Après la discussion d’avec ma mère, un mince espoir me revint et je passais beaucoup de temps à scruter mon téléphone et ma boîte aux lettres, dans l’espoir qu’Adam me contacterait. Malgré la fureur avec laquelle je l’avais rembarré, j’attendais quand même de ses nouvelles. Je n’avais ni son adresse postale, ni son adresse électronique. Je possédais seulement son numéro de téléphone et je n’étais pas sûre qu’il marchât encore, étant donné qu’il était parti pour un certain temps à l’étranger.

Têtue comme une mule et aveuglée par une colère tenace, je ne voulais pas prendre les devants, considérant que l’affront venait de lui, qu’il m’avait menti sciemment par omission, avant de se volatiliser comme le voleur de cœur qu’il était. Je refusai donc d’aller chercher ses coordonnées auprès de ses parents et préférai me languir en louchant sur ma boîte mail, sur ma messagerie de téléphone, sur ma boîte aux lettres, ou regarder le ciel, au cas où un pigeon voyageur venait à me délivrer de ma lancinante attente... Je n’en démordais pas, c’était à lui de se faire pardonner.

Passées quelques semaines, le désespoir commença à me gagner. Mon attente durait et je priais désormais pour recevoir n’importe quel signe de sa part, n’importe quoi qui me laisserait penser que tout le discours que ma mère m’avait tenu avait du sens.

Un miracle, voilà ce que j’espérais, un miracle. Mais je ne voulais pas le provoquer en reprenant contact avec lui. Je voulais que ce soit lui qui fasse le premier pas, pour me prouver qu’il tenait vraiment à moi. Adam devait se douter de ce que je ressentais pour lui, il devait forcément savoir que j’étais folle amoureuse, alors pourquoi tardait-il autant ? Malgré les questions qui me taraudaient, je me refusai à me livrer avant qu’il ne le fasse en premier. J’avais besoin que la démarche vienne de lui, j’avais besoin qu’il me montrât enfin combien je lui étais précieuse et que sa vie sans moi avait perdu de son attrait. Cela aurait été pour moi le symbole de sa rédemption, de son évolution à mon égard, celui grâce auquel j’aurais pu tout oublier... Sans ce geste fort de sa part, je ne voyais pas l’intérêt de continuer à y croire.

Le miracle n’arriva pas.

Un an passa depuis l’épisode de la grotte, et je ne reçus aucune nouvelle de lui, pas un mot, pas un signe de vie, et ce, pendant une année toute entière. Je dus me rendre à l’évidence que mon bourreau des cœurs, qui n’avait jamais aussi bien porté ce qualificatif, n’en avait absolument rien à foutre de moi.

Après une période d’optimisme, où la graine que ma mère avait semée en moi avait commencé à germer, j’avais cessé de croire à toutes ces balivernes romantiques et décidé d’étouffer dans l’œuf l’espoir que j’avais laissé apparaître par mégarde. Ma mère avait dû se tromper. Le premier amour, aussi puissant soit-il, n’avait peut-être d’autres raisons d’être que celle de nous préparer pour l’avenir. Il devait avoir pour objectif de nous habituer à cette suite de déconvenues et de peines qui allaient parsemer notre existence d’embûches et de tristesse.

J’étais devenue morose et négative. Déprimée, je voyais tout en noir et, au fil des mois écoulés, la colère et la rancœur cohabitaient de plus en plus dans mon cœur, remplaçant sans vergogne tous les merveilleux sentiments que j’avais nourri à l’encontre de mon ancien prince charmant.

Quand j’eus vent de son retour en France par ma mère, qui l’avait bien évidemment appris de la sienne, je me mis à trembler. De rage, de peur, d’amertume, de dépit. Un combo dangereux. Lui et moi, à nouveau sur le même sol, réunis du même côté du globe... l’idée me mettait au supplice et me donnait envie de disparaître six pieds sous terre.

Alors, quand ma mère m'informa que nous étions invitées par sa famille à fêter son retour dans une grande salle polyvalente, je faillis en tomber de ma chaise.