Nous avions passé la journée en ville et dormi le soir à l'auberge. À l'aube, nous reprîmes la route. Je n'avais pas revu le métamorphe et c'était une très bonne chose !

— Au fait, je viens de penser à quelque chose ! J'aurais dû te le dire plus tôt, je suis trop bête ! Il y a une certaine Neoline qui voulait te voir... Elle m'a dit de te faire passer le message, j'avais oublié. Je suis désolée.

— Ne t'inquiète pas, je suis allé la voir hier, pendant que vous étiez au magasin. C'est une amie à m...

Il stoppa net sa phrase et s'arrêta. Zelen et moi l'imitions, surpris. Sariel nous mima de nous taire, et, la seconde d’après, il me projeta quelques mètres plus loin. Dans ma chute, j'aperçus un objet fendre l'air entre nous. Nous l'évitions de justesse.

Atterrissant sur les fesses, je roulais sur le côté pour me relever. Soupçonnant une attaque, j'adoptai une posture de combat, me saisissant d'un de mes sabres. Si j’avais su que j’en aurais besoin si vite…

Quatre personnes, trois hommes et une femme, sortirent des bois en face de nous. Tous étaient habillés de noir et étaient armés d’une épée. Je jetai un œil inquiet au seul vrai combattant de notre groupe, tandis que nos ennemis s'approchaient de nous pas à pas. Le plus grand et imposant se tenait en tête.

Sariel eut un sourire un peu malsain en les voyant.

— Pas besoin de s'affoler, affirma-t-il. ce ne sont que des voleurs !

— Pour qui tu te prends ? Ne parle pas de nous comme ça ! répliqua agressivement l'homme de droite.

— Tu vas voir, quand on t'aura refait le portrait, tu riras moins ! ajouta celui de gauche.

Un grimace se dessina sur les lèvres du leader tandis qu'il essayait de sourire. Sariel, lui, pouffa de rire avant de répliquer, taquin :

— Tu rêves éveillé ! Mais si tu tiens vraiment à te battre, je t'attends.

Cette simple phrase sembla les énerver encore plus. La femme prit la parole :

— Al ! Tu vas t'occuper de la gamine, Ed et moi on prend le prétentieux. Roy, tu te charges du dernier.

Mon corps se raidit, tandis que le prénommé Al avançait dans ma direction. Je fis les gros yeux à Sariel, auxquels il me répondit par un clin d'œil, avant de répondre :

— Parfait !

— Pardon ? répliquai-je malgré moi, ce qui le fit rire.

Je m'étais déjà battu auparavant, de vrais combats, mais jamais seule contre un adversaire. Merde, je paniquais !

— Il n'y a aucune raison de s'inquiéter. Ces rigolos ne sont rien comparés à nous.

Ce fut la phrase de trop : ses deux adversaires se jetèrent sur lui, et le combat commença. Une branche craqua à quelques mètres de moi, me rappelant que moi aussi, j'avais un combat qui m’attendait. Je pris une profonde inspiration et me concentrais tandis que l'homme avançait dans ma direction.

Je resserrais mon emprise sur mon arme pour empêcher ma main de trembler et je tentais d'analyser la situation. L’homme était plus grand que moi, mais il n’était pas très musclé. Son épée était fine et il avait le pas lourd. Je n’eus pas le temps d'observer davantage qu'il se jeta sur moi, l'épée en l'air.

J’esquivais aisément, et j'en fus la première surprise. Mon corps réagissait instinctivement, en toute maîtrise, et mon stress diminua. Comparé à Enriel ou à Delnan, il était beaucoup moins fort !

Cela dit, je me contentais de parer et d'esquiver ses attaques, sans vraiment lui porter de coup... et c'est à ce moment-là que je réalisais quelque chose : je ne me contentais pas de la défense parce que j'avais peur d'être blessée... je ne l'attaquais pas parce que j'avais peur de le blesser...

D'un coup de pieds dans les côtes, je l'envoyais valser au sol. Je risquais un coup d’œil à mes camarades. Zelen semblait avoir un peu plus de difficultés contre son adversaire que moi, sans pour autant que celui-ci ait le dessus. Quand à Sariel, il semblait s'amuser avec les siens comme un chat joue avec sa proie...

Mon adversaire se releva finalement et repassa à la charge. Il attaqua sur ma gauche et j'évitai de nouveau sans problème. C’était une situation ridicule et je devais faire quelque chose pour dépasser ça ! Sinon, nous finirions par nous épuiser.

