Chapitre 2 : Premier travail

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Bonjour ! C'est la reprise de ce texte ! Un chapitre tous les deux semaine, en tournante avec Macédoine, qui arrive dès la semaine prochaine ! J'espère que ça vous plaira :) Et vous admirerez la nouvelle couverture :D

LE CHANT DE L'OISEAU SOLITAIRE

Chapitre 2 : Premier travail

Trouver un logement s’est avéré plus difficile que prévu. Les nains n’accordent pas facilement leur confiance, c’est bien connu. Les premiers jours, j’ai dormi à l’extérieur. La nuit, je me logeais dans les granges, sous les étalages vides de la place du marché. Le jour, je tentais vainement de me faire une place. Trois jours passèrent avant que l’un d’entre eux ne cède à mes piaillements de désespoir, malgré mon odeur corporelle peu attirante.

Je ne rêvais plus que d’une bassine d’eau claire pour laver mon corps. Mes vêtements, peu adaptés au voyage et déchiquetés, me collaient à la peau à cause de la sueur et de mes récentes mésaventures. Je commençais à songer à continuer ma route lorsqu’un nain de corpulence importante me barra la route. A son tablier où une enclume était tissée en fils dorés, j’en conclus qu’il était forgeron.

“Eh, petit ! me lança t-il. Tu cherches du travail ?”

Mes yeux s’étaient illuminés de cette flamme qui anime l’obscurité des nuits d’hiver. J’ai lentement hoché la tête, un peu impressionné. Il me fit signe de le suivre et je m’exécutai sans poser la moindre question. La surprise et la naïveté m’avait fait perdre l’usage de la voix. Nous avons marché côte à côte pendant une bonne heure. Il se présenta comme Baragor Beau-Tison, noble forgeron qui servait la famille royale et l’armée avec sa famille depuis cinq générations. Son dernier fils venait de quitter le bercail pour partir à l’aventure et il manquait cruellement de bras pour le travail.

A première vue, il me parut sympathique. Je me présentai à lui comme enfant de bonne éducation, comme ma maman adoptive me l’avait appris, puis je vantai mes mérites et mes forces. La forgeronnerie ne m’effrayait pas, bien que je n’avais jamais pratiqué l’activité, ce que je me gardai bien de lui avouer. Ce ne fut pas la plus brillante de mes idées.

Il m’entraina vers une grande bâtisse en bois qui me laissa entrevoir, l’espace d’un instant, l’espoir de vivre correctement pendant quelques temps. Cependant, je déchantai rapidement. Le forgeron servait une grande famille naine et ce bâtiment était le leur. Je dormirais donc au dessus de l’écurie, dans le grenier où logeait les cinq domestiques de la maison. Soit. Le luxe d’un lit était bien secondaire, j’en avais fait le choix en partant à l’aventure. Mais je n’avais pas prévu la taille du grenier. C’était un minuscule espace clos, rongé par les insectes, l’humidité et incrusté par l’odeur des chevaux juste en dessous. Il y avait à peine la place pour tenir à deux. Alors à cinq ? L’endroit était par ailleurs déjà peuplé et au regard hostile que me lancèrent les deux domestiques à moitié endormis, ma présence les dérangeait.

Je m’installai rapidement dans un des angles. J’y étalais une couverture trouée, offerte par la maison, qui ne me tiendrait pas très chaud en cas d’hiver rude, déposais mes rares affaires, puis je descendis aussitôt pour aider mon nouveau maître. Il m’attendait déjà dans la forge.

Le lieu me déplut immédiatement. La four principal se trouvait au centre d’une minuscule pièce en pierres, sans fenêtre, où les mouvements, déjà compromis par le manque de place, se faisaient plus lents à cause de la chaleur étouffante. Beau-Tison ne paraissait pas dérangé par la fournaise ambiante et m’intima l’ordre d’entrer, alors que j’attendais à l’entrée, pétrifié.

“Quel est ton nom, encore ? me demanda t-il d’une voix chaleureuse.”

Je répondis que je m’appelais Adrick. Ma nourrice m’avait nommé ainsi tout le temps que j’avais vécu chez elle, je ne m’étais pas posé plus que ça la question de ma véritable identité. Je suppose qu’il est trop tard pour s’en soucier désormais : elle a emporté le secret dans la tombe et je ne saurais jamais comment j’ai atterri chez elle.

