J’ai à présent assez d’informations pour prouver que Mort est innocente. Il faut cependant trouver le vrai meurtrier, et venger Futur. Avec tout ce que j’ai récolté, il est temps de passer au procès.

Quand j’arrive dans la plaine des réunions, je vois Fait en face de moi, Haine juste derrière lui ; Vie et Amour se tiennent dans mon dos pour me soutenir tandis Création nous regarde d’entre ses nuages.

Création : Je ne comprends pas ! Je ne comprends pas ! Vous dites que Futur est mort ? C’est quelque chose, c’est quelque chose qui n’avait jamais eu lieu ! En êtes-vous sûrs ?’

Fait : Futur est mort.’

Création : Si Fait l’affirme, si Fait l’affirme, alors ce doit être vrai.

Toujours autant de tact, mais, pour une fois, je suis d’accords avec lui.

Création, dépassé par les évènements : Alors que devons-nous, alors que devons-nous faire ?’

Moi : Nous allons découvrir ce qui s’est passé. Nous aurons ensuite besoin de votre jugement pour décider du châtiment du coupable.’

Création : Bien, bien, je vais faire de mon mieux pour juger.

Moi : Je propose que Fait parle en premier. Il est doué pour résumer les choses.’

Hélas, il est aussi doué pour avoir le dernier mot. Je le laisse donc donner son point de vue pour ensuite prouver qu’il a tort.

Fait : Je vais parler en premier. Il y a trois cycles, le cadavre de Futur a été trouvé. La personne ayant découvert le corps était moi. J’ai alors prévenu le plus de personnes possible. Arrivés sur la scène du crime, nous avons trouvé l’arme du crime. L’arme du crime est une faux qui appartient à l’accusée, Mort. Le corps a été coupé en deux. On peut donc conclure que Mort a utilisé sa faux pour tuer Futur.

Il est temps pour moi d’intervenir.

Moi : Hélas, Fait, je suis parvenu à une autre conclusion.’

Création : Que veux-tu dire ? Que veux-tu dire ? Ne vous êtes-vous pas mis d’accord sur les faits ?’

Moi : Non, effectivement. Fait pense que Mort a tué Futur, ce que je ne pense pas.’

Fait : Il n’y a rien d’autre à croire. La faux est une chose dangereuse. Un mal devait en résulter.’

Moi, le manipulant : Je vois que tu essayes de nous dire à quoi sert la faux.’

Fait : Cette faux est la faux de Mort. Cette faux est utilisé pour tuer.’

Moi : Seulement pour tuer ?’

Fait : C’est ce que je dis.’

Moi : Et bien tu as tort !’

Fait ouvre grand les yeux.

Moi : L’usage premier de la faux est de diviser les cellules !’

Fait s’apprête à répliquer, mais Création l’interromps.

Création : En effet, en effet, j’ai créé cette faux pour la cette raison. Elle coupe parfaitement, elle coupe parfaitement n’importe quel objet, quelle que soit sa taille. Donc elle est utilisée, donc elle est utilisée pour diviser les cellules.’

Fait : Qu’importe. Même si elle n’a pas été conçue pour tuer, elle peut très bien être utilisée pour tuer.’

Moi : Justement, elle a servi à trancher quelque chose d’autre. Autre que des cellules.’

Fait : Elle a servi à couper Futur.’

Je dévoile alors ma nouvelle pièce à conviction.

Haine : Qu’est-ce que c’est ?

Moi : Ce sont des roches !

Fait : Ces roches n’ont rien à voir avec quoi que ce soit.’

Moi : Si ! Ces pierres sont un bon exemple de ce que peut faire la faux. Je vous demande d’examiner l’entaille…’

Fait : Ces roches sont tranchées nettement en deux.’

Moi : Voilà ! Quelque chose ne vous saute pas alors aux yeux ?’

Fait : Ce sont juste des rochers coupés par la faux. Ils sont hors contexte.’

Moi : Mais, voyez vous, il y a une certaine contradiction avec ceci !’

Je montre soudain une image représentant le corps de Futur. Fait se met aussitôt en colère.

Fait : Tu n’étais pas censé t’approcher du corps.’

Moi : C’était nécessaire. Et j’ai découvert quelque chose : la coupe. Elle ne ressemble en aucun point à celle des roches. Donc, j’affirme que Futur a été tué par autre chose que ce qui a tranché ces pierres. En conclusion, Mort est innocente.’

L’espace d’un instant, Fait semble déconcerté. Il reprend cependant contenance bien trop vite.

Fait : C’est ridicule. On peut très bien faire une séparation en courbe avec cette faux. Ce n’est pas parce que cela n’a pas été fait sur les rochers que c’est impossible. Cette parodie de procès va cesser sur le champ, et je vais invoquer le jugement de Création.’

La situation m’échappe. Fait a raison, je n’ai rien établi d’utile. Je dois agir maintenant, sinon Mort sera déclarée coupable. Je lui ai promis ! Je regarde anxieusement autour de moi, et j’aperçois alors la faux. J’ai trouvé !

Moi : Bien, bien, bien. Mesdames et messieurs, je vais vous prouver que cette faux n’a pas pu tuer Futur !’

Fait : Tu ne peux pas prouver une telle chose.’

Moi : On parie ?’