Soudainement, alors que je me battais à la fois contre mon adversaire et mes propres pensées, un corps inanimé s’interposa entre nous. Je fus stupéfaite de la violence dont avait fait preuve Sariel pour se débarrasser de l'homme. Celui-ci avait littéralement volé sur plusieurs mètres.

— Kaely, Zelen, il faudrait accélérer le mouvement, vous ne croyez pas ? se moqua celui-ci.

Je marmonnais des insultes à son encontre. Un coup de pied bien placé manqua de peu de m’atteindre. Il fallait que j’arrête de réfléchir et que je me mette à agir très rapidement !

Je fis le vide complet dans ma tête.

Lorsque mon adversaire s’élança de nouveau dans ma direction, une vague de confiance en moi me parcouru et un sourire se dessina sur mes lèvres. Il attaqua avec son épée mais je le désarmais facilement. Il enchaîna avec un coup de pied, que j’esquivais en me courbant vers l’arrière. J’étais pliée en deux, si bien que mes mains touchaient le sol. J’aperçus par-dessus moi passer le pied de mon adversaire et celui-ci perdit l'équilibre en ratant son coup.

En poussant sur mes pieds, je parvins à me redresser, et laissant mon épée au sol, je m’élançais à mon tour sur lui. J’étais plus à l’aise avec le combat à mains nues qu'à l'épée. Déjà, parce que c’est celui que j’avais le plus travaillé, mais également car c’était le moins mortel des deux.

J’avais largement le dessus sur lui, je le touchais plusieurs fois, et la seule raison pour laquelle il n’était pas K.O., c’était parce que je manquais de force et de précision. Mais encore quelques coups et il finit enfin par rester face contre le sol.

J'en profitais pour reprendre mon souffle lorsque des applaudissements m’interrompirent. Sariel... Me félicitait-il ou se moquait-il de moi ? Probablement un peu des deux.

Zelen était à côté de lui, son adversaire au sol.

— La fin était mieux que le début ! On dirait que tu as fait ça toute ta vie ! Foutus gènes, dit-il en riant.

Je haussai les épaules sans répondre.

***

La ville de Lestat était si bruyante que nous savions que nous étions arrivés avant même de l'apercevoir. C'était pourtant une petite ville, mais on l'entendait à des kilomètres à la ronde.

La nuit était encore jeune lorsque nous arrivâmes enfin, et pourtant, tout était éclairé comme en plein jour. Il y avait du monde dans les rue, dont beaucoup de personnes probablement alcoolisées ou défoncées. On entendait de la rue la musique sortir de certains bâtiment, si fort que je craignais de perdre l'ouïe si je rentrais à l'intérieur. Mais je crois que le pire, c'était l'odeur : un mélange de transpiration, d'alcool et de vomis... A plusieurs reprises avant d'atteindre notre destination, nous avions même été sollicités par des dealers et des prostitués. Une ville charmante...

— On va se poser dans cette auberge, informa Sariel.

Le bâtiment qui se trouvait devant nos yeux était très grand et assez pittoresque. La rue, bien qu'à l'écart du centre, était bruyante. La nuit allait être longue...

— Les rumeurs disent que c'est un lieu commun d'échanges. On commencera à enquêter demain, on se fera passer pour des clients et on verra bien où ça nous mènera !

A peine avions nous posé un pied à l’intérieur qu’une discussion attira notre attention. Plus loin, deux hommes se disputaient. L'un deux parlaient si fort qu'on devrait plutôt dire qu'il criait. Il faisait peine à voir avec ses vêtements trop grands et sales. Il avait de nombreuses cicatrices, le dos courbé et des difficultés à parler. Il s'adressait à son exact opposé : l'autre était bien habillé, coiffé et rasé. Il se tenait droit et parlait calmement, malgré son agacement évident.

— Qu'ai-ce que tu croa ? L'patron y va pas s’déplacai avec just’ pour t’serrer la patte ! C’est qui s’est donnnai du mal pour les obtenir, ces doc’ments, y voudrait pas qu’tu t’en ailles avec sans payai !

Nous nous figeâmes avant d'échanger un regard entendu. Leur conversation semblait très intéressante : cette histoire correspondait étrangement à notre affaire

— Écoute-moi bien, le primate !

— Hein ?

— Pour commencer, tu vas baisser d’un ton. Tout le comté n’a pas besoin de t’entendre. Ensuite, je me répète, je dois vérifier l’authenticité de ces documents et estimer la valeur des informations qu’ils contiennent. Lorsque ce sera fait, et seulement à ce moment-là, mon client vous donnera son prix. C’est non négociable.

