charlotte
J’attrape mon sac à main sur le siège passager et les croissants achetés à la boulangerie du village, quitte ma voiture et remonte l’allée des Chablot. Même de ce côté de la maison tout est parfait. Aucunes mauvaises herbes, un gazon comparable à celui d’un terrain de golf, le tuyau d’arrosage parfaitement rangé, enroulé aussi bien qu’un neuf, les vélos alignés sur le côté du garage, aucune toile d’araignée dans les angles… c’est pas possible, Julie doit passer sa vie à nettoyer.
Je sonne et la porte s’ouvre presque immédiatement.
— Charlotte, je suis contente de te voir. Entre.
Il me semble que ses joues ont rosi en me voyant, mais ça doit être mon imagination. Je fais mine de retirer mes tongs alors qu’elle m’en empêche.
— J’ai installé la terrasse, on sera mieux dehors, je pense. Garde tes chaussures, je n’ai pas encore balayé les dalles.
— Parce que… tu balaies la terrasse ?
— Oui, tu sais avec les feuilles, les fleurs fanées et les miettes laissées par les enfants lors des repas… Mais ce matin, j’ai pas encore eu le temps.
— Y a pas besoin de faire tant de chichis pour moi, tu sais.
Julie éclate de rire en disant :
— Je le fais tous les jours, Charlotte. C’est plus pour Tim que pour toi, me confie-t-elle en me faisant un clin d’œil.
J’en reviens pas. Tous les jours ? Punaise… y en a qui ont du temps à perdre. Une fois par semaine et encore… juste avant la venue des amis ou après le passage de la tondeuse pour éviter d’en mettre partout c’est largement suffisant. Surtout qu’au moindre coup de vent, tout est à refaire.
Je manque de réaction alors que Julie continue sa tirade sur ses habitudes de nettoyage. Faut vite que je change de sujet, parce que parler serpillère… moi ça ne me fait pas rêver.
Julie
Je sens mes joues rougir et mes mains trembler.
J’ai embrassé son mari ! Cette image me hante depuis mardi… non depuis le premier baiser. Mais si j’avais réussi à excuser le premier écart, le second, beaucoup plus assumé me rend totalement fébrile ce matin. Parler du ménage et de Tim avec ses exigences me semblent être une bonne idée, même si je vois que Charlotte n’adhère pas vraiment.
— Tu prends un petit café ou plutôt un allongé ?
Sans réponse de sa part, je me retourne et la découvre les bas ballants au milieu du salon alors que j’étais déjà sur la terrasse. Je souris, reviens vers elle et répète :
— Tu veux un café ? Ou tu préfères autre chose ?
— Café… volontiers.
Une fois près de la table, elle tire une chaise, dépose les croissants sur la table et son sac à ses pieds. Je sors une assiette que je place sur le plateau déjà préparé, ajoute la cafetière italienne chaude et remplie du précieux nectar et rejoins Charlotte sur la terrasse.
— Le soleil n’est pas encore trop chaud à cette heure, mais tu aimerais que j’installe le parasol ?
Elle secoue la tête, expliquant qu’elle adore la chaleur des rayons. Celui du matin est celui qui la fait le moins rougir.
— Je suis repartie avec un beau coup de soleil, dimanche, rigole-t-elle.
Je la remercie pour les croissants, dépose une serviette devant elle et lui demande si elle aimerait plutôt une assiette.
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