Le forgeron m’a sourit avec bienveillance et m’a guidé jusqu’à un atelier, derrière le four. Il m’expliqua mon travail rapidement : ranger les lingots de métaux, les armes et les outils à leurs places dédiées. Rien de vraiment compliqué, si bien que j’en soupirai de soulagement sous son regard interrogateur. Motivé par une force insoupçonnée, je remplis immédiatement ma tâche.

J’achevais mon service à la tombée de la nuit, presque à genoux. Entre la chaleur, le poids des matériaux et ma faible constitution physique, je peinais encore à tenir debout. Je mettais ça sur le compte de la découverte du métier : demain serait forcément meilleur. Du moins, je l’espérais.

Au bord de la mort, je remontais péniblement dans mon grenier où une nouvelle surprise m’attendait. Ma couverture avait disparue avec mes affaires. Je ne croyais pas aux tapis volants et les regards coupables que me lancèrent domestiques confirmèrent rapidement mes soupçons. Néanmoins, la timidité me noua la gorge au moment de parler et je me repliai lamentablement dans mon coin, dépité. Genoux replié contre moi, je passais une terrible nuit à maudire le monde entier.

L’aube ne fut pas plus clémente. Le forgeron me réveilla avec la douceur des trolls des cavernes à la saison des amours. Toujours ensomeillé, j’ignore où je trouvai la force de l’accompagner à la forge. Il me confia deux dagues et une épée, bien trop lourdes pour moi, et exigea que je les livre à un noble qui habitait à une lieue d’ici. Je lui ai offert des yeux ronds quand il apporta un cheval scellé.

Saviez-vous que l’équitation n’est pas un don inné ? Eh bien, je l’ignorais en ce temps-là. Refusant de décevoir mon nouveau maître, je l’ai laissé me monter sur l’immense créature qui me paraissait fort peu docile. Beau-Tison me sourit et je me lançai sur la route. Les deux premières minutes se passèrent plutôt bien. Dès la troisième minute, le destin décida que j’avais trop confiance en moi-même. Sans prévenir, ma monture, effrayée par je-ne-sais-quoi, se cabra et me jeta lamentablement au sol. Elle prit la poudre d’escampette et je réalisais trop tard qu’elle emmenait avec elle les armes confiées par le forgeron.

Paniqué, je me suis époumoné pendant un long moment, à hurler après le cheval qui avait lâchement fui. Malheureusement pour moi, non seulement il ne revint jamais, mais mes cris attirèrent également un groupe de bandits qui passaient non loin de là. Enfin… Dans un premier temps, j’ignorais qu’il s’agissait de brigands ! Ils se proposèrent si gentiment pour garder mes affaires, c’est-à-dire les outils de forgeronnerie qui devaient être livrés avec l’épée et mon repas du midi, le temps que je récupère ma monture. Je ne posai aucune question et partai sur le champs.

J’ai erré dans les plaines pendant deux bonnes heures avant de tomber de nouveau sur le groupe de voleurs. Ils partaient à l’horizon. Avec mon sac, ma monture et mes épées. J’ai couru après eux pendant longtemps, jamais ils ne se sont retournés. Dépité, désespéré, oserais-je dire, j’ai rebroussé chemin pour rentrer au village.

Tête basse, j’ai essayé tant bien que mal de paraître triste et choqué. Ce ne fut pas suffisant. Dès que le forgeron apprît mes mésaventures, il me colla la fessée de ma vie et me jeta dehors sans plus de cérémonie. Deux jours. J’avais tenu deux jours dans ce nouveau travail.

Mais ce vieux chacal ne se contenta pas de me virer ! Oh non ! Il afficha un encart, sur la place publique, qui vendait mon incompétence et ma possible alliance avec le groupe de brigands qui errait près du village. Le vent tourna très rapidement en ma défaveur. Les regards devinrent méfiants, presque hostiles, et, finalement, la famille noble qui possédait la ville me bannit, tout simplement. On me chassa à grands coups de pierre et je pris la fuite sans demander mon reste.

Sans vivres, sans monture, mes chances de survie se retrouvèrent fortement compromise. C’est alors que naquit en moi la plus improbable des idées. Puisque l’on me soupçonnait de complicité avec les brigands, je me ferais engager à leurs côtés, coûte que coûte.

Malheureusement pour moi, l’écart entre ce que l’on veut et ce que l’on vous offre n’est que trop rarement satisfaisant. J’allais l’apprendre à mes dépends.

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