Je regardai Sariel et son regard en dit long : moi qui espérais dormir, c'était raté. Je lâchais un soupir fatigué. Mais si c'était bien lié à note affaire, nous gagnerions un temps fou à suivre cette piste.

Ils continuèrent leur conversation à voix basses, mais ne semblèrent pas réussir à se mettre d’accord. Le rustre fini par quitter la pièce au maugréant.

— On le suit ! s'exclama discrètement Sariel en se jetant à sa suite.

Dans notre poursuite, nous faisions tout pour rester discret, mais notre cible ne sembla pas s’inquiéter à un seul moment d’être suivi. Nous traversâmes une bonne partie de la ville, manquant de le perdre au moins trois fois. Lorsque nous débouchâmes dans une clairière, l’homme emprunta un chemin bien caché entre les arbres.

Au milieu des bois, une petit clairière donnait accès à ce qui ressemblait à une grotte ou à un souterrain. L'homme se dirigea vers l'entrée, mais alors qu'il venait à peine de déverrouiller la porte, Sariel s'interposa. Il le plaqua contre le mur, lui mettant un couteau sous la gorge.

— De quels documents parlais-tu à cet homme à l’auberge ? demanda-t-il.

— Ké ? Mé quels doc’ments ? fit l'interrogé, faignant l’innocence.

— Ne te fous pas de moi : je t'ai entendu, menaça le koelien en resserrant sa poigne. Réponds ou ça pourrait mal aller pour toi.

Le suspect commençait à paniquer : la situation semblait totalement le dépasser alors qu'il tremblait maintenant de tous ses membres. Il gémit mais ne répondit pas.

Sariel avait d'ordinaire plus une tête adorable qu’effrayante, mais il était visiblement capable de faire peur.

— On va faire plus simple, emmène-nous à ton patron, le voleur. Lui saura certainement nous répondre. Tu n'es qu'un homme de main, impossible que ce soit toi qui ai réussi à pénétrer dans le clan des koeliens.

— Quel patron ? Mi comprend pas !

Sariel leva son poing et l’abattit à quelques centimètres de la tête de l'homme, fissurant légèrement le mur de terre. Le teint de notre cible devint livide et il s'écria :

— Ok, ok ! Ye vous emmène, suivai-moi, me faîtes pas d’mal…

— Voilà qui est mieux. Je préfère les personnes obéissantes. Tâchez de vous en souvenir.

Il relâcha l'homme, et lorsque celui-ci nous tourna le dos pour passer la porte, je vis Sariel faire la grimace en massant sa main. Je lui lançais un regard entendu : avait-il vraiment eu besoin de se faire mal pour lui faire peur ?

Les koeliens avaient beau être plus résistants que les humains classiques, ils n’étaient pas invincibles. Sa main était à peine égratignée, mais je vis qu'elle commençait à bleuir. Je levais les yeux au ciel : quel idiot.

— Et dis-moi, ton patron… il a dérobés ces documents simplement pour les vendre au plus offrant ou pour nuire aux koeliens ? questionna mon coéquipier.

— Ye peux pas vous dire, mon patron seul y sait pourquoi y fait ça. Ye suis qu'une lien ent’ lui et l’client. Par sécur’té, y veut pas le dire.

— C'est vachement plus sécurisé, ironisai-je.

Il nous entraîna à travers les souterrains pendant plusieurs minutes. C’était un vrai labyrinthe ! Il ne fallait surtout pas me demander de ressortir rapidement, je n’en serais pas capable !

— Bon, on arrive bientôt ? râla Sariel.

— Oué môsieur, c'la porte juste là.

Sariel passa la porte en premier, et notre guide nous fit signe d'entrer avant lui. Suspicieuse, j'empêchais Zelen d'entrer et fis signe à l'homme de passer en premier. J’essayais d’adopter mon regard le plus sévère.

— Toi d'abord, ordonnais-je.

Il se précipita à l'intérieur et se mit dans un coin, juste à côté de l’entrée, la tête baissée et les épaules voûtées. Je fis un pas à l’intérieur et jetais un regard alentour avec surprise. La pièce n’était pas vraiment petite mais elle n’était pas grande. Elle était complètement vide, à l’exception d'une ouverture dans le mur, près du sol, à peine assez grande pour que quelqu’un s’y glisse. Le trou était fermé par des barreaux en métal.

— Il n'y a rien ici... commenta Sariel.

