Execution
- Vous ne l’avez même pas empoisonné !
Théophile était désormais la victime du lynchage collectif organisé par les six. Son échec plus que cuisant faisait de lui la risée absolue du gang. Evidement, ses collègues ne s’étaient pas privés de lui améliorer sa réputation autour. Il n’était hélas pas en position de force pour protester.
- Je ne comprends pas… il a bu son thé pourtant…
- Taisez-vous ! Vous êtes nul, archinul même !
- Vous êtes une honte vivante !
- On devrait vous confisquer votre part de l’argent.
« Comme d’habitude, Marcel est toujours là pour empocher un maximum de pognon.
- Quelqu’un a une suggestion ?
- Oui, j’en ai une !
Martin venait de se lever en arborant une mine réjouie et légèrement condescendante. Il fit planer le silence pendant quelque instant, et quand Francis s’apprêtait à lui demander son idée, il prit les devant.
- Cette fois ci, vous allez tous attendre chez moi. Je vais faire creuser une tombe rapidement et préparer tout pour que ce soit très rapide. Nous allons l’enterrer dès qu’il sera mort !
- Pauvre niais ! Pour que le testament s’applique, il faut que le décès soit reconnu. Si vous l’enterrez tout de suite, tout cela ne servira à rien.
- Ma très chère Madeleine, me prendriez-vous pour un débutant ?
« Bien sûr que oui !
- Après l’échec de vos collègues, je suis en droit de douter.
- Doutez si vous voulez. Sachez que j’ai prévenu un notaire que François est mort il y a quelques heures. Il sera présent lors de notre « enterrement » pour constater que notre pauvre ami est bien mort.
« Habile, habile. Il est plus malin qu’il n’en a l’air…
- Si ça marche, je crois que vous remonterez dans mon estime.
- Je me trompe, ou je suis de toute façon au niveau zéro de votre estime ?
- L’avantage avec vous, c’est que quand bien même vous avez touché le fond, vous continuez à creuser.
Regard méprisant vers Théophile.
- Tout sera prêt pour cet après-midi. J’attends de vous que vous soyez là à temps.
- Tous : Nous le serons !
* * *
- Je me trompe peut-être, mais j’ai remarqué la voiture des autres en arrivant.
- Vous ne vous trompez pas.
- Que viennent-ils faire chez vous ?
- Vous verrez, ça vous concerne…
Silence.
- C’est une surprise ?
- En quelque sorte…
- Mais vous ne pouvez pas me le dire ?
- Tout juste !
« Qu’est ce qu’ils fricotent ?
- Peut être qu’un peu de thé…
« Encore
- Heu… Non merci…
- Vous n’aimez pas le thé ?
- Si, mais je commence à m’en lasser.
- Un café, alors ?
- Non merci.
- Du vin ?
« Il insiste !
- Non ! Je n’ai pas envie de boire aujourd’hui.
« Zut ! Zut ! Zut ! Comment je vais faire, pour l’empoisonner ?
- Un petit gâteau ?
- Non, merci !
- Vraiment rien ?
« Il commence à m’énerver !
- Non, rien, ce sera tout !
« Il va tout faire rater ! Vite, une idée…
Sursaut d’illumination.
- Je voudrais juste, avant la « surprise », vous demander votre avis à propos de quelque chose.
« Allons bon…
- Je voudrais offrir un bouquet à… mentir, une petite amie.
- Une petite amie ? Et vous voulez me demander quoi, à ce sujet ?
- Je lui ai choisi un bouquet. Je voudrais savoir ce que vous en pensez…
« Ils sont complètements gâteux avant l’âge.
- Faites voir…
Soupir.
Martin sortit de la pièce et attrapa un bouquet de roses rouges dans un vase du salon adjacent. Il aspergea les fleurs du contenu d’une petite fiole sortie d’un tiroir. Il revint tout de suite dans le salon où attendait François ; celui-ci était visiblement fatigué de ses clients.
- Déjà, les roses, c’est plus joli quand elles sont en bouton. Faites sentir.
Humage du bouquet.
- L’odeur est très capiteuse, je… je pense… que…
Effondrement dans le fauteuil.
« C’était juste.
Martin siffla immédiatement, puis Théophile et Francis déboulèrent dans le salon, soulevèrent François puis le déposèrent dans un cercueil situé dans une pièce proche ; ils le fermèrent. Ensuite, ils transportèrent la boite à mort dans le jardin où se trouvaient le reste du groupe. Le corps et son costume de sapin furent installés près du trou creusé à la va-vite quelque heures auparavant.
- Ca ne vous dérange pas d’avoir François sous votre jardin ?
- Pourquoi ? Vous croyez qu’il risque de venir m‘emprunter du thé ?
- Non, je parle d’un aspect moral, mais ça ne semble pas vous effleurer l’esprit… Ce qui ne m'étonnes pas vraiment.
- En effet. Bref, un notaire va bientôt venir. Je lui ai fait comprendre que nous voulions l’enterrer rapidement et tout ça… Vite, prenez une mine attristée.
Simone sortit un petit flacon d’eau de son sac à main et déposa quelques goutes au coin de ses yeux. Hortense pressa son visage en vain. Marcel fit son visage de chien battu, ce qui failli faire rigoler Hortense malgré ses compressions faciales. Les autres hommes restèrent dignes, come lorsque l’on perd un ami cher, ou un membre proche de la famille.
Madeleine ne perdit pas le nord. Toujours aussi suspicieuse, elle demanda.
- Dis donc, Martin !
« Elle me tutoie ?
- François, il est bien mort, au moins ?
- Quelle question, je peux vous assurer que…
A ces mots, le cercueil se rouvrit. Une nouvelle fois, François se retrouvais sous le regard médusé des sept. La situation devenait lassante… Il hésita, puis prit la parole.
- Je ne voulais pas trop déranger, mais puisque vous le demandez…
C’est à ce moment là que le notaire arriva derrière la maison, papier et stylo dans la main. Il sembla surpris de voir le mort prendre l’air frais. Néanmoins, il sur garder une certaine contenance.
- Faites-vous un essai pour savoir si ce cercueil est assez confortable, ou bien voulez-vous que je déclare que cette personne est bel et bien en vie ?
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