Alors, devant tous les yeux fixés sur moi, je me coupe en deux avec la faux que Mort m’a prêtée. Amour hurle de terreur, Vie tournoie sur lui-même, Fait sursaute, mais Haine reste impassible.

Haine : Je hais les gens qui se conduisent de manière stupide !’

Vie : Oh ! Regardez, il se régénère.’

Haine, se frappant le front : Le Grand Crystal ! J’avais oublié. Fait, je hais quand tu effaces mes souvenirs !’

Une fois en un seul morceau, je reprends mon souffle. Ce que j’ai fait était risqué.

Amour : Mystère ! Tu as l’air en pleine forme. J’aime quand les gens ont l’air en pleine forme !’

Moi : Et voilà ! J’ai été tranché sous vos yeux par cette faux, et pourtant, je suis toujours entier. Tout cela grâce au Grand Crystal. La faux n’a pas pu me tuer, et ne pourrait tuer aucun d’entre nous. Elle n’a donc pas pu tuer Futur !’

Fait, qui ne perds pas le nord : Alors comment proposes-tu que ce meurtre ai été commis ?’

Moi : A partir de maintenant, je ne suis plus sûr de rien. Toutefois, j’ai une théorie.’

Fait : Tu vas nous exposer ta théorie.’

Moi : Patience, je dois d’abords poser une question.’

Fait : Tu vas poser ta question.’

Moi, à Fait : C’est à propos de la Chambre des Faits. Tu peux y téléporter ce que tu veux ?’

Fait : En effet. Tout objet dans mon champ de vision peut être téléporté dans le Chambre des Faits.’

Moi : Et peux-tu téléporter des moitiés d’objets ?’

Fait, suspicieux : Je vois où tu veux en venir.’

Moi : Réponds simplement à ma question.’

Fait : Oui, il est effectivement possible pour moi de ne déplacer que la moitié d’un objet dans la Chambre des Faits. Quand seule la moitié d’un objet est intéressante, par exemple.’

Vie : Vous pourriez donc ne téléporter que la moitié d’une personne, monsieur Fait ?’

Haine : Pourquoi Fait a-t-il autant de pouvoirs géniaux. Je hais ces pouvoirs !’

Moi : Donc, même sans connaître le motif, voilà ma théorie : Fait a tué Futur en ne téléportant qu’une moitié de son corps ! Les deux moitiés étant séparées, le Grand Crystal ne pouvait pas régénérer Futur, puis une fois mort, Fait a ramené la moitié de la Chambre des Faits près de l’autre.’

Je marque une pause.

Moi : Qu’as-tu à répondre à cela, Fait ?’

Fait, après quelques instants de réflexion : Ta théorie est intéressante. Toutefois, elle présente un défaut majeur.’

Moi : Vraiment ? Lequel, si je puis me permettre ?’

Fait : C’est très simple : je n’ai pas tué Futur.’

Moi : En quoi ceci invalide-t-il ma théorie ? Ce n’est pas juste par ce que tu dis que…’

Je m’interromps. Il a raison.

Fait : Je n’ai pas tué Futur.’

Création : Je comprends ! Je comprends ! Il est impossible pour Fait de mentir ! S’il dit, s’il dit qu’il n’a pas tué Futur… alors il n’a pas, alors il n’a pas tué Futur !’

Cette révélation est indubitablement inattendue. Je suis certain que Fait est l’assassin, mais il ne veut pas le confesser. Il doit normalement dire la vérité. Ou bien son inaptitude à mentir serait un mensonge depuis le début ? Impossible, Création lui-même vient de la confirmer. Peut-être ne croit-il pas avoir commis ce crime ? Cela pourrait expliquer la situation.

Fait : Cela n’explique rien du tout.’

A ce moment-là, je comprends la raison de son obstination.

Moi : Si ! Grâce à la pièce à conviction centrale de cette affaire : le Grand Crystal !’

Fait : Je n’ai pas tué Futur.’

Moi : Je suis désolé, mais tu l’as bel et bien tué. Tu ne t’en souviens plus, c’est tout.’

Fait : Je n’ai pas tué Futur.’

Moi : Téléporter des choses dans la Chambre des Faits n’est pas ton seul pouvoir, tu peux aussi effacer des souvenirs !’

Fait : Je ne peux effacer que les souvenirs qui concernent le Grand Crystal.’

Moi : Voilà ! Réfléchis bien. Où le meurtre a-t-il eu lieu ?’

Fait : Je n’ai pas tué Futur.’

Moi : Si ! Tu l’as tué, puis tu as effacé tes propres souvenirs de ce qui s’était passé autour du Grand Crystal.’

Fait : Je n’ai pas tué Futur.’

Moi : En es-tu sûr ? Si tu peux effacer les souvenirs, je me demande si tu peux les faire revenir ?’

Fait : Je vais le faire immédiatement pour te prouver que je ne l’ai pas tué.’

Un flash rouge illumine la plaine des réunions. Fait s’immobilise.

Fait : Que… je ne l’ai pas… Que… je… Je vais… te prouver… que… Je… ces souvenirs…Ils… sont… Ils sont à moi ?’

Il s’arrête.

Fait : Père Création.’

Création : Qu’y a-t-il ? Qu’y a-t-il ? Fait ?’

Fait : Père Création, pardonnez moi, s’il vous plait. J’ai commis l’impardonnable… J’ai… J’ai tué Futur.’