Je fronçais les sourcils, et alors que j’allais protester, l’homme se précipita derrière moi, poussa Zelen à l'intérieur avec nous et abaissa un levier à l'extérieur de la pièce. Zelen manqua de tomber, et je le rattrapais de justesse, bien qu'il ait failli nous faire tomber tous les deux. Une énorme porte grillagée tomba au sol, nous enfermant. La pièce me parut soudainement beaucoup plus petite.

— Amusai-vous bien ! lança gaiement l'enfoiré avant de s’en aller en riant.

Sariel eu beau lui ordonner de revenir et de nous ouvrir la porte, rien n’y fit.

— Quand je vais le choper celui-là… menaça mon coéquipier.

Zelen tenta de trouver un moyen de nous sortir de là, mais j'avais un mauvais pressentiment. Un crissement lent et régulier nous fit tourner la tête vers le trou dans le mur dont les barreaux s'ouvraient. J’échangeais un regard avec mes camarades : peu importait ce qui s'apprêtait à sortir, nous étions dans une belle merde.

Ni une, ni deux, nous dégainâmes nos épées. Sariel sortit également de son sac un objet en bois incurvé. Lorsqu’il l’accrocha à son avant bras, je compris que c’était une sorte de bouclier miniature.

Un grognement s’échappa du trou dans le mur, suivi de lourds bruits de pas. Un léger grincement nous indiqua que ce qui arrivait avait des griffes, et la respiration lourde que c’était une grosse bête. Un frisson me parcouru tandis que je resserrais la poigne sur mon arme.

J’essayais de relativiser : le trou dans le mur ne faisait pas plus d’un mètre de hauteur, ce qui allait en sortir ne devait pas être si gros... si ? Laissez-moi dans mon déni encore quelques secondes…

La créature renifla l’air et lâcha un grognement. La pièce dans laquelle nous étions enfermée était sombre, et lorsque la créature émargeât finalement, j’eus du mal à distinguer quel genre d’animal j’avais face à moi. Quatre pattes énormes, une gueule massives pleines de dents pointues, une crinière et des cornes. Elle était maigre, mais musclée.

— Oh merde... jura Sariel, ce qui m’angoissa davantage.

— Quelle est cette créature ? demanda Zelen.

— Une chimère... répondit Sariel en déglutissant.

Je remarquais quelque chose de bizarre au bout de sa queue... comme un dard ? Ça n'annonçait rien de bon en tout cas. Je ne pensais jamais avoir ce genre de réflexions, mais à cet instant, je priais pour ne pas avoir l’air appétissante. Je commençais alors à regretter de ne pas être chez moi, à l'abris des remparts de la ville... Mais, combien même je le souhaitais aussi fort que j’en étais capable, ça n’arriverait pas. Je devais être forte et me battre !

— Une chimère ? répétais-je, sans connaître.

— C’est une espèce d’animal rare que l'on trouve normalement à l'est, elles vivent dans les Forêts Noires et...

— Et si on gardait la leçon de zoologie pour plus tard, tu veux ? C’est pas tout à fait le moment. Dis-nous juste comment on s’en débarrasse.

La créature nous regardait avec des yeux haineux. Elle retroussa ses babines mais n’attaquait pas encore.

— Comme n’importe quel animal, répondit-il en haussant les épaules, l’air faussement indifférent.

Il ne semblait pas terrifié comme je l’étais, mais il n’était pas confiant non plus.

— Vous deux, vous restez en retrait. Je m’en occupe. Faites surtout très attention à la queue, elle est venimeuse.

Je n’objectais pas et reculais de deux pas, lentement. Zelen vint se placer à mes côtés, sans geste brusque. La créature nous suivit du regard, elle c'était Sariel qu'elle surveillait vraiment. Elle fit un pas prudent vers lui, et alors qu'elle passait dans un rayon de lumière, je vis qu'elle avait de nombreuses cicatrices sur le corps. Ce ne devait pas être son premier combat.

La chimère grogna de nouveau, montrant les crocs et bavant comme un affamé devant un morceau de viande. Et putain ce que je détestais cette analogie...

Sariel resserra sa prise sur son épée, prêt au combat, et l’animal se jeta sur lui. Il esquiva tant bien que mal les coups violents de la bête et essaya, sans succès, de contre-attaquer. Lorsqu’il attaquait, il s’exposait un peu trop à mon goût, et il manqua plusieurs fois de se prendre un coup fatal. La chimère était bien trop rapide pour lui mais il ne pouvait pas se contenter d'attendre qu'elle se fatigue...

Je me sentais si inutile ! Et la situation ne tournait pas à notre avantage, bien au contraire. Plus le combat durait, plus Sariel était lent. Il fallait que je fasse quelque chose pour l’aider ! Me battre à ses côtés aurait été stupide, j’en avais conscience : je le gênerai plus qu’autre chose. Et Zelen pensait la même chose que moi : si Sariel n’était pas capable de la toucher, alors ce serait du suicide que l'un de nous essaie.

— Réfléchis, réfléchis ! marmonnai-je pour moi-même en scrutant la salle du regard.

Il devait y avoir quelque chose ! Mais la pièce était vide... à part quelques vieux morceaux de bois dans un coin. Je fis le tour de ce que Lesgal m'avait vendu. Je n’étais pas suffisamment douée pour lancer mes couteaux sans risquer de toucher Sariel, et mes sabres, n’en parlons pas.

Nous avions affaire à un animal, ne pouvions-nous donc pas jouer sur notre avantage, à savoir : l’intelligence ? Un plan, un plan, UN PLAN !

...

Rien, toujours pas de plan. Et si je me jetais simplement dessus ? Mauvaise idée... Mais je ne pouvais pas rester là à ne rien faire ! Il fallait que je tente un truc, n'importe quoi !

Mon attention se reporta sur le combat. La créature attaqua avec ses griffes, et Sariel para avec sa protection au bras. Il envoya à la suite un coup d’épée qui atteignit la bête au niveau de l’épaule, ce qui l'entailla légèrement. Celle-ci grogna et chargea de nouveau.

Une idée jaillit soudain dans ma tête ! Les prédateurs sont attirées par le sang, non ? Si je me faisais un entaille, je pourrais peut-être distraire l’animal juste assez longtemps pour que Sariel puisse la tuer !

Je rangeais mon sabre et sortit une lame de ma sacoche. Je posais la lame sur mon avant bras inspirais profondément… puis je me figeais. Ça risquait de faire mal… non mais à quoi je pensais sérieusement ? Comme on dit : à situation désespérée...

Je tranchai la peau vivement, oubliant mes craintes, mais la douleur fut telle que je lâchais l’arme qui tomba bruyamment au sol en laissant échapper un gémissement de douleur.

Surpris, les deux combattants se tournèrent dans ma direction, et malheureusement pour nous, la chimère fut la première à réagir. Elle donna un coup de patte à Sariel, l’envoyant voler contre le mur. Sonné, il ne se releva pas tout de suite.

C'est alors que la créature sauta sur moi, tout juste désarmée, et me fit tomber sur le dos. Instinctivement, face à sa gueule pleine de dents, je me protégeais le visage de mon bras droit, et la créature s'en saisit vivement, enfonçant ses crocs dans ma chair. La bête sur moi, mon bras immobilisé, j’étais coincée.

Zelen enfonça son épée dans le ventre de l'animal, mais loin de le tuer, celui-ci l'envoya également voler de sa patte arrière. Du sang commença à couler de long de mon bras et des gouttes tombèrent sur mon visage et mes vêtements. Je lâchai un vrai cri de douleur cette-fois. C’était insupportable : je sentais ses dents bouger à l’intérieur de mon bras alors que l’animal se délectait de mon sang. Je sentis sa langue lécher ma plaie et manquais de hurler à plein poumons. Et de vomir. Ma vue se brouilla et mes forces commençaient à m’abandonner. Il fallait que je réagisse rapidement, mais la douleur et la peur m’en empêchaient.

Sariel était au fond de la pièce, et semblait tout juste conscient : sa tête saignait et il tremblait. J'en déduisis donc qu'il ne me serait d'aucune aide, mais lui ne semblait pas de cet avis. Il tenta de se relever, mais en vain : il retomba aussitôt. Zelen, lui, était inconscient.

De ma main libre, je tentais d'atteindre ma sacoche. Ce n'était pas évident, chaque mouvement multipliait la douleur, et à tout moment la chimère pouvait décider d'arrêter de jouer et de m’arracher de bras.

Je réussis difficilement à attraper une autre de mes lames. Elle était si petite comparée à la bête, mais je n'avais pas d'autre solution. Je la plantais à la base de son cou, mais je n'avais pas la force de la bouger pour trancher le reste de sa gorge. La bête hurla, lâchant mon bras par la même occasion. Mais, loin d'être vaincue, elle tentait de déloger l'arme. C'est à ce moment-là que Sariel, qui tenait tout juste sur ses jambes, enfonça son épée dans son crâne. Elle s'écroula alors au sol